une longévité discrète pour un bilan discuté au gouvernement

une longévité discrète pour un bilan discuté au gouvernement
une longévité discrète pour un bilan discuté au gouvernement

jeIl n’y aura pas d’état de grâce. Le 22 janvier, Agnès Pannier-Runacher devra composer avec la mauvaise humeur du monde de la pêche, confronté pour la deuxième fois à l’interdiction de pêcher pendant trente jours dans le golfe de Gascogne – la côte maritime de la Nouvelle-Aquitaine – pour les bateaux de plus de 30 jours. 8 mètres. Le motif ? Sauvegarde des cétacés, dauphins et marsouins capturés accidentellement. C’est ainsi que la ministre de la Transition écologique, de la Biodiversité, de la Forêt, de la Mer et de la Pêche ira au feu sur deux de ses compétences, apparemment contradictoires en l’occurrence : la protection du vivant et celle des pêcheurs.

La personne concernée saura s’adapter. Cette macroniste de la première heure, « marcheuse » depuis 2016, a enfilé des habits ministériels hauts en couleur depuis l’automne 2018. Secrétaire d’État, ministre déléguée, ministre titulaire, elle a travaillé avec Bruno Le Maire (Économie et Finances) et Marc Fesneau (Agriculture) et s’engage dans la Transition Énergétique, puis dans la Transition Écologique.

Performance politique, elle a connu tous les Premiers ministres d’Emmanuel Macron : Édouard Philippe, Jean Castex, Élisabeth Borne, Gabriel Attal, Michel Barnier et désormais François Bayrou. Sa longévité lui a valu une carte de membre d’un petit club de membres quasi inamovibles des deux quinquennats.

Manque de leviers d’action

Le vaste inventaire dans son portefeuille rappelle peut-être les bibelots d’un général soviétique, mais la transition écologique n’est plus ce qu’elle était. C’était mieux avant, paraît-il. Nicolas Hulot, grand vétéran politique, fut ministre d’État et numéro trois du gouvernement. Agnès Pannier-Runacher est aujourd’hui douzième dans l’ordre protocolaire, dans l’anonymat du peloton.

« Le terme « climat » a disparu de l’intitulé du ministère et l’Energie a déménagé à Bercy »

« Elle est avant tout ministre de la Biodiversité. En fait, les questions climatiques lui échappent. Le logement, les transports, l’énergie et l’industrie ne relèvent pas de sa responsabilité. Autant de leviers d’action pour réduire les émissions de gaz à effet de serre ! » observe le girondin Jean-François Julliard, le directeur général de Greenpeace . « Le terme « climat » a disparu de l’intitulé du ministère et l’Energie a déménagé à Bercy », ajoute Nicolas Thierry, le député (EELV) de Bordeaux.

C’est le petit nouveau Marc Ferracci qui est aujourd’hui ministre de l’Industrie et de l’Énergie, sous la tutelle du grand financier Éric Lombard. Agnès Pannier-Runacher fait comme si de rien n’était. Elle n’était pas du grand voyage ministériel à Mayotte en début de semaine, lorsque François Bayrou y parlait de l’utilisation du bois abattu par le cyclone Chido ? “J’élargis mon portefeuille pour inclure tout ce qui touche aux questions forestières, maritimes et de pêche, et je maintiens la décarbonation de tous les secteurs, y compris l’énergie”, rétorquait-elle il y a quelques jours sur RTL. « Le climat reste bel et bien du ressort du ministère », appuie son cabinet.

La renaissance du nucléaire à l’horizon

Au-delà des interminables débats sur son ampleur, c’est le bilan d’Agnès Pannier-Runacher, ses convictions et sa liberté de manœuvre qui laissent dubitatifs les militants écologistes. Lorsqu’elle a été nommée à la Transition Énergétique en mai 2022, on se moquait de cette femme de la haute société dont la seule expérience en la matière était familiale : elle est la fille de Jean-Michel Runacher, ancien directeur du pétrolier français Perenco.

Elle a profité de la crise énergétique pour imprimer. Elle a porté le plan sobriété, notion jusqu’alors inconnue de la doxa macroniste, avant que le sujet ne retombe dans le pile des priorités. L’automne dernier, elle a remis sur les rails les documents fondamentaux de la feuille de route climat-énergie française – la programmation pluriannuelle de l’énergie, la stratégie nationale bas carbone – victimes de la désinvolture du gouvernement Attal. Et elle a fermement refusé de se rendre à la COP 29 à Bakou en novembre, en réponse aux déclarations véhémentes contre la France du président azéri Ilham Aliev.

Mais sur les questions énergétiques, il reste très marqué « petit soldat du macronisme », avec pour horizon la relance du nucléaire. « Nous ne l’avons jamais entendu exprimer la moindre nuance ni la moindre opinion personnelle sur ces sujets », regrette Georges Cingal, le secrétaire général de Sepanso Aquitaine, qui regroupe de nombreuses associations de défense de la nature.

La bataille des pesticides

Recentrée « ministre des vivants », celle qui a passé l’écueil des législatives de juillet – élue dans le Pas-de-Calais – ne manquera pas d’enjeux tendus. Face à sa collègue de l’Agriculture, Annie Genevard, « qui adopte des positions catastrophiques, on attend d’elle qu’elle défende l’application de la réglementation et ressuscite le plan Écophyto ». [la réduction de l’usage des pesticides, NDLR] torpedoed by Gabriel Attal,” says François Veillerette, spokesperson for Générations futures, an anti-pesticide association. Nicolas Thierry is not convinced. “She’s a technosolutionist [quelqu’un qui pense que la solution passe par l’innovation technique, NDLR] dans la tradition macroniste. Cela me semble avant tout rassurer les grands industriels. Ce qui explique pourquoi elle reste au gouvernement», juge-t-il avec une pointe de cruauté. « Elle fait partie de ces personnes qui croient ou font semblant de croire que les approches volontaires ont le pouvoir de résoudre les problèmes écologiques. Il faut donc une réglementation claire», estime à son tour Georges Cingal.

Agnès Pannier-Runacher s’est néanmoins un peu démarquée du rang. En novembre, elle s’était prononcée « à titre personnel » contre le retour des néonicotinoïdes, une classe d’insecticides dangereux pour l’homme et les écosystèmes. Sur la baisse des émissions de gaz à effet de serre, dont Emmanuel Macron s’est félicité lors de ses vœux télévisés, elle a apporté un léger bémol en pointant un ralentissement du rythme. « Nous ne devons pas baisser la garde. L’inaction climatique a un coût pour les Français », a-t-elle prévenu. Ce mot porte-t-il à la table du Conseil des ministres ?

 
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