« Makeda est l’espoir d’une vie meilleure pour les femmes »

Je voulais écrire Makeda en hommage à tous les « Makeda » du monde.

Expliquez-nous le contexte de la publication de votre roman Makeda.

Depuis mon arrivée en Espagne en 2008, j’avais très envie d’écrire. Makeda est mon premier roman en espagnol. C’était un véritable défi. Je voulais voir quel niveau d’expression j’étais capable d’atteindre. Une fois mon livre terminé, et avec le soutien de mon éditeur, j’ai réécrit Makeda en français. Mon roman a également été traduit en italien.

Qu’est-ce qui vous a poussé à écrire sur ce thème douloureux et difficile de l’excision ?

J’ai un grand respect pour les femmes. Je voulais écrire Makeda en hommage à tous les « Makedas » du monde. Une femme, dès sa naissance, est condamnée du seul fait d’être femme. C’est une marque d’identité discriminatoire. La discrimination ne vient pas du tout, elle est là depuis le début. Je voulais écrire un roman féminin. J’ai cherché au plus profond de moi toute la féminité que j’ai héritée de ma mère, de ma femme et de ma fille. J’ai réuni toutes ces sensibilités pour tenter d’écrire mon roman de manière féminine.

En quoi consiste la pratique de l’excision ?

L’excision du clitoris est une pratique tribale et traditionnelle dans certaines régions d’Afrique noire – notamment en Afrique centrale et en Afrique de l’Ouest – mais aussi dans certains pays arabes comme l’Égypte. Il s’agit de mutilations génitales féminines qui consistent à priver les femmes des attributs que la nature leur a donnés pour jouir de leur sexualité. Attention cependant, l’excision n’est pas une pratique religieuse. L’Islam, par exemple, ne dit rien sur les mutilations génitales.

Je décris l’excision dans le premier paragraphe de mon roman. C’est donc très violent, mais aussi poétique et sensible. Je voulais dépeindre la colère et la détresse de la nature entourant l’acte perpétré à Makeda. Mais Makeda ne concerne pas seulement les mutilations génitales féminines. C’est aussi le mariage forcé, le terrorisme, l’exil et tous les risques qu’elle encourt lors de son immigration clandestine… Enfin, Makeda, c’est l’espoir d’une vie meilleure !

Le prénom « Makeda » a-t-il quelque chose à voir avec la célèbre reine de Saba ?

Assez. C’est cette référence mythologique. Je voulais un nom hautement symbolique.

Les mots ont le pouvoir de dénoncer. Ils permettent de semer maintenant pour récolter demain.

Le personnage principal de votre livre est-il basé sur une personne réelle ?

Non, le personnage est le fruit de mon imagination. Je voulais une histoire propre. Makeda est une jeune fille qui, lors du Paris-Dakar, a fondé un magazine Paris Match. Là, elle découvre une photo d’un modèle. Pendant des années, elle a placé cette photo sous son oreiller. Un jour, elle décide de partir en Europe pour réaliser son rêve : devenir elle-même mannequin.

Bouziane Ahmed Khodja aux rencontres littéraires ce jeudi 23 mai au MUVIM.

Pensez-vous que la littérature soit un levier efficace pour dénoncer les violences ?

Absolument. Tous les écrivains qui peuvent dénoncer ce type de pratiques doivent le faire. Si un jour quelqu’un prend la plume pour écrire, alors nous ne devons plus abdiquer nos responsabilités. L’écriture peut permettre à un lecteur de prendre conscience et, peut-être, de la transmettre à ses enfants. Les mots ont le pouvoir de dénoncer, ils nous permettent de semer maintenant pour récolter demain.

 
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