pourquoi la France n’est-elle toujours pas passée au vote électronique ? – .

pourquoi la France n’est-elle toujours pas passée au vote électronique ? – .
pourquoi la France n’est-elle toujours pas passée au vote électronique ? – .

Pour ces élections législatives anticipées, le vote électronique n’est possible que dans quelques villes de France pour les Français de l’étranger. Véronique Cortier, directrice de recherche au CNRS, explique à - les raisons de ce faible déploiement lors des élections françaises.

Pourquoi ne pas simplement appuyer sur un bouton d’une machine pour désigner votre candidat, au lieu de vous soucier de plier des bulletins de vote surdimensionnés dans une petite enveloppe ? La question revient à chaque élection et s’est encore posée lors des élections européennes de début juin, alors qu’on ne savait pas encore que nous serions très vite appelés à nouveau aux urnes.

Il faut d’abord briser quelques stéréotypes : le vote électronique, utilisant une machine, existe en France mais seulement dans quelques villes. Certaines communes ont obtenu une autorisation entre 2003 et 2008 et utilisent encore ces outils électroniques. En 2007, plus de 1,5 million de Français résidant en France ont voté à l’aide d’une machine, un système de vote alors adopté par 83 communes françaises. En 2017, le nombre d’électeurs est tombé à un million (étude de Chantal Enguehard, Camille Noûs, Ce que vous devez savoir sur le vote électronique en France2020). Il y a donc de moins en moins d’électeurs sur les machines électroniques en France.

Deuxième coup, l’écologie. Aucun pays ne pratique le vote 100% électronique, les bulletins de vote doivent donc toujours être imprimés pour des raisons d’accessibilité. Mais pour l’instant il existe un obstacle principal au vote électronique en France qui empêche tout débat sur ce sujet, c’est la sécurité. Explications de Véronique Cortier, directrice de recherche au CNRS au laboratoire d’informatique du Loria (Nancy), co-auteure de Vote électronique, les défis du secret et de la transparence (éd. Odile Jacob, 2018).

- : Pourquoi la France a-t-elle adopté partiellement le vote électronique pendant un temps avant de revenir sur sa décision ?

Véronique Cortier: On peut distinguer deux types de vote électronique. Il existe des machines à voter grâce auxquelles les gens se rendent dans les bureaux de vote et votent avec des machines. Et il existe le vote sur Internet où vous votez de n’importe où avec un ordinateur. En France métropolitaine, il existe en effet certaines communes qui ont le droit d’utiliser des machines à voter. Mais il y a eu un moratoire. Ainsi, seules les communes qui utilisent des machines à voter depuis 2008, voire avant, ont encore le droit de les utiliser. Ce qui veut dire que ce sont des machines qui ne sont plus mises à jour d’un point de vue sécurité. Un jour, il faudra arrêter de les utiliser.

Près de 410 000 Français résidant à l’étranger ont voté en ligne pour le premier tour des élections législatives. A l’heure du numérique, pourquoi le gouvernement ne lance-t-il pas ce mode de vote sur le territoire français ?

Les difficultés sont multiples, que ce soit en France ou dans de nombreux pays. A l’heure actuelle, les systèmes de vote électronique n’offrent pas le même niveau de sécurité que le vote papier dans les urnes, tel qu’il est organisé en France. Un premier problème est celui de l’authentification : comment s’assurer que c’est bien le bon électeur qui vote ?

« Pour voter aux urnes, les gens viennent avec leur carte d’électeur. Il est difficile de commettre une fraude à grande échelle. Alors que pour voter par internet, lors de ces élections législatives, les Français de l’étranger ont reçu des identifiants transmis par SMS ou autres moyens, ce qui offre d’autres angles d’attaque.

Véronique Cortier, directrice de recherche au CNRS

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Ça existe France Connecter pour s’authentifier en ligne.

En effet France Connecter C’est une voie d’avenir. Mais d’une part, nous n’avons pas le droit de contraindre les électeurs à l’utiliser. D’autre part, le niveau de sécurité offert par France Connect, dans un contexte électoral, reste encore à évaluer.

Et pour voter sur les machines ? On se dit que cela semble accessible à tous comme méthode, contrairement au vote en ligne.

En effet, c’est très simple… si vous faites confiance à la machine. Aux Etats-Unis, où les machines sont largement utilisées, les collègues américains (scientifiques) les ont beaucoup attaquées. Ils ont montré par exemple qu’ils pouvaient installer Pac-Man ci-dessus. Il est important de savoir que ces machines ne disparaissent pas du jour au lendemain. Elles sont stockées et pendant toute la durée de stockage, des personnes malveillantes peuvent tenter d’y accéder et d’en modifier le code.

Cependant, il y a des pays où cela fonctionne.

En Estonie, plus de la moitié de la population a voté en ligne lors des dernières élections. Ils peuvent signer électroniquement leur bulletin de vote avec leur carte d’identité en poche. Ceci est très utile d’un point de vue sécurité. En France, on commence à avoir des cartes d’identité électroniques. Pouvons-nous les utiliser pour signer les bulletins de vote ? Ce n’est pas clair et de toute façon, tout le monde n’a pas encore cette nouvelle carte d’identité. Mais peut-être que dans 10 ans, ce sera une solution très satisfaisante.

« L’Estonie dispose d’un système de sécurité relativement avancé qui offre d’assez bonnes garanties quant à l’intégrité du vote, même si votre ordinateur est corrompu et tente de modifier votre vote. Si vous cliquez sur A, l’ordinateur peut finalement valider B. Le système de vote électronique estonien est protégé contre ce type d’attaque, ce qui n’est pas le cas en France.

Véronique Cortier, directrice de recherche au CNRS

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La Suisse est également un exemple intéressant. Ils n’utilisent pas encore le vote électronique à grande échelle, mais ils votent très souvent par référendum trois fois par an. En pratique, ils ont souvent 5 à 15 questions à répondre. Les électeurs votent beaucoup par correspondance, ce qui n’est vraiment pas très bon du point de vue sécurité. La Suisse souhaite depuis une bonne dizaine d’années proposer le vote électronique à ses concitoyens et elle s’en donne les moyens avec une législation très exigeante. Ainsi, en 2019, des tests de sécurité publique ont été réalisés. Non seulement il était autorisé à attaquer, mais il était même récompensé ! Plusieurs problèmes ont été identifiés, qui ont conduit à une suspension du vote électronique pendant quelques années, avec une reprise à l’automne 2023.

Y a-t-il des problèmes connus dus au vote par Internet ?

L’Australie a compté jusqu’à 500 000 électeurs pour certaines élections. Mais récemment, ils ont été suspendus au moins temporairement, car lors des dernières élections, plus de 10 000 personnes n’ont pas pu voter. En France, en 2023, il y a trois circonscriptions qui ont été rejouées à cause du vote électronique, dont deux parce que de nombreuses personnes n’avaient pas reçu le SMS qui leur permettait de voter.

La généralisation du vote électronique était une promesse de campagne d’Emmanuel Macron en 2017.

Quand un responsable politique appelle à développer le vote électronique en France, on dit « Aïe ! Il ne faut pas passer au vote électronique parce que c’est à la mode, il faut vraiment avoir des raisons. En 2017, la technologie n’était clairement pas prête, la législation non plus. Les choses avancent. En 2019, la CNIL a introduit des notions de vérifiabilité. L’objectif est qu’un électeur puisse vérifier lui-même que son bulletin a été pris en compte, grâce à des outils tiers. Cette recommandation de la CNIL contribue à diffuser les bonnes pratiques de sécurité en France.

« Nous sommes encore loin d’avoir un système à la hauteur des enjeux, par exemple pour l’élection présidentielle française. Scientifiquement, nous essayons de développer des solutions de plus en plus sécurisées, nous étudions dans quels contextes il est approprié de les utiliser. Mais nous disons plutôt : s’il vous plaît, ne mettez pas en œuvre le vote électronique alors que le vote papier dans les urnes fonctionne bien.

Véronique Cortier, directrice de recherche au CNRS

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En fait, il n’y a aucune raison de passer au vote électronique ?

Certains ont besoin de voter électroniquement comme les Français de l’étranger. Sinon, ils votent par correspondance, ce qui est aussi très mauvais en termes de sécurité. Mais pour des élections simples comme en France, où l’on choisit un nom parmi une douzaine, il n’y a pas vraiment d’intérêt de passer au vote électronique. Le vote papier dans les urnes offre vraiment de bonnes garanties de sécurité, c’est un système simple que les gens comprennent. Donc il y a vraiment la question du pourquoi. Même si on le pouvait, pourquoi le ferait-on ?

Pour réduire le besoin d’évaluateurs ?

En effet, il n’est pas forcément simple d’organiser des élections papier, il faut des évaluateurs. Clairement, on en a besoin de beaucoup moins pour le vote électronique. En revanche, il reste nécessaire et avec un certain niveau de qualification.

Le vote électronique pourrait-il réduire le taux d’abstention ?

C’est d’ailleurs un cliché qui revient souvent. Il y a eu des études sur le sujet. A chaque fois, cela montre qu’il n’y a pas de changement notable. Par exemple, l’Estonie, qui vote en ligne depuis longtemps, n’a pas un meilleur taux de participation que la France. Même si elle est souvent soulignée, elle ne semble pas avoir un impact majeur.

 
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