C’est l’une des conséquences de la guerre en Ukraine et des sanctions prises par l’UE contre Moscou depuis février 2022. La Russie rencontre des obstacles croissants pour acheminer ses marchandises vers la Chine. via son vaste réseau ferroviaire de l’Est, analyse Bloomberg dans un long article publié lundi 23 décembre 2024.
La compagnie ferroviaire nationale JSC Chemins de fer russes a récemment approuvé une réduction de 30 % de son programme d’investissement pour l’année à venir en raison de la hausse des coûts d’emprunt, selon les informations de l’agence de presse Tass, qui cite le ministre des Transports. L’augmentation des cargaisons liées à la guerre exacerbe les goulots d’étranglement existants, tandis que les sanctions affectent les paiements transfrontaliers. Ces facteurs, ainsi que des problèmes logistiques de longue date, ralentissent le transport de marchandises comme le charbon et l’aluminium.
Selon MMI Research, une société de recherche et d’analyse basée en Russie, la situation a atteint son pire niveau depuis la crise de 2008-2009. « Nous pensons que cela est dû aux besoins de l’armée, qui donne la priorité au fret, ainsi qu’aux défis croissants associés au vieillissement du parc ferroviaire. »détaille le groupe sur Telegram.
Le réseau ferroviaire de l’Est sous pression
Les chemins de fer russes, autrefois capables d’emprunter sur les marchés publics pour financer leurs investissements, sont désormais largement coupés de ces différents réseaux en raison des sanctions. Le soutien du gouvernement est limité, le budget ayant été réorienté vers la guerre. Le pays a récemment concentré ses échanges commerciaux vers l’Asie, notamment avec la Chine, et s’est appuyé sur le « Polygone oriental », un réseau ferroviaire reliant Moscou à l’Extrême-Orient.
Ce réseau a longtemps souffert de retards de chargement fréquents et d’infrastructures inefficaces, mais la situation s’aggrave encore. La demande de transport, tant vers la Russie que depuis le pays dirigé par Vladimir Poutine, dépasse de loin la capacité du système, malgré les milliards investis dans les améliorations. « Les contraintes d’infrastructure, malgré l’augmentation de la capacité de transport, persistent sur les lignes Baïkal-Amour et Transsibérien »a communiqué le ministre des Transports, Roman Starovoit, cité par Bloomberg. Le volume de fret des chemins de fer russes a diminué de 5,2 % en l’espace d’un an, selon MMI Research, basé sur des chiffres de novembre 2024.
Investissement réduit, perturbations croissantes
Désormais, l’entreprise envisagerait de réduire son programme d’investissement de 30 % d’ici 2030, le ramenant à 7 900 milliards de roubles (environ 71,5 milliards d’euros), comme l’a rapporté le journal Kommersant le mois dernier. Cette réduction pourrait également concerner l’agrandissement du Polygone Oriental, croit savoir le même média, mais le ministère de l’Economie n’a pas souhaité confirmer officiellement cette information.
Les retards de livraison affectent les exportations de charbon et d’aluminium. Les exploitants de charbon ont signalé des difficultés à expédier leurs produits en raison des goulots d’étranglement ferroviaires. United Co. Rusal, le plus grand producteur d’aluminium en dehors de la Chine, a stocké des centaines de milliers de tonnes de métal dans ses fonderies sibériennes, la capacité ferroviaire limitée empêchant la croissance de ses exportations.
Avant 2022, United Co. Rusal vendait de l’aluminium à la Chine de manière ponctuelle. Mais après les sanctions occidentales, l’entreprise a redirigé une grande partie de ses exportations vers l’Asie, vendant désormais plus d’un million de tonnes par an, soit un tiers de sa production annuelle. Une stratégie visant à renforcer sa position sur un marché clé, tout en cherchant à compenser les pertes générées par les restrictions internationales.