Par
Margot Nicodème
Publié le
10 oct. 2024 à 12h07
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Elle est un peu comme Gisèle (formerly) Pélicotenfin, cet artiste. Elle s’efface derrière les actions, beaucoup plus significatives et révélatrices de la personnalité des gens. Ceux de Dominique Pélicot, détaillé en public lors du procès pour viol de Mazan, sont sordides, ceux de ce 38 ans, résident lillois, militant, inspirant, émouvant. Son âge est tout ce que l’on sait de l’artiste, qui colore les rues de la ville avec collages féministes depuis trois ans maintenant. Ceux de Gisèle, dans le Vieux Lille et Wazemmesséduit particulièrement les passants. «Je l’ai représentée marchant, avançant et non statique lors de son procès. » Elle fait de ces héroïnes du quotidien ses modèles.
22 portraits de femmes victimes de violences déposés dans tout Lille
« Gisèle a contribué à libérer la voix des femmes de sa générationqui parlent très peu de ce qu’ils ont subi. C’est très bien qu’elle ait décidé d’ouvrir son procès », nous dit l’artiste. On sent qu’il était presque impensable pour elle de passer à côté de cette figure devenue le symbole de la lutte contre les violences sexuelles. C’est aussi le créneau qu’elle a choisi, pour représenter uniquement des femmes, généralement anonymes, qui en ont un jour été victimes. « Je n’aime pas ce mot ‘victimes’. Ce sont des femmes qui ont effectivement subi des agressions, des viols, des violences conjugales… et que j’ai souvent rencontrées par hasard. Ils sont tous un peu militants. »
Désormais au nombre de 22 (dont Gisèle, que l’artiste n’a pas rencontrée), ils se sont tous montrés sous le jour qu’ils voulaient. « Je leur ai demandé de poser de la façon dont ils aimeraient se défendre », résume le Lillois. Elle les a ensuite dessinés en taille réelle, avant de scanner le résultat et de réaliser un collage urbain. Pas n’importe où.
« Toujours autour des lieux de fête ou dans les rues sales. Vous tombez sur un collage, et ça vous fait un bien fou. Ces femmes deviennent un peu comme des amies. » Et, on peut aller plus loin, en voyant aussi un message fort et dissuasif envoyé aux éventuels agresseursdont l’action a souvent lieu pendant la nuit.
“La question de l’injustice est toujours présente”
La trentenaire le sait, sa pratique artistique flirte avec l’illégalité – elle pourrait écoper d’une amende de 35 € pour avoir altéré l’espace public – mais elle est identifiée par les élus de la mairie de Lille. En plus, elle ne se cache jamais. ” je reste pendant la journéeet les services de la ville ne nettoient pas après moi. »
22 portraits, mais 300 collages, au moins, ailleurs que dans la Capitale des Flandres. A Tours, Marseille, Berlin… « Je me renseigne au préalable sur les rues les plus fréquentées pour faire la fête. La question de l’injustice est toujours présentetout comme la dimension politique… à gauche », dit-elle. Et c’est le dernier élément qui nous sera glissé à propos de ce colleur d’ombre, qui s’attache à mettre en lumière de vrais enjeux de société.
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