À Avignon, Tiago Rodrigues mêle théâtre grec et enquête judiciaire.

À Avignon, Tiago Rodrigues mêle théâtre grec et enquête judiciaire.
À Avignon, Tiago Rodrigues mêle théâtre grec et enquête judiciaire.

Le directeur du festival d’Avignon, Tiago Rodrigues, dévoile dimanche sa nouvelle création, « Hécube, pas Hécube »une double pièce entre fiction et réalité mêlant textes du théâtre grec et enquête judiciaire, avec des acteurs de la Comédie-Française.

C’est un «Scandale de maltraitance d’enfants autistes dans une institution suisse» qui est à l’origine de ce projet. « Je répétais une pièce de théâtre à Genève lorsque ce scandale a éclaté et j’ai réalisé que l’une des mères des enfants maltraités était une actrice avec laquelle je travaillais. »a déclaré le réalisateur portugais à l’AFP.

Il s’agit de sa cinquième pièce présentée au festival, la première en tant que metteur en scène de cet événement prestigieux qui a débuté samedi.

« J’ai été très impressionné par la manière dont, dans nos sociétés, où (…) il existe encore un accès aux biens et droits essentiels pour la majorité de la population, nous pouvons encore, collectivement, être aussi négligents envers les plus vulnérables. Et d’autre part, par la force de cette actrice”il confie.

Elsa Lepoivre de la Comédie-Française, incarnant Nadia dans la pièce « Hécube, pas Hécube » de Tiago Rodrigues, lors d’une répétition à Boulbon près d’Avignon, le 27 juin 2024 / CLEMENT MAHOUDEAU / AFP

Lorsque la Comédie-Française l’invite à jouer une pièce, il se met en quête d’un personnage féminin qui doit traverser une double souffrance, “dans sa vie” et « dans une pièce ». Tiago Rodrigues pense alors à l’auteur grec classique Euripide et à son personnage Hécube.

La reine de Troie, devenue esclave après la chute de la cité, découvre que son plus jeune fils, qu’elle croit en sécurité auprès du roi des Thraces, a été assassiné par ce dernier et exige alors justice et vengeance.

Nadia (Elsa Lepoivre) incarne cette femme, à la fois comédienne de théâtre qui répète « Hécube » et une mère qui demande justice pour le meurtre de son enfant, jugé devant le tribunal.

Dans le décor de la Carrière de Boulbon, centre du festival qui a rouvert l’an dernier après sept ans de fermeture, les six autres comédiens du Français – Denis Podalydès, Loïc Corbery, Éric Génovèse, Ellissa Alloula, Séphora Pondi et Gaël Kamilindi – interprètent soit des personnages du tragédien grec, soit des personnages qui surgissent dans l’enquête judiciaire.

« Droit humanitaire »

Répétition de la pièce « Hécube, pas Hécube » de Tiago Rodrigues sur le plateau de la Carrière de Boulbon, près d’Avignon, le 27 juin 2024 / CLEMENT MAHOUDEAU / AFP

La chambre « joue sur ce labyrinthe entre fiction et réalité et tente de partager cette confusion, riche et poétique, avec le public »souligne Tiago Rodrigues. Parfois même en brouillant les lignes et en offrant aux spectateurs, à certains moments, la possibilité de ne pas savoir à laquelle des deux histoires appartient tel personnage.

Denis Podalydès est ainsi à la fois Agamemnon et procureur. “A partir du moment où il y a deux textes en un, deux rôles en un, pour n’importe quel acteur, c’est agréable”a-t-il déclaré à l’AFP lors d’une répétition.

Il invite « laissez-vous emporter » par « le rythme du dialogue, les mots » et « par la logique d’une langue »parfois celui de l’histoire presque « cinématique » du dramaturge portugais, parfois celui de la tragédie grecque.

Denis Podalydès de la Comédie-Française, lors d’une répétition de la pièce « Hécube, pas Hécube » de Tiago Rodrigues, à Boulbon près d’Avignon, le 27 juin 2024 / CLEMENT MAHOUDEAU / AFP

Tiago Rodrigues exprime le souhait que « l’enquête judiciaire met en lumière la puissance de l’écriture brillante d’Euripide et montre combien elle est proche de nous aujourd’hui ».

L’ancien directeur du Teatro Nacional Dona Maria II de Lisbonne aime s’inspirer ou réécrire des auteurs classiques (Antoine et Cléopâtre en 2015, d’après Shakespeare) mais aussi rendre hommage au théâtre sous tous ses aspects (le souffleur de théâtre, en ” Haleine “ en 2017).

« +Hecuba, not Hecuba+ est aussi une pièce sur la force de la loi en toutes circonstances. Hécube, vaincue, nous dit que, même en temps de guerre, il y a des actions qui peuvent être considérées comme des crimes », dit-il.

Denis Podalydès s’estime chanceux d’avoir pu participer à cette pièce. « Nous, la troupe de la Comédie-Française, qui travaillons beaucoup entre nous, c’est aussi une manière d’ouvrir grand les fenêtres ».

 
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