mettez de l’or dans votre portefeuille

Depuis 2019, l’or bat chaque année de nouveaux records historiques. Sur les cinq premiers mois de l’année, il a encore gagné 13 %, franchissant allègrement la barre des 2 400 $ l’once certains jours. Un renversement de tendance par rapport à la décennie précédente.

Entre fin 2011 et fin 2015, le métal jaune a subi une forte baisse (de l’ordre de 40 %) avant de stagner pendant plus de trois ans. Dans la terminologie des ventes de musique enregistrée, un disque de platine vaut trois disques d’or : une hiérarchie désormais obsolète puisque le métal jaune coûte désormais deux fois plus cher que son acolyte blanc.

À première vue, la récente hausse de l’or est déroutante. Le métal précieux ne versant aucun dividende, il est peu attractif lorsque les actifs de taux d’intérêt, peu risqués, suffisent à protéger contre l’inflation.

A l’inverse, lorsque les taux réels sont négatifs, ce handicap disparaît. « Historiquement, le prix de l’or est inversement corrélé à l’évolution des taux réels américains, cette relation fonctionnant très bien depuis au moins 2006. Ce lien entre l’évolution des taux réels et celle de l’or est rompu depuis le début de l’année 2022. souligne Nadège Dufossé, responsable de la gestion multi-actifs de Candriam dans une note récente.

En effet, la forte hausse des taux réels observée en 2023 aurait logiquement dû faire souffler un puissant vent contraire sur l’or, qui a pourtant gagné environ 20% sur l’année écoulée ! Et ce n’est pas la demande du secteur financier, via les ETF (trackers) et produits assimilés investis en or, qui a alimenté cette hausse.

Au contraire, le Conseil mondial de l’or, émanant de grands groupes aurifères, constate des flux négatifs chaque trimestre sur ce segment depuis le deuxième trimestre 2022. Sur le seul premier trimestre 2024, les investisseurs ont ainsi « restitué » 113,7 tonnes d’or, ce qui n’est pas rien à l’échelle d’un demande mondiale de 1 238 tonnes.

Les pays émergents en force

Si l’or a si bien navigué dans ce qui aurait pu être une tempête, c’est parce que la structure de la demande a changé. La typologie des acheteurs qui font bouger aujourd’hui le marché de l’or est en partie liée au contexte géopolitique mondial.

Après l’attaque russe contre l’Ukraine, les États-Unis ont procédé à des saisies d’actifs : de quoi inciter les investisseurs de certains pays émergents à préférer l’or aux autres actifs.

En Chine, plusieurs phénomènes font qu’une partie de l’épargne se dirige vers l’or. La crise immobilière continue de faire rage, ce qui rebute les investisseurs. Signe des difficultés du pays à relancer ce secteur clé de son économie, deux mégapoles, dont Hangzhou, siège de nombreuses entreprises de haute technologie, viennent de lever certaines restrictions d’achat. L’interventionnisme de l’État, qui a fait tomber des secteurs entiers comme l’enseignement privé, limite l’attrait des valeurs chinoises.

Malgré une baisse d’environ 50% par rapport au pic de 2021 et une valorisation assez modeste (10 fois les résultats de l’exercice à venir), l’indice MSCI Chine peine à rebondir et est à la traîne des autres marchés émergents depuis 2021.

L’or attire dans cet environnement d’effervescence. L’analyse des flux sur les ETF investis dans l’or montre que les Asiatiques achètent des actions depuis le troisième trimestre 2023, tandis que les investisseurs américains et européens vendent généralement.

Mais le rebond de l’or est avant tout le résultat de l’activité de puissantes institutions monétaires. « La demande d’or des banques centrales est le principal facteur de cette augmentation », estime Nadège Dufossé. Elle a doublé depuis 2022, passant de 11 % de la demande totale d’or en 2021 à 23 % en 2023. Cette tendance se confirme au premier trimestre de cette année.

Une alternative au billet vert

La banque centrale chinoise est en première ligne. En mars, elle a acheté de l’or pour le 17e mois consécutif. Les craintes de ces acteurs face au niveau d’endettement des économies développées et leur volonté de construire un système financier moins dépendant du dollar expliquent ces achats, l’or étant une réserve sans être la dette de qui que ce soit.

Dans la dernière enquête réalisée par le World Gold Council auprès des banques centrales, seulement 3% d’entre elles souhaitent réduire leur position, tandis que 24% souhaitent l’augmenter.

3 000 dollars l’once en 2025 ?

L’intérêt de voir de tels acteurs sur le marché est que leur objectif est plus stratégique que financier : ils sont moins sensibles aux prix que les particuliers et devraient poursuivre leurs achats.

Et si les banques centrales des pays développés initient la baisse attendue des taux, cela fournira un carburant supplémentaire à l’or, celui des taux bas qui le poussent habituellement à la hausse. Chez Citigroup ou Bank of America, on prédit que l’or pourrait atteindre 3 000 dollars l’once en 2025.

 
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