56 jours de mer, un écart minime entre les hommes de tête, une mer agitée du sud… Et des hallucinations. Pour Clarisse Crémer (L’Occitane en Provence) comme pour ses concurrentes, la fatigue et la solitude se font sentir au moment de remonter l’Atlantique vers l’arrivée aux Sables-d’Olonne. Les leaders, Charlie Dalin (Macif) et Yoann Richomme (Paprec-Arkéa) ont franchi l’équateur dimanche 5 janvier.
Entre la tentation de tout mettre en œuvre pour avancer et ne pas prendre du retard, et celle de volontairement baisser le rythme pour se reposer, l’équation n’est pas simple pour les skippers. Mais soyez prudent »,manque de sommeil, effort intense et prolongé, manque de ressources nutritionnelles ou cognitives et absence de soutien physique » peut entraîner une perte de lucidité, souligne Yves Lambert, l’un des médecins qui se relaient pour veiller à l’état de santé des skippers, cité sur le site officiel de la course.
« Je commence officiellement à devenir fou, je navigue comme un fou, je fais tout à l’envers. Je suis un peu fatiguée, je ne sais plus trop de quoi je parle, je pense qu’il faut que j’aille dormir, raconte Clarisse Crémer dans une vidéo. Mes yeux se ferment tout seuls, j’ai dû dormir deux ou trois heures ces dernières 24 heures. Je crois que j’ai des hallucinations à cause de la fatigue. Pendant quelques secondes, j’ai eu l’impression d’être en Auvergne à monter et descendre des collines. Ce n’est pas du tout un rêve, c’est comme un sentiment réaliste. Parfois, quand je suis épuisé, j’ai l’impression qu’il y a quelqu’un dans le cockpit qui navigue pour moi..
Mais quand la lucidité fait défaut, les conséquences peuvent être dangereuses. « Il peut s’agir d’une baisse de performances, d’une panne des automatismes ou encore plus dramatiquement de casses, d’une panne, d’un accident, d’un abandon ou encore d’une chute en mer »prévient Yves Lambert.
Benjamin Ferré (Monnoyeur – DUO pour un JOB), a par exemple reçu un avertissement gratuit début décembre. “Tout à l’heure, j’ai oublié une demi-écoute (corde servant à régler l’angle d’une voile), dont je ne suis pas devenu accro. Je suis sorti de ma sieste et elle avait fait mille tours. Heureusement, je m’en suis sorti, mais les petites bêtises comme celles-là coûtent cher. Les mers du Sud sont très exigeantes, la moindre erreur d’inattention est une sanction immédiate. » il a ensuite expliqué dans une vidéo.
Et quand on sait que la victoire s’est jouée pendant 2h30 entre Yannick Bestaven et Charlie Dalin lors de l’édition 2020-2021, les skippers n’ont pas le droit à l’erreur. Dimanche à 15 heures, seuls 128 milles nautiques séparaient encore l’actuel leader de son poursuivant, Yoann Richomme.