(Seneplus) – Dans un document exclusif obtenu par Jeune Afrique, le président sortant de la Commission de l’Union africaine (UA), Moussa Faki Mahamat, donne une évaluation sans compromis de l’organisation panafricaine. Cette missive de trois pages, datée du 30 septembre et intitulée «Questions urgentes à résoudre», met en évidence les principaux défis auxquels est confrontée l’institution à la veille de son vingtième anniversaire.
L’observation est particulièrement sévère en ce qui concerne le Conseil de la paix et de la sécurité (PSC), un pilier censé garantir la stabilité du continent. Comme le souligne Faki Mahamat dans sa lettre, «le CPS a vu ses décisions et ses communiqués de presse se suivent sans effets significatifs sur la réalité politique et sur le terrain». Encore plus grave, il dénonce ouvertement que «les textes de base de l’organisation ont été violés», remet en question l’efficacité du système actuel face à des changements inconstitutionnels.
Un autre point critique abordé dans ce document est la dépendance financière de l’UA. Le président de la Commission décrit cette situation comme «insoutenable», expliquant qu’elle limite considérablement la salle de manœuvre de l’organisation, «restreignant tout désir, aussi incutible, de la part de l’UA».
La zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAF) n’a pas non plus échappé aux critiques. Faki Mahamat est particulièrement préoccupé par «la conception de partenariats stratégiques menés sans aucun rôle significatif pour l’UA, marginalisé face à la bilatéralisation des intérêts en jeu». Il souligne également «les lacunes évidentes des chaînes de solidarité africaines» face aux menaces terroristes et aux catastrophes naturelles.
-Selon Jeune Afrique, cette initiative du président sortant n’a pas généré la réponse attendue au sein de l’institution. Un diplomate stationné à Addis-Abeba, cité par le magazine, va jusqu’à décrire ce document comme «une pierre jetée dans l’étang des chefs d’État et de gouvernement» et surtout y voit «l’admission de l’impuissance et de la faiblesse de son présidence.
Alors que l’UA vient de rejoindre le G20 en 2024 et que Moussa Faki Mahamat se prépare à quitter ses fonction le moment. Les réunions proposées ont été systématiquement reportées, illustrant paradoxalement l’inaction dénoncée dans sa missive.
Dans ce contexte tendu, certains au sein de l’institution semblent pressés de «tourner la page Faki», selon une expression circulant dans les couloirs de l’UA, rapporte Jeune Afrique. Le président sortant conclut néanmoins sa lettre sur une note diplomatique, en remerciant les dirigeants africains pour «leur confiance et leur soutien» et souhaitant le «succès total» à son successeur.