Le retour au premier plan de ce domaine provençal historique

“L’air mélangé arrivant de la vallée de la Durance permet d’absorber les basses températures, jusqu’à – 3 ou – 4 degrés.», explique Guillaume Vidal, au début d’un mois de mai frisquet. Le gérant du domaine viticole Château La Coste parle de cet amphithéâtre ouvert au nord : «Une situation qui favorise l’équilibre, l’acidité naturelle qui se transforme en quelque chose de salé et d’anis.»

“On bénéficie ici de plusieurs expositions et d’altitudes différentes puisqu’il y a 100 mètres de dénivelé entre le point le plus haut du domaine, à 450 mètres d’altitude, et le plus bas. Les vins fruités sont plutôt élaborés au fond, avec une meilleure réserve en eau et une plus grande profondeur de sol. Les terrasses intermédiaires produisent des vins plus structurés. Les parties supérieures sont dédiées aux sélections de tracés.» Le domaine est certifié bio depuis 2008. Et 120 hectares sont désormais certifiés biodynamie (Demeter) pour 2022. «Ici on nourrit la vie du sol qui libère des nutriments pour la vigne. Le sol est plus résistant et l’effet millésime est moins important. La biodynamie entraîne une augmentation de la vigueur des vignes.»

La nature à perte de vue

Il y avait peu de choses ici lorsque Mara McKillen a découvert le site, mais l’essentiel était là : les vignes, les vallées, la nature à perte de vue. Un peu plus haut, les vestiges de l’ancien village du Puy-Sainte-Réparade, endommagé par un tremblement de terre au début du siècle dernier. Impressionnée par la découverte de ces paysages accidentés de vignes et de forêt, elle en parle à son petit frère Patrick qui vient visiter les lieux, tombe également sous le charme et décide de l’acquérir. Patrick « Paddy » McKillen était à la recherche de son ferme, les endroits où il développera son exploitation agricole et il a les moyens de réaliser ses ambitions. Mara et Paddy continueront à cultiver les vignes qui poussent ici depuis l’époque romaine, en prenant soin d’affiner la qualité des vins.

Guillaume Vidal les a rejoints il y a un peu moins de cinq ans. Les vins du Château La Coste dont il a la responsabilité se déclinent avec les grands millésimes ainsi qu’avec les gammes intermédiaires que sont les collections Château et Pentes Douces. Nous dégustons le Rosé d’un nuit 2023, élaboré en partenariat avec des vignerons locaux. “Avec ces vins, nous cherchons à avoir de la matière sans être gastronomique.» Le jus est agréable, avec un nez de pêche et d’abricot, une belle longueur. Le Château Rosé 2023 est plus timide au nez. Mais le côté gourmand attendu avec ce type de jus persiste. La salinité est également préservée.

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Le Grand Vin Rosé 2023 nous emmène dans un autre monde. Voici un Grenache 90%, un vin pâle. Le fruit y est moins présent. La touche d’acidité est apportée par le Cabernet Sauvignon et la Syrah. Il constitue la colonne vertébrale de ce vin, relie les amers et les arômes. Au fil du temps, cette fraîcheur se transforme en salinité. Par curiosité, nous dégustons le Grand Vin Rosé 2022. Par rapport au millésime suivant, la touche anisée est devenue plus forte. Une légère oxydation apporte plus de volume. La légère acidité donne de la longueur. Il s’agit d’un vin plus évolué dans lequel on décèle entre autres quelques notes de tabac.

Passons aux blancs qui représentent 30 % de la production de La Coste. Les Pentes Douces 2023 est un vin enrobé. Sans doute est-ce lié au vermentino, toujours cueilli très mûr dans le bassin méditerranéen. Le Sauvignon apporte de la puissance. Ce vin n’est pas pour autant exubérant. Le Grand Vin Blanc 2022 – chardonnay et vermentino – est à la fois plus brioché et plus élégant.

Vente exclusivement au château

Le Château La Coste produit désormais un vin rouge naturel appelé Ad Fontes, à base de Cinsault, Syrah et Grenache, sans sulfite. “Avec le vin vivant, on peut avoir de bonnes ou de mauvaises surprises», explique Guillaume Vidal. Ad Fontes 2022 libère au nez tous les arômes du monde. En bouche, il révèle une belle structure tannique mais on regrette une texture légèrement trouble, propre à ce type de boisson. L’expérience reste concluante. La Coste n’a produit que 2 000 bouteilles de ce premier Ad Fontes, en vente exclusivement à la boutique du château. Avec ses derniers millésimes, la propriété a prouvé qu’elle était capable de produire de grands vins. Preuve de ce nouvel engagement viticole, un nouveau chai de vieillissement est en construction : «Il permettra de conserver dix millésimes», explique Guillaume Vidal. Cela devient très sérieux.