Pourquoi de nombreux hôpitaux suisses ont-ils des difficultés financières ? – .

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Les difficultés de financement d’un hôpital sont au cœur de la deuxième partie du scrutin du 9 juin. Comprendre le système permet de mieux comprendre les problématiques auxquelles sont confrontés les établissements comme le HFR.

Les soins prodigués à chaque patient hospitalisé sont remboursés selon un système forfaitaire par cas. © Chloé Lambert-archives

Les soins prodigués à chaque patient hospitalisé sont remboursés selon un système forfaitaire par cas. © Chloé Lambert-archives

Publié le 30/04/2024

Temps de lecture estimé : 6 minutes

Il s’agit d’un soutien financier important que pourrait recevoir l’Hôpital fribourgeois (HFR) si la population fribourgeoise acceptait l’idée d’une garantie et d’un prêt de 175 millions de francs le 9 juin. Cette aide sera la bienvenue pour l’hôpital qui peine à investir avec ses propres ressources. Régi par les forfaits à cas, le taux de base ou le PIG, le financement des hôpitaux suisses peut paraître très opaque. Toutefois, ces termes cachent des réalités bien concrètes.

Colis par caisse. Les hôpitaux suisses sont financés depuis 2012 sur la base de forfaits par cas. Ces montants sont fixés par SwissDRG pour les hospitalisations aiguës, Tarmed pour les prestations ambulatoires et ST-REHA pour la réadaptation. À chaque diagnostic correspond un forfait. Ainsi, l’implantation d’une prothèse de hanche sera remboursée sur les mêmes bases dans toute la Suisse. Que le patient ait 25 ou 85 ans, le forfait, calculé à partir d’une moyenne des coûts de tous les hôpitaux, restera le même.

Pour qu’un autre forfait soit envisagé, le patient devra avoir des diagnostics secondaires, comme une infection après une intervention chirurgicale. Lorsqu’il y a hospitalisation, la facture est prise en charge à 55% par le canton et à 45% par l’assurance maladie. Pour les consultations ambulatoires, les fonds paient à 100 %.

« De manière générale, les forfaits ne couvrent pas les frais de traitement lorsque les patients présentent des comorbidités et des problèmes sociaux »
Daniela Ehbrecht Fux

Biais. Les forfaits par cas ne tiennent pas compte de la situation du patient. « S’il est jeune et qu’il a une famille pour le soutenir, il pourra rentrer directement chez lui au bout de quelques jours. S’il est très vieux et seul à la maison, ce sera complètement différent. De manière générale, les forfaits ne couvrent pas les frais de traitement lorsque les patients présentent des comorbidités et des problèmes sociaux », rapporte le Dr Daniela Ehbrecht Fux, responsable du contrôle de gestion médicale à l’HFR.

Les forfaits étant calculés sur la base des années précédentes, ils ignorent les phénomènes les plus récents, comme l’inflation. De plus, un hôpital public doit soigner tout le monde, contrairement à une clinique privée qui a la possibilité de se concentrer sur certaines spécialités et de privilégier les opérations électives, programmées à l’avance. «C’est l’une des raisons pour lesquelles ils s’en sortent mieux», déclare Daniela Ehbrecht Fux. Ils ont également davantage de patients privés et semi-privés. Ils suivent moins de formations et ne proposent souvent pas d’urgence 24 heures sur 24. »

Taux de base. Chaque hôpital a ses particularités et négocie son tarif de base par cas, le fameux tarif de base, avec les assureurs. Une fois multiplié par l’indice de gravité du cas, il permet de déterminer le coût facturé pour chaque situation. Les hôpitaux universitaires ont généralement un tarif de base plus élevé, notamment en raison du caractère lourd des dossiers qu’ils traitent. Les accords fixant les taux de base peuvent être renégociés. Le HFR l’a fait en 2023, afin de compenser l’inflation. «Notre tarif de base est passé de 9700 à 9950 francs en 2024, ce qui représente une forte augmentation. Mais les assureurs n’étaient pas prêts à franchir la barre des 10 000 », explique Nathalie Tercier, directrice financière.

Prix ​​du HFR. En comparaison suisse, le HFR est relativement cher. Les raisons sont multiples. Opérer sur quatre sites constitue un désavantage financier. «Nous avons besoin de personnel qualifié à plusieurs endroits», explique le Dr Daniela Ehbrecht Fux. Traiter un large éventail de pathologies nécessite de faire appel à de nombreux spécialistes. « Par contre, si on fait uniquement de l’orthopédie, on a toujours des démarches similaires », complète Nathalie Tercier.

Les transferts entre sites ont un prix. Dans un bâtiment ancien comme l’Hôpital cantonal, les coûts de réparation et de rénovation sont importants. Les personnels du HFR, soumis à la loi sur le personnel de l’Etat, bénéficient de la grille salariale cantonale. Une indexation de 2,74%, décidée par le Conseil d’État pour 2023, a un impact important sur les finances. Le bilinguisme alourdit également la facture : tous les outils informatiques doivent être disponibles en deux langues, avec supports et licences payants.

“Cela ne couvre pas la totalité des frais”
Nathalie Tercier

Prestations d’intérêt général (PIG). Pour le bilinguisme ou les transferts entre sites, la HFR reçoit le soutien du canton à travers les services d’intérêt général (PIG) ​​et d’autres services. « Mais cela ne couvre pas la totalité du coût », explique Nathalie Tercier. Les PIG sont des prestations spécifiques que le canton commande à l’hôpital et finance. Cela comprend la formation universitaire, la recherche, l’aumônerie, le SMUR (service mobile d’urgence et de réanimation), les sages-femmes consultantes et la psychiatrie de liaison.

Soutien du canton. Pour obtenir des PIG, une demande est introduite chaque année auprès du canton par la HFR. Ce support est réservé à des prestations spécifiques pour lesquelles une comptabilité analytique est demandée. Le HFR dispose toujours de financements transitoires, instaurés après le changement de système en 2012. « L’objectif est de réduire ces financements transitoires et de les allouer aux PIG existants afin de couvrir les coûts », rapporte Nathalie Tercier.

Investissements. Il était prévu que le système de forfaits au cas par cas permettrait de financer l’ensemble de l’hôpital, qu’il s’agisse des soins médicaux, des services administratifs ou des investissements. Mais pour Nathalie Tercier, avec l’inflation, le système ne permet plus à l’HFR, comme d’autres hôpitaux, de réserver une partie des revenus pour l’avenir : “On n’y arrive pas.” Actuellement, le HFR finance ses investissements et réparations urgentes via un compte courant, mis à disposition par l’État et dont la limite de crédit a été augmentée. Le canton fonctionne comme une banque et fournit des liquidités. Mais il perçoit également des intérêts sur ces montants.

Initiative, contre-projet et soutien au HFR en question

Le 9 juin, les Fribourgeois se prononceront sur plusieurs sujets liés à la santé dans le canton. L’initiative des urgences hospitalières publiques locales 24 heures sur 24 a été lancée par un mouvement de citoyens mécontents de la nouvelle orientation des hôpitaux de district. Elle réclame la réouverture des services d’urgence 24h/24 à Tavel et Riaz. Afin de répondre aux inquiétudes, le Conseil d’État et le Grand Conseil ont concocté un contre-projet contenant 7 mesures visant à assurer une prise en charge adéquate sur l’ensemble du territoire. Ils soumettent également aux citoyens un arrêté portant sur un montant de 175 millions afin de soutenir les investissements de l’Hôpital fribourgeois. Une garantie de 105 millions devrait permettre au HFR de poursuivre ses investissements en faveur de projets de renouvellement, d’innovation et d’amélioration des sites actuels. Un prêt de 70 millions est destiné aux études liées à la construction d’un nouvel hôpital.

Liberté consacre une série d’articles à ces différents objets, à lire dans le journal et à tout moment sur le site laliberte.ch.

 
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