Le luxe reste populaire, mais pas à n’importe quel prix

Le luxe reste populaire, mais pas à n’importe quel prix
Le luxe reste populaire, mais pas à n’importe quel prix

Les deux experts font le point sur l’évolution du marché du luxe dans et autour de la capitale.

« 2023 a été un sommet pour le marché du luxe français. Il faudra redescendre en 2024”

1) Une demande plus précise

Ceux qui choisissent de s’installer plus loin de Bruxelles recherchent de beaux terrains, sans vis à vis et calmes. “La pollution sonore n’est pas du haut de gamme”remarque Sophie Stulemeijer Coene. « Les biens présentant des défauts qui étaient faciles à vendre il y a deux ans sont plus compliqués à vendre aujourd’hui » ajoute Frédérique Pauporté. De plus, « Les acheteurs sont attentifs à l’authenticité. Ils apprécient les matières nobles. On assiste également à une nouvelle tendance chez les 30-40 ans qui commencent à vouloir redonner vie à d’anciens appartements. Ils ne se concentrent pas uniquement sur le contemporain. Ils sont également bien informés sur ce qu’il faut faire pour récupérer un mauvais PEB », indique encore Sophie Stulemeijer Coene qui ajoute que« alors qu’on n’en parlait pas jusqu’à récemment dans l’immobilier de luxe, la question du PEB revêt aujourd’hui une grande importance ».

Plus le prestige est élevé, plus les acheteurs s’attendent à avoir de belles choses et un certain nombre de services. “Ils ne sont pas plus difficiles ou exigeants, mais plus spécialisés”dit le réalisateur d’Emile Garcin.

A Ohain, entre champs et vergers, une ferme en carré sur un hectare de terrain coûte 4,95 millions d’euros. ©Émile Garcin

2) Une question de goût et de culture

« On trouve dans la capitale des biens de qualité, avec de belles finitions et de belles prestations, souligne Frédérique Pauporté. Il y a de grands architectes et les maîtres d’ouvrage ont du goût. Bruxelles n’a pas de quoi avoir honte par rapport aux autres capitales. A Londres par exemple, les projets connaissent beaucoup moins de succès. Cela s’explique, entre autres, par le fait que nous vivons beaucoup plus dans des maisons que dans des appartements par rapport à d’autres pays. Nous avons aussi une culture de la rénovation, de l’architecture et des beaux matériaux.

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C’est bien de faire quelque chose d’exceptionnel, mais nous restons en Belgique. Les promoteurs doivent veiller à réaliser des projets pour lesquels il existe un marché.

3) Un bien rénové ou à rénover ?

Dans le haut de gamme, les acheteurs ont tendance à rechercher des biens déjà rénovés. « Cela dépend aussi de l’âge. Les moins de 50 ans ont encore l’énergie de se lancer dans un projet de rénovation car réaliser des travaux demande du temps et de l’argent. Et si certains ont le budget pour déléguer cette tâche, le suivi des chantiers reste nécessaire », estime Sophie Stulemeijer Coene. Les acheteurs plus âgés seront moins tentés de se lancer dans des travaux. Tout comme les expatriés pour qui c’est plus compliqué.

Une rénovation approfondie (plomberie, électricité, chauffage, etc.) peut justifier un certain prix. «Mais une cuisine exceptionnelle ne peut guère être valorisée. Les goûts des uns ne correspondent pas toujours à ceux des autres »prévient-elle.

Même si de nombreux nouveaux projets sont en préparation, tous ne voient pas le jour faute de permis. « Nous recevons beaucoup de demandes de penthouses de la part de clients qui ne souhaitent plus entretenir de jardin ou de piscine. Ils vivent alors en appartement et achètent une résidence secondaire au soleil. »dit Frédérique Pauporté.

Dans les biens neufs, il faut quand même faire attention à l’offre. «C’est bien de faire quelque chose d’exceptionnel, mais nous restons en Belgique», rappelle Sophie Stulemeijer Coene. Les promoteurs doivent veiller à réaliser des projets pour lesquels il existe un marché.

Une maison de maître entièrement rénovée avec jardin à Etterbeek (Montgomery) est à gagner à 3,49 millions d’euros. ©Émile Garcin

4) Les prix se sont stabilisés

« Nous revenons à des prix plus justes. 2023 n’a pas été une grande année. Mais nous venions de deux années exceptionnelles avec beaucoup de demande et des prix parfois un peu fous», raconte Sophie Stulemeijer Coene. « Dans les zones les plus recherchées, les prix restent stables, mais les ventes prennent un peu plus de temps, note pour sa part Frédérique Pauporté. Les favoris sont plus rares. Nous venons de réaliser une belle vente à trois millions d’euros sur l’avenue de la Couronne à Ixelles. Mais nous avons été surpris car le bien avait disparu en une semaine.

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Les biens très luxueux sont plus difficiles à vendre, notamment à cause de Good Move. Les gens ne veulent pas acheter un très bel appartement dans une rue qui pourrait un jour être fermée et devenir piétonne.»

Contrairement à ce qui se passe dans d’autres capitales, les prix à Bruxelles restent relativement raisonnables. « Des montants de huit ou dix millions d’euros, c’est vraiment déjà beaucoup. La plupart de nos clients disposent d’un budget de 400 000 à deux millions d’eurosprécise Sophie Stulemeijer Coene. Les biens très luxueux sont plus difficiles à vendre, notamment à cause de Good Move. Les gens ne veulent pas acheter un très bel appartement dans une rue qui pourrait un jour être fermée et devenir piétonne.»

Certains acheteurs ont-ils un budget illimité ? “Cela peut arriver”, note le réalisateur d’Emile Garcin. Les clients nous disent : « le prix n’a pas d’importance mais je veux cet emplacement ». C’est l’emplacement qui détermine le prix. S’il n’y a pas d’adéquation entre l’emplacement et le prix, la vente ne sera pas réalisée.

5) Payez le juste prix

Même dans le haut de gamme, l’acheteur souhaite payer le juste prix. « Il faut éviter les surfacturations de la part du propriétaire. C’est pourquoi le timing de l’évaluation du bien est essentiel. Le rôle de l’agent immobilier a évolué. On nous demande de plus en plus de conseils et d’accompagnement. C’est presque du conseil. Pour fixer le prix, vous devez expliquer clairement au propriétaire la valeur de son bien. Cela peut être un peu plus délicieux, mais il ne faut pas en faire trop. Dans le cas contraire, le bien restera sur le marché et le propriétaire sera frustré. Lorsqu’on vend une belle propriété avec une histoire familiale, il y a beaucoup d’émotion. Il faut être respectueux, estime Sophie Stulemeijer Coene. Dans l’immobilier de prestige, l’acquéreur s’attend à disposer de prestations haut de gamme. Il n’aime pas trop négocier et n’osera pas proposer une offre avec une remise trop importante. Mais il y a bien sûr toujours une petite étape de négociation. Nous devons soutenir à la fois le vendeur et l’acheteur.

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6) Qui sont les acheteurs ?

La clientèle belge est toujours active, mais le marché bruxellois attire aussi les étrangers. Les Français en particulier. « Nous ne sommes certes plus dans le grand mouvement des années 1990, mais les Français sont toujours là. Ce ne sont plus forcément des exilés fiscaux ou des fonctionnaires mais des gens qui apprécient la qualité de vie bruxelloise. »remarque Sophie Stulemeijer Coene, qui note une autre évolution : « On ne les trouve pas seulement près de la place Brugmann. Ils optent également pour des communes périphériques, comme Rhode-Saint-Genèse par exemple. Ils connaissent également bien le marché et les prix. À l’époque, ils coûtaient cher. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. »

Cette villa plantée sur 45 ares de terrain arboré ne compte pas moins de 600 m² habitables à Rhode-Saint-Genèse.
Cette villa plantée sur 45 ares de terrain arboré ne compte pas moins de 600 m² habitables à Rhode-Saint-Genèse. ©Émile Garcin

Bruxelles compte également une belle communauté d’Espagnols et d’Italiens qui achètent également. « C’est drôle de voir que les critères de recherche diffèrent selon l’origine. Les Belges et les Français apprécient d’avoir une cuisine ouverte ; Les Italiens détestent », note Sophie Stulemeijer Coene. Sans oublier les ambassades, avec des demandes très spécifiques, comme de grandes salles de réception ou des salles à manger d’exception. « Il faut écouter les besoins. Les gens haut de gamme savent généralement ce qu’ils veulent ou ne veulent pas. Quand on travaille dans l’immobilier de luxe, il y a vraiment un suivi client. On crée des liens, on rencontre des gens formidables, on discute du choix d’une école par exemple. Avec les Belges mais surtout avec les étrangers. En prestige, nous vendons un art de vivre. On parlera d’un magnifique parc à côté d’un bel appartement ou d’un bon restaurant.

7) Un marché locatif ?

« Nous avons de belles demandes de biens à louer »évoque le PDG de Barnes, qui fait écho à des loyers qui peuvent monter jusqu’à 12 000 euros par mois. « Mais autour de 6 000 euros par mois, ce sont déjà de bons loyers. Certains préfèrent louer plutôt que d’acheter parce qu’ils ne savent pas s’ils vont rester en Belgique.» « À une époque, nous avions des entreprises qui payaient des loyers énormes pour leurs expatriés. On ne voit plus çadit Sophie Stulemeijer Coene. Dans l’immobilier de luxe, le rendement n’est pas bon : inférieur à 2 %. Nous n’achetons pas du haut de gamme pour le louer.

 
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