« Nous avons le droit d’être comme tout le monde »

Pratiquement bénin, mais très spectaculaire, le naevus congénital géant rend la vie d’Alice très compliquée. Face aux regards interrogateurs et aux propos déplacés, quand ils ne sont pas moqueurs, la jeune fille de 12 ans souhaite faire connaître sa différence pour la « vivre un peu mieux ».

Une chance sur 500 000 est la probabilité qu’Alice ait un naevus congénital géant. Cette anomalie cutanée est aussi rare que difficile à vivre pour les jeunes filles. Les regards et les commentaires autour d’elle dans les lieux publics sont lourds à supporter. “J’entends « pourquoi as-tu ça ? », « c’est tellement bizarre »… Je sais ce qu’ils ont en tête et ce ne sont pas de bonnes pensées ou de belles choses.», dit Alice.

Afin d’aider son jeune adolescent, son papa, Thiery, a appuyé sur le bouton orange Alertez-nous. “Être dévisagés de la tête aux pieds parce que nous sommes différents… Nous ne sommes pas un objet, nous avons le droit d’être comme tout le monde et Alice est comme tout le monde», argumente-t-il haut et fort.

Je n’avais pas l’impression d’appartenir

Aujourd’hui, le duo père-fille souhaite sensibiliser le grand public en espérant qu’il y aura «moins de moqueries et que je le vivrai un peu mieux“.”Au début, je ne me sentais pas à ma place et je n’étais pas comme les autres, mais petit à petit, j’en suis arrivé là. Aujourd’hui, j’ai appris à vivre avec. Cela fait partie de moi et je suis fier de l’avoir tous les jours», confie Alice.

Il y a des enfants qui sont blonds, bruns ou roux. Pour Alice, la différence est moins courante, mais il faut vraiment en parler pour que les gens ne s’en aperçoivent plus.», ajoute son père.

Pour en parler, il faut aussi l’expliquer. La dermatologue Dominique Tennstedt décrit le mécanisme à l’origine de cette anomalie. “L’embryon qui se forme est composé de trois couches. La couche externe contient toutes les cellules de la peau et celles du système nerveux. C’est une mauvaise migration et une mauvaise différenciation de ces cellules qui font que les cellules naeviques (les cellules qui nous feront bronzer plus tard) vont dans des endroits aberrants, ne restent pas profondément dans la peau et surtout s’étendent et prolifèrent énormément.

Impressionnant, mais pratiquement inoffensif

Bien que cette anomalie congénitale soit très rare, elle est surtout pratiquement inoffensive. “On estime que moins d’un pour cent [des grains de beauté] risque de dégénérer en mélanome. Le problème est donc essentiellement esthétique», explique Dominique Tennstedt.

Étant congénital, le naevus se développe donc avant la naissance. Les traitements possibles sont encore plus rares. “L’idéal est de pouvoir le retirer très peu de temps après la naissance. A coups de lapsus et de petites greffes, on essaie d’enlever la majorité. Cela peut être fait quand ce n’est pas trop grand. Une fois qu’il est trop grand, il est impossible de les retirer, car on ne pourrait pas fermer les structures

La beauté est unique

Le cas d’Alice est révélateur des normes de beauté de notre société. Les différences étonnent encore aujourd’hui et conduisent parfois à des jugements violents. “Les critères de beauté, en eux-mêmes, n’existent pas, nous les avons inventés. rappelle de son côté Pierre-Joseph Laurent, anthropologue et spécialiste de la perception de la beauté dans différentes cultures. “Ils sont locaux et/ou dépendent de notre personnalité. Nous avons chacun ce qui nous attire, mais nous nous laissons de plus en plus influencer aujourd’hui par une sorte de standardisation qui nous fait souffrir lorsque nous n’entrons pas dans ces catégories figées. Alors qu’en théorie, il n’y a aucune raison pour qu’ils soient corrigés, bien au contraire. La beauté est quelque part une singularité, plus qu’une standardisation.

Toujours pour changer les mentalités, Alice pose régulièrement devant l’objectif de son père. Elle sera prochainement au centre d’une exposition qui aura lieu à Arlon pour continuer à faire connaître son naevus congénital géant.

Naevus congénital géant

 
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