Ultrasons focalisés de haute intensité dans le cancer localisé de la prostate : une alternative prometteuse

Ultrasons focalisés de haute intensité dans le cancer localisé de la prostate : une alternative prometteuse
Ultrasons focalisés de haute intensité dans le cancer localisé de la prostate : une alternative prometteuse

Avec la publication en décembre 2024 de l’étude HIFI-01 Dans Urologie européenne[1]les ultrasons focalisés de haute intensité (HIFU) apparaissent comme une alternative validée, notamment à la prostatectomie radicale, dans le traitement du cancer localisé de la prostate, avec l’avantage d’une moindre morbidité urinaire et sexuelle. Le premier auteur de cette publication, Pr Guillaume Ploussard (Service d’urologie UROSUD, Clinique La Croix du Sud, Quint-Fonsegrives, ) est coordinateur du Comité Cancer de la Prostate au sein du Comité de Cancérologie de l’Association Française d’Urologie (CCAFU), promoteur de HIFI-01. Entretien.

La technique HIFU consiste à introduire un émetteur d’ultrasons focalisés par voie rectale, avec une tête appliquée directement sur la prostate. L’opérateur module la profondeur d’action des ultrasons pour détruire les tissus ciblés par rupture cellulaire et nécrose de coagulation.

Avec la publication de l’étude HIFI-01, et l’avis favorable du Haute autorité de santé (HAS, décembre 2023) ouvrant la possibilité d’un remboursement attendu dans les premiers mois de 2025, dans certains cas de cancer localisé de la prostate, les ultrasons focalisés de haute intensité (HIFU) pourraient permettre à de nombreux patients d’éviter un traitement radical, du moins dans un premier temps.

L’étude HIFI, promue par l’Association Française d’Urologiecompare l’utilisation du système Focal One® HIFU, basé sur la navigation robotisée, à la chirurgie, qui reste le traitement de référence.

Pouvez-vous décrire votre étude clinique de phase 3 ? [1]que le professeur Pascal Rischmann, chercheur principal de l’étude, présente « comme la plus grande étude prospective comparative multicentrique jamais menée pour comparer différents traitements du cancer de la prostate »[2] ?

Pr Guillaume Ploussard: Entre 2015 et 2019, cette étude prospective et multicentrique a inclus 3328 patients répartis dans 46 centres : 1967 traités par HIFU et 1361 par prostatectomie totale (PT). L’âge médian était de 74,7 ans pour le groupe HIFU et de 65,1 ans pour le groupe PR (p

L’étude HIFI a atteint son objectif principal, démontrant la non-infériorité de la survie sans traitement de sauvetage après HIFU par rapport au PT à 30 mois : le SSTR n’était pas inférieur dans le groupe HIFU (risque relatif 0,71, IC 95 % : 0,52-0,97 ; p = 0,008), après ajustement sur plusieurs variables (âge, IMC, score ASA, grade, volume prostatique, taux de PSA). Ce résultat est également confirmé dans le sous-groupe à risque intermédiaire (HR = 0,66 [IC à 95 %, 0,50-0,86]p = 0,001).

Les résultats soulignent non seulement la qualité du contrôle oncologique par HIFU, du même ordre que la chirurgie, mais mettent également en avant de meilleurs résultats fonctionnels par rapport à la chirurgie ?

En effet, les résultats fonctionnels ont montré une meilleure préservation des fonctions urinaires et érectiles chez les patients traités par HIFU. En particulier, le score de l’International Continence Society (ICS), qui évalue la continence urinaire stricte (« aucune fuite » versus « au moins une fuite par jour »), était significativement moins dégradé pour les patients traités par HIFU (29 %). ) par rapport à ceux traités par prostatectomie totale (44 %) (RR = 0,66 [IC à 95 %, 0,59-0,74]p [3]ont montré que l’âge représentait un facteur majeur d’altération fonctionnelle, quel que soit le traitement utilisé.

De son côté, l’indice international de la fonction érectile (IIEF-5) a diminué significativement moins après HIFU qu’après PT, avec une différence médiane de -3 (-3,9 ; -2,1) entre les deux groupes. Les avantages du traitement HIFU sur la fonction érectile et la continence urinaire sont donc confirmés, malgré un âge médian de 74,7 ans pour le groupe HIFU contre 65,1 ans pour le groupe PT (p

De plus, aucune différence n’a été observée concernant la qualité de vie (QLCQ-30), ni avant ni après le traitement, ni entre les deux groupes.

On peut lire qu’environ 10 % des patients ont présenté une rétention urinaire après HIFU. Des complications de grade supérieur à IIIa sont survenues dans 54/1967 cas dans le groupe HIFU et 29/1361 cas dans le groupe PR (p = 0,3). Peut-on les attribuer uniquement à la différence d’âge concernant l’inclusion dans les groupes HIFU ou PT ?

C’est notre conviction. Les différences d’âge et de profil de comorbidité au départ expliquent probablement le taux plus élevé d’événements indésirables graves dans le groupe HIFU, collectés non seulement immédiatement après l’opération, mais au cours des 30 mois qu’a duré l’étude. . D’autres raisons pourraient être l’absence d’une procédure post-HIFU standardisée pour le cathétérisme vésical et le manque d’expérience en matière de traitement HIFU pour 38 % des centres au début de l’étude.

Notre vaste étude multicentrique fournit des données comparatives précieuses, bien qu’elles soient limitées par sa conception non randomisée, son biais de sélection du traitement, l’âge des patients au sein des groupes et son suivi à moyen terme. En accord avec la Haute Autorité de Santé et compte tenu de la différence d’âge entre les groupes, il a été décidé de comparer les deux groupes sans randomisation et de fournir une analyse IPTW / Probabilité Inverse de Pondération de Traitement.

Les résultats ajustés au score de propension ou aux covariables sélectionnées étaient similaires aux résultats bruts univariés, confirmant la non-infériorité du HIFU par rapport à la PR. Le rapport 3:2 pour HIFU/PR est méthodologiquement acceptable pour une étude comparative. De plus, les décisions de traitement de sauvetage auraient pu être influencées par l’âge différent entre les groupes, favorisant potentiellement le traitement de sauvetage dans le groupe PR en cas de récidive, en raison d’un âge plus jeune et d’un meilleur profil. santé de ces patients. Néanmoins, la proportion de patients traités par HIFU et ensuite pris en charge par une surveillance active et des HIFU supplémentaires était faible.

-

Ainsi, les données sur la lutte contre le cancer sont solides et permettent de sortir les HIFU de la phase expérimentale : les résultats de lutte contre le cancer sont comparables entre les deux approches, ce qui conforte la sécurité des HIFU. Ils ont l’autre avantage – en tant que thérapie mini-invasive – d’être personnalisables en fonction des sextants concernés et du volume tumoral. Dans le cadre de l’autorisation délivrée par la Haute Autorité de Santé, il était exigé en HIFI-01 de traiter au moins 70 % de la prostate afin de garantir la sécurité des patients. Cependant, l’objectif à terme est de cibler la zone la plus petite possible afin de limiter les effets secondaires (marges de sécurité d’un centimètre). Une seule séance suffit (seulement 5% du deuxième traitement HIFU).

A noter, la surveillance des patients présente un risque accru de développement d’un autre cancer dans une zone prostatique non traitée, avec une probabilité de 20 %. Dans ce cas, une deuxième séance peut être nécessaire.

Avec l’étude HIFI-01, les urologues disposeront dans quelques mois d’une alternative remboursée aux thérapies radicales (prostatectomie radicale, radiothérapie, curiethérapie). Le CCAFU a publié son actualisation mi-2024. Selon vous, quel rôle sera rapidement confié aux HIFU ?

Les données de l’étude HIFI-01 doivent être préalablement analysées par le Comité de Cancérologie, qui décidera de la place à accorder à ce traitement dans l’arsenal thérapeutique. Forts de ces résultats intéressants, les HIFU pourraient être proposés, après discussion avec le patient, d’autant qu’ils seront bientôt remboursés par l’Assurance Maladie, dans la prise en charge des cancers à risque intermédiaire favorable. Environ 2 000 hommes par an en France pourraient être concernés par ce traitement.

Avec la publication de HIFI-01, le traitement HIFU pourrait ainsi être validé comme une alternative curative conservatrice du cancer de la prostate à risque intermédiaire, avec un grade de recommandations qui resterait faible, compte tenu de l’absence de données à long terme. .

Il est important de souligner que la surveillance active constitue le traitement de référence pour les lésions de grade 1 à faible risque. Les traitements radicaux comme la PR et la radiothérapie doivent rester des options secondaires. Ainsi, l’inclusion de patients atteints d’un cancer de la prostate à faible risque dans l’étude HIFI-01 pourrait être interprétée comme un surtraitement. Cependant, le léger changement des recommandations privilégiant clairement la surveillance active des cancers de la prostate à faible risque est récent (lignes directrices françaises et européennes mises à jour en 2022 et 2024), alors que l’étude HIFI -01 a été conçue et lancée en 2014.

S’agit-il plutôt d’éviter un surtraitement aux étapes intermédiaires ?

C’est exact. Dès l’obtention du remboursement, il sera possible de proposer la technique en première intention ou en cas de récidive après radiothérapie externe, suite à une décision concertée entre les professionnels de santé et le patient.

Il peut être proposé aux hommes atteints d’un cancer de la prostate à risque intermédiaire, c’est-à-dire de grade 2, nouvellement diagnostiqué, comme observé dans l’étude HIFI-01. Il n’y a pas d’âge précis pour un cancer de la prostate nouvellement diagnostiqué, qu’il soit à risque faible ou intermédiaire (PSA inférieur à 20 ng/ml et score de Gleason 6 ou 7). Cependant, un âge maximum est pris en compte : si l’espérance de vie d’un patient est inférieure à 10 ans, il n’est pas pertinent de traiter son cancer de la prostate.

La HAS a établi des critères de sélection des patients dans le cadre de l’étude HIFI-01, dont un âge supérieur à 70 ans. Mais ces critères seront probablement réévalués et élargis dans les futures recommandations du CCAFU, avec des tranches d’âge plus larges.

La principale limite de l’étude HIFI-01 reste le suivi à moyen terme, qui empêche toute conclusion définitive sur l’efficacité oncologique à long terme et limite la généralisation des résultats. Pour vraiment clarifier le rôle de cette thérapie ablative dans les cas d’adénocarcinome prostatique localisé, il faudra attendre des résultats à plus long terme. Tous les patients inclus dans l’étude continuent d’être suivis.

Liens d’intérêt des experts : Aucun. L’étude HIFI a été soutenue par la Direction générale de l’organisation des soins, à travers un Paquet Innovation financé par le ministère du Budget, sous le contrôle de la HAS ainsi que de l’ANSM.

Inscrivez-vous pour newsletters de Medscape : sélectionnez vos choix

 
For Latest Updates Follow us on Google News
 

-

PREV La vaccination contre les pneumocoques est « très insuffisante » chez les adultes
NEXT Le KCE appelle à un parcours de soins intégré pour les patients atteints de démence précoce