Devant une salle comble, les trois auteurs finalistes ont participé au jeu de discussion avec leurs jeunes jurés. Pourquoi ce prix est exceptionnel : il est décerné par les collégiens eux-mêmes, qui ont eu trois mois pour étudier les trois œuvres en compétition et les travailler.
La fin ouverte, une bonne idée ?
Confortablement installés dans de grands fauteuils rouges, ce vendredi 15 novembre 2024 les étudiants se relaient au micro et posent des questions aux auteurs pour éclaircir les quelques mystères qui subsistent encore après la lecture.
Entre le choix du titre, le travail de réécriture ou la passion du métier, les étudiants ont surtout exprimé leurs interrogations sur les intrigues. Notamment le roman de Vinciane Moeschler, Caraïbi Amari (Le Muscadier, 2022), finaliste du prix, qui a laissé les collégiens dans le flou avec une fin ouverte. Elliot, du collège Anatole France, à Angoulême, s’interroge : « Après, le personnage principal reste-t-il en République Dominicaine ou retourne-t-il en France métropolitaine ?»
Une question qui a le mérite d’amuser l’auteur, qui répond avec un grand sourire : « Au départ, j’avais écrit une fin. Puis mon éditeur m’a suggéré l’idée d’une fin ouverte, que j’ai trouvée très belle, car elle permet de tout imaginer. Par exemple, que préféreriez-vous ? »
Un trophée sur mesure
Après cet échange, les collégiens volontaires ont lu quelques passages de leur texte préféré, un peu intimidés par les regards du public et les projecteurs braqués sur leurs visages. ” Je suis un peu stressé…. » pouvait-on entendre dans la salle.
Une dernière surprise a clôturé la cérémonie : la remise d’un trophée spécial, conçu par les élèves du Lycée Emballage du lycée Louis Delage. Une seule candidature a été retenue : celle d’Arthur Laroche, qui a représenté l’Irlande et la littérature sur son trophée. “Je me suis inspiré de la Chaussée des Géants, une réserve naturelle d’Irlande du Nord, car pour moi elle représente l’Irlande. J’ai ajouté un trèfle, avec les mots « Irlande 2024 » “, explique. Et de poursuivre : «J’ai utilisé un logiciel 3D puis je l’ai imprimé sur une imprimante 3D».
Muriel Zürcher, nouvelle lauréate du prix ALÉ
Mais alors à qui sera-t-il distribué ? “J’ai demandé des roulements de tambour, mais ce n’est pas possible…» raconte avec humour Sophie Quetteville, qui modère la rencontre. Et finalement, ce sont les étudiants coop qui ont tapé du pied dans la salle pour ajouter à l’ambiance.
Suspense ensuite, jusqu’à ce que l’animateur annonce «La nouvelle lauréate du Prix ALÉ 2024 est… Muriel Zürcher, pour son romanNe séparons pas les morts d’amour!» L’ouvrage, présenté par Muriel Zürcher, a séduit les lecteurs par ses thèmes forts. Il aborde de manière appropriée les histoires de jeunesse et d’amour dans les quartiers.
Avec Bakari et Erynn, il donne vie à deux adolescents issus de villes rivales qui font l’expérience d’un amour interdit. Leur histoire ne peut s’épanouir que dans l’ombre, à l’abri des regards indiscrets. Pourtant, rien n’échappe à la ville et un conflit éclate entre les deux camps…
“Pour nous, c’est très précieux”
«Vous, lecteurs du prix ALÉ, j’ai un petit mot à vous dire : merci !» s’est exclamé le gagnant. “Pour nous, auteurs, il est très précieux que les gens lisent nos livres et partagent nos histoires ! Bravo, nous sommes en novembre, ça n’a pas dû être facile de lire et de choisir ces livres depuis la rentrée jusqu’à maintenant» conclut-elle, rattrapée par le temps.
Plus loin dans la salle, des étudiants félicitent le gagnant, tandis que d’autres expriment leur déception :“J’ai adoré le roman de Marie Boulic, j’ai voté pour, j’aurais aimé le voir gagner» murmure un étudiant. L’ami se réjouit : «J’ai voté pour Muriel Zürcher, elle était vraiment ma préférée».
Une sélection variée
2 autres romans étaient en lice pour le titre de lauréat du Prix ALÉ 2024Le chant de la forêtde Marie Boulic (Thierry Magnier, 2023). Le journaliste et auteur a ici raconté l’histoire d’un arbre, et pas n’importe lequel. Des côtes d’Afrique du Nord aux prisons italiennes, ce roman écrit en vers libres retrace l’incroyable odyssée d’un arbre à travers ses multiples vies.
Arraché à sa terre d’origine et transformé en bateau de pêche, le bois traverse la Méditerranée en se perdant dans les vagues, écho évocateur des destins brisés des migrants qu’il va sauver. Par la suite, abandonné dans le cimetière nautique de Lampedusa, il a échappé à la décomposition grâce au projet Metamorphosis. Entre les mains d’un prisonnier, il renaît sous forme de violon.
Expatriation forcée
Vinciane Moeschler a, de son côté, défendu son romanCaraïbi Amari(Le Muscadier, 2022) devant le jury. A travers le personnage de Sacha, 15 ans, il retrace le parcours d’un jeune Parisien parti en exil forcé en République Dominicaine.
Mais, derrière le décor idyllique des Caraïbes, l’adolescent va devoir faire face à une réalité bien plus sombre : la misère du peuple Batey. Ces ouvriers haïtiens des plantations de canne à sucre sont les derniers esclaves du 21ème siècle. Aux côtés d’Enrique, son nouvel ami, et de la jeune Patria, maman à tout juste 17 ans, Sacha entame un voyage initiatique qui transformera profondément sa vision du monde.
Retrouvez la liste des prix littéraires français et francophones
Crédits image : ActuaLitté CC-By-SA 2.0
DOSSIER – L’Irlande place ses chaudrons, ses lutins et ses légendes à Cognac
Par Louella Boulland
Contact: [email protected]