« Le fleuve nous fait vivre comme il peut nous tuer »

« Bon sang… » Théo Cousseins est d’un naturel optimiste, mais c’est beaucoup. A cette époque, l’île de Baine, à Chaniers, était plutôt un petit coin de paradis. La rivière qui coule en cascade, au fond, l’écluse où l’on vient regarder passer les bateaux, la maison musée des pêcheurs et la cabane, au milieu, qui offre un cadre bucolique pour se détendre en famille. Nous sommes le mardi 7 mai 2024, et la Charente salive encore au pied du bar. L’équipe travaille à surélever les équipements sur des blocs de béton. Un casse-tête, en ce week-end de bridge pourtant propice.

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La Charente monte, les bateaux restent à quai

Les dernières intempéries font à nouveau monter la rivière. A Saintes, le « Palissy-III » ne pourra plus naviguer pour des raisons de sécurité, et faute de place pour accoster. La situation pénalise les loisirs proches de l’eau

Début avril, Théo Cousseins avait entamé le grand ménage de printemps. Deux jours plus tard, une nouvelle inondation frappait l’île pour la quatrième fois cette saison. Elle a finalement ouvert ses portes mardi 30 avril. Les chaises s’enfonçaient un peu dans le sol où l’herbe a parfois l’apparence d’une calvitie naissante. «Ça fait transpirer, mais ce n’est pas grave. Cela fait partie du lieu, nous le savons bien », a réagi le manager.


  • Mardi 7 mai, Charente était de retour sur l’île de Baine.

    Mardi 7 mai, Charente était de retour sur l’île de Baine.


  • Mardi 7 mai, Charente était de retour sur l’île de Baine.

    Mardi 7 mai, Charente était de retour sur l’île de Baine.

  • Mardi 7 mai, Charente était de retour sur l'île de Baine.


    Mardi 7 mai, Charente était de retour sur l’île de Baine.

    Mardi 7 mai, Charente était de retour sur l’île de Baine.

Flux de vélo boueux

« Le fleuve nous fait vivre comme il peut nous tuer. Nous sommes hyper dépendants de notre lit et des conditions climatiques. D’où l’importance d’avoir un plan B», explique son associé, Jérôme Dechambre, propriétaire du restaurant Moulin de Baine. Ils envisagent de démolir la cabane, vieille d’une trentaine d’années, pour installer une structure entièrement démontable et rehaussable. Les projets ne manquent pas pour répondre à une réelle appétence pour ce type d’aménagement. « Nous nous agrandissons un peu chaque année. Cette année, nous aurons des braseros supplémentaires. »

Jérôme Dechambre et Théo Cousseins veulent rester optimistes.


Jérôme Dechambre et Théo Cousseins veulent rester optimistes.

Philippe Ménard/SO

  • La cabane attire une clientèle familiale.


    La cabane attire une clientèle familiale.

    Philippe Ménard / SO

  • La crue de fin avril a laissé derrière elle des algues qui recouvrent toutes les rives de la Charente.


    La crue de fin avril a laissé derrière elle des algues qui recouvrent toutes les rives de la Charente.

    Philippe Ménard / SO

  • Au camping, les installations sont surélevées pour digérer les inondations.


    Au camping, les installations sont surélevées pour digérer les inondations.

    Philippe Ménard / SO

  • La taverne du camping Chaniers voit à nouveau la Charente s'immiscer.


    La taverne du camping Chaniers voit à nouveau la Charente s’immiscer.

    Philippe Ménard / SO

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Saints face aux inondations : notre dossier

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5,42 mètres le 13 novembre 2023, 6,08 mètres le 17 décembre 2023 et 5,54 mètres le mercredi 6 mars 2024. Les crues de cet hiver ont connu trois pics à l’échelle du pont de Palissy et les Saintais avaient les pieds dans l’eau. Le changement climatique est-il en cause ? Pourquoi Saintes a-t-elle été construite en partie dans le lit du fleuve ? Faut-il repenser la ville ? « Sud Ouest » tente de répondre à ces questions.

Un peu plus loin, la taverne du camping Chaniers a à nouveau les pieds mouillés. « J’avais prévu une ouverture le 12 mai. On va passer au 15. Le terrain est encore humide. Nous sommes prêts à tirer. Le problème, c’est que je ne peux pas mettre un seul camping-car sur les emplacements », observe Jean-Christophe Doreau. Il rachète le magasin en 2020 et investit dans des logements amovibles pour éviter les inondations.

« En 2023, les inondations ont commencé le 17 octobre. C’est un peu le bordel, le schéma économique est en train de changer complètement. On a opéré six mois, on passe à quatre mois. Le problème est que nous n’avons pas beaucoup de projections pour l’avenir. Il va falloir adapter nos outils de travail. Je vais demander des réunions aux élus pour y réfléchir.»

« C’est un peu le bordel, la structure économique est en train de changer complètement. On a opéré six mois, on passe à quatre mois. Le problème est que nous n’avons pas beaucoup de projections pour l’avenir. »

Jean-Christophe Doreau s’inquiète des conséquences sur Flow Vélo, qui tire sa fréquentation. « Les terrains sont boueux. Je préviens les clients, ils sont reconnaissants. J’ai eu des reports en août et septembre. » La guinguette attendra fin mai, voire début juin. « On verra selon Madame la rivière… »

« Les clients sont impatients »

A Pons, la zone de loisirs a également démarré plus tard que prévu. « La dernière inondation a eu lieu le 1euh avril. Ce n’était pas un poisson», plaisante Jean-Dominique Giraud, qui exploite depuis onze ans cette rive très prisée de la Seugne. L’été, l’effectif passe à 18 personnes au restaurant qui attire une clientèle familiale avec ses snacks et ses jeux gratuits. « L’hiver, on démonte tout, on plonge, les toilettes… Il ne reste que la structure. Les clients étaient impatients ! Nous avons ouvert le 26 avril au lieu du 15. Nous tournons sept jours sur sept jusqu’au troisième week-end de septembre. »

L'espace de loisirs de Pons est conçu pour faire face à la crue de la Seudre, ici en décembre 2020.


L’espace de loisirs de Pons est conçu pour faire face à la crue de la Seudre, ici en décembre 2020.

Nadine Juillard

Pour les pédalos, il faudra attendre que la Seugne se calme un peu. Les crues répétées ont causé des dégâts, la rivière a besoin de soins.

« Saintes, un laboratoire »

Pour Pascal Duc, patron de « Palissy-III », la période avant début mai constitue un « bonus ». Le bateau touristique saintais est bloqué à quai jusqu’au 10 mai. Il a pu reporter les réservations, mais la situation ne devrait pas perdurer. L’ensemble de l’économie touristique d’un fleuve attend avec impatience son retour dans son lit mineur, en espérant que les multiples crues de l’hiver 2023 restent « exceptionnelles ».

Au camping des Saintes, Olivier Brousse intègre ces évolutions dans sa maquette. Il vient de reprendre la gestion du site en délégation de service public depuis dix-huit ans avec sa société, Weco. « Nous devrions ouvrir début juin, soit un mois plus tard que prévu. Il faut attendre que le sol sèche un peu pour que le matériau ne se détériore pas. Les installations ont été conçues pour être flexibles et résilientes. » Olivier Brousse a envoyé une équipe aux Pays-Bas pour voir comment ils ont contourné les inondations. « Il n’y a pas de fatalité. Depuis le 14e siècle, ils se trouvent en dessous du niveau de la mer. Ce n’est pas simple, mais il existe des solutions. il faut anticiper, concevoir les équipements pour ne plus être dépendants. Saintes peut être un laboratoire. »

 
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