instructions pour la démocratie télévisée en Amérique – .

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NARRATIF – Depuis 60 ans, les dirigeants républicains et démocrates s’affrontent à la télévision lors de débats souvent mémorables. Le Figaro a tiré sept leçons de l’histoire de ces duels médiatiques outre-Atlantique.

29 septembre 2020. “Tu vas te taire, mec.” ? rétorque le démocrate Joe Biden à son adversaire Donald Trump. Le républicain ne cesse de lui couper la parole. Quatre ans plus tard, il faut recommencer. Les places ont été inversées et Biden est désormais le président sortant. L’un des protagonistes va-t-il vaincre l’autre ? Le souvenir vacillant du locataire de la Maison-Blanche, qui tient régulièrement des propos confus, inquiète le camp démocrate. A peine plus jeune, le milliardaire est imprévisible et, au fond, ne brille pas par sa connaissance des dossiers…

Dans la nuit de jeudi à vendredi, les deux ténors s’affronteront sur CNN pour un débat dont il est difficile de prédire l’issue. En 2020, le journaliste Chris Wallace (Fox News) a eu le plus grand mal à contenir les deux hommes. Le débat sera donc modéré ce soir par deux modérateurs (Jake Tapper et Dana Bash). Cette grand-messe médiatique est devenue un rituel de la vie politique américaine depuis l’apparition de la télévision dans les foyers américains. Si l’heure est à la clarification, il est avant tout temps de faire bouger la nation. Quelques bons mots suffisent parfois à faire basculer l’opinion en sa faveur. Quelques secondes peuvent aussi vous faire trébucher, parfois de manière irréparable. A l’approche de cette nouvelle confrontation, Le Figaro vous donne les consignes et la liste des erreurs à ne jamais commettre. L’occasion de retracer brièvement l’histoire de cette démocratie télévisée en Amérique.

Concentrez-vous toujours sur la caméra (Kennedy-Nixon)

Le sénateur John F. Kennedy et le vice-président Richard Nixon avant le premier débat de l’élection présidentielle américaine de 1960, à Chicago, Illinois, États-Unis, le 26 septembre 1960.
FONDATION DE LA BIBLIOTHÈQUE JOHN F. KENNEDY / REUTERS

Le 26 septembre 1960, le premier débat du genre est lancé noir sur blanc. Ce fut le début d’une longue série de disputes télévisées entre républicains et démocrates. Richard Nixon, qui avait déjà accompli deux mandats de vice-président, était le grand favori républicain de la campagne. Plus d’un tiers des Américains étaient scotchés à leur téléviseur (66 millions de téléspectateurs). Mais alors que le sénateur John F. Kennedy était détendu et frais, son adversaire semblait pâle et en sueur. Et pour cause, il a commis l’erreur de refuser le maquillage.

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Pire, il s’adresse sans cesse aux modérateurs au lieu de fixer les téléspectateurs. Le sénateur du Massachusetts, lui, regarde systématiquement la caméra et donc l’électeur. Il inverse ensuite la tendance en suivant scrupuleusement les conseils du cinéaste Franklin Schaffner. Ce dernier, une fois Kennedy élu, a réalisé un documentaire sur la Maison Blanche, écrit par l’épouse du président (Une visite de la Maison Blanche).

Relisez attentivement vos dossiers (Ford-Carter)

Le président Gerald Ford et le gouverneur Jimmy Carter à la télévision lors du premier débat présidentiel de l’élection présidentielle américaine de 1976 à Philadelphie, en Pennsylvanie.
Document à distribuer. / REUTERS

Lors des élections présidentielles suivantes (1964, 1968, 1972) aucun débat entre les deux partis n’est organisé. L’échec de Nixon et la mort de Kennedy pèsent sur les campagnes. En 1976, le président républicain sortant Gerard Ford et le démocrate Jimmy Carter acceptent de revenir sur la scène du Walnut Street Theater de Philadelphie. Trois débats sont organisés sur plusieurs thèmes : questions intérieures, politique étrangère et divers sujets de politique générale.

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La première rencontre a été marquée par des problèmes techniques et de longues interruptions sonores en pleine diffusion en direct. Mais le 6 octobre 1976, lors du deuxième débat, Ford commet une erreur irréparable. En pleine guerre froide, il assure que« Il n’y a pas de domination soviétique en Europe de l’Est et il n’y en aura jamais sous une administration Ford »tandis que l’URSS disposait de troupes déployées dans plusieurs pays. Ce n’est que six jours plus tard qu’il reconnut que des divisions soviétiques étaient établies en Pologne. À l’issue du débat, malgré une légère avance dans les sondages, Ford a perdu l’élection.

Les vertus de l’expérience (Reagan-Mondale)

Le président américain Ronald Reagan et le candidat démocrate à la présidentielle Walter Mondale lors du premier débat de l’élection présidentielle américaine de 1984 à Louisville, Kentucky, États-Unis, le 7 octobre 1984.
RONALD REAGAN PRÉSIDENTIEL LIBRA / REUTERS

Le 21 octobre 1984, le démocrate Walter Mondale affronte le président républicain sortant Ronald Reagan. De plus de quinze ans son cadet, Mondale (53 ans) a été déclaré vainqueur face à Reagan, qui était, à l’époque, le plus vieux président des Etats-Unis encore en fonction (73 ans). Mais capitalisant sur son expérience d’acteur et sa capacité à s’attirer la sympathie des foules, Reagan a fait de son handicap un atout majeur.

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« Je ne vais pas faire de l’âge un enjeu de campagne. Je n’exploiterai pas, à des fins politiques, la jeunesse et l’inexpérience de mon adversaire », a-t-il ajouté. dit-il alors à Mondale. Le démocrate l’admet, dans une interview accordée à PBS six ans plus tard, qu’il avait “J’ai tout de suite compris que sa réponse allait faire mal.”

Prendre soin de la concurrence (Bush-Clinton-Perot)

Le candidat démocrate à la présidence, le gouverneur Bill Clinton, le candidat indépendant Ross Perot et le président George Bush à la fin de leur débat présidentiel à East Lansing, Michigan, États-Unis, le 19 octobre 1992.
Mark Cardwell / REUTERS

S’appuyant sur l’enseignement de Reagan, Bill Clinton (bien avant Trump…) a repris son slogan : « Rendre sa grandeur à l’Amérique ! » en 1992, lorsqu’il annonce sa candidature. Si Clinton se distingue par sa promesse de réforme de l’État-providence et un certain pacifisme, il doit aussi remercier ses concurrents pour sa victoire. Le deuxième débat s’est déroulé à trois puisqu’un candidat indépendant s’est présenté cette année-là. Clinton fait donc face au président républicain sortant George Bush (père) et au populiste Ross Perrot.

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Lors de ce débat, Bush laissera l’image d’un président qui n’a rien à voir avec la nation. Il ne cesse de regarder sa montre pendant une question du public. Quelques années plus tard, il avouait qu’il détestait l’exercice du débat : “C’est peut-être pour ça que je la regardais (ma montre) en pensant : encore dix minutes de ces conneries”. C’est d’ailleurs grâce à Perrot, qui a obtenu 19% des voix, que le républicain George Bush n’atteindra pas la majorité dans un certain nombre d’États déterminés à remporter la campagne. Bill Clinton s’impose grâce à la concurrence.

Utiliser l’humour (Obama-Romney)

Le candidat républicain Mitt Romney et le président américain Barack Obama lors du dernier débat présidentiel américain à Boca Raton, en Floride, le 22 octobre 2012.
Jason Reed / REUTERS

Après les années 2000, le débat présidentiel n’est plus seulement un événement télévisé relayé par la presse, mais trouve également un écho sur internet et les réseaux sociaux. Certaines formules sont reprises et deviennent réelles punchlines qui sont diffusés en ligne.

C’est ce qu’a fait Barack Obama lors du dernier débat, en octobre 2012, lorsqu’il s’est moqué de son adversaire Mitt Romney. Le républicain a regretté que la marine américaine dispose de moins de navires que pendant la Première Guerre mondiale. « Eh bien, monsieur le gouverneurObama avait répondu : Nous avons aussi moins de chevaux et de baïonnettes, car la nature de notre armée a changé. Nous avons ce qu’on appelle des porte-avions, sur lesquels les avions atterrissent. Nous avons ces navires qui vont sous l’eau, les sous-marins nucléaires.Ce bon mot a inondé les réseaux sociaux jusqu’à sa réélection.

Tous les coups sont autorisés (Trump-Clinton)

Le candidat républicain à la présidentielle Donald Trump écoute avec scepticisme la candidate démocrate à la présidentielle Hillary Clinton répond à une question à St. Louis, Missouri, États-Unis, le 9 octobre 2016. REUTERS/Rick Wilking/File Photo
Rick Wilking / REUTERS

Si les débats télévisés sont restés assez cordiaux et démocratiques entre les candidats jusqu’en 2012, une ligne a été franchie en 2016. L’arrivée de Donald Trump sur la scène politique a rendu les échanges d’une violence sans précédent. Au chute remplace le choc ! Il devient alors plus difficile pour les journalistes de modérer les candidats. Le deuxième débat de l’élection présidentielle de 2016, qui opposait Donald Trump à Hillary Clinton, en est un exemple.

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Après la divulgation d’une vidéo où il se vante d’avoir attrapé des femmes “par la chatte”les républicains contre-attaquent sur le front de la vie privée. Il évoque l’ancien président et mari de sa rivale, Bill Clinton, qu’il accuse d’avoir « femmes maltraitées ». Il promet de nommer un procureur spécial pour enquêter sur la candidate démocrate, concernant ses courriels privés lorsqu’elle était chef de la diplomatie américaine. « C’est vraiment bien que quelqu’un avec le tempérament de Donald Trump ne soit pas en charge des lois de notre pays. »elle dit. « Tu serais en prison »rétorque le milliardaire républicain.

Y a-t-il encore des règles ? (Trump-Biden)

Joe Biden et Donald Trump lors du deuxième et dernier débat présidentiel au Curb Event Center de l’Université Belmont à Nashville, Tennessee, États-Unis, le 22 octobre 2020.
Piscine / REUTERS

Après les coups bas, les insultes se sont vite généralisées. Lors des débats de 2020, Joe Biden a qualifié son adversaire de “clown” et de « Le caniche de Poutine ». Il affirme que « Le monde sait que c’est un menteur. » « Il n’a aucun plan ! Il n’a aucun plan ! » “Le démocrate ne cesse de répéter. Il ne s’agit plus de convaincre mais de marteler l’information pour qu’elle conditionne la décision. Le populiste Donald Trump, lui, ne cesse de crier sans cesse pour interrompre son rival et lui couper la parole. « 47 ans de politique et vous n’avez rien fait » il fustige, « Vous êtes le pire président ! »

Si les deux hommes ne s’écoutent plus, les téléspectateurs n’entendent rien non plus. Ils se détestent mais ne font plus l’effort de le cacher. La politesse, même les règles de la rhétorique, sont abolies. Malgré les progrès de la technologie, le spectateur se voit proposer un discours saccadé et inaudible. Le chaos qui en résulte est effectivement de nature politique. Alors quand la nuit tombe, les deux bêtes du “démocratie” L’Américain entrera de nouveau dans l’arène… Avec l’âge aidant, sera-ce différent cette fois-ci ?

 
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