“Un nouvel épisode de la saga”LVMH reprendre la ville » ? C’est en ces termes qu’Emile Meunier avait interrogé le Conseil de Paris en février dernier, sur la structure métallique qui recouvre la façade d’un immeuble en construction – lui donnant des allures de malle Louis Vuitton – appartenant au géant du luxe de la plus célèbre avenue. dans le monde. Pour l’élu écologiste, il ne s’agit pas de « signe temporaire » comme le soutient la mairie, mais d’un point de vue « publicité déguisée ».
Avec ses collègues Jérôme Gleizes et Laurent Sorel, ils ont adressé mi-décembre un appel gratuit à la maire socialiste Anne Hidalgo, aux côtés des associations SOS Paris et Résistance aux agressions publicitaires. Dans ce texte rédigé par leur avocat, Me Valentin Güner, ils préviennent qu’en l’absence de réponse de la commune, ils saisiraient le juge administratif. Joint ce mercredi 25 décembre, à quelques jours du feu d’artifice de l’Arc de Triomphe qui devrait voir affluer plus d’un million de personnes, Emile Meunier, qui préside la commission de l’urbanisme du Conseil de Paris, a confirmé son intention de « saisir le tribunal administratif pour abus de pouvoir ».
Classé monument historique, le grand bâtiment abritera un nouveau magasin phare du groupe de luxe ainsi qu’un hôtel, un spa, un restaurant et des galeries d’art. Selon les requérants, LVMH a déposé une demande auprès de la ville en juin 2023 « signe temporaire » de mettre une bâche dessus pendant que les travaux sont effectués. Sauf que, selon les déclarations faites à la presse par la mairie de Paris elle-même, la fausse façade est censée subsister jusqu’en 2027, date de la fin des travaux.
«Jeu du calmar»
Non seulement ce n’est pas temporaire, mais c’est aussi de la publicité déguisée : « Le choix des teintes claires et des matériaux (miroir) ainsi que la mise en place d’une signature lumineuse le soir visent très clairement […] attirer l’attention des passants et des automobilistes de l’avenue des Champs-Elysées, non pas sur le projet de rénovation, mais exclusivement sur la marque Louis Vuitton en représentant son objet le plus emblématique, » dit l’appel. Du côté de la mairie, on fait valoir que cette bâche n’est pas considérée comme publicitaire puisque le bâtiment appartient à LVMH. Et l’on rappelle que les architectes des bâtiments de France ont donné leur accord pour sa réalisation.
L’emprise de la multinationale sur le capital, où elle possède déjà plus de 350 000 m², ajoutée à diverses opérations de privatisation de l’espace public, est un sujet de friction majeur entre la majorité socialiste et les élus écologistes. Fondation Louis Vuitton empiétant sur le Bois de Boulogne, installation d’une statue géante de l’artiste japonais Yayoi Kusama accessoirisée de sacs Vuitton sur le parvis au pied de la Samaritaine, dossier de l’Ecole Polytechnique, privatisation du Pont-Neuf pour accueillir le premier défilé Pharrell Williams, le tout culminant lors des Jeux Olympiques où la malle Vuitton a crevé l’écran de la cérémonie d’ouverture retransmise à la télévision… Normal, puisque LVMH était l’un des sponsors officiels du défilé parisien. Jeux olympiques ? Néanmoins : le 1er décembre, après Emilie à Paris, Netflix a une nouvelle fois privatisé les Champs-Elysées pour la promotion de la série Jeu de calmar, une opération menée conjointement avec le comité des Champs-Elysées, qui regroupe tous les commerces de l’avenue, et dont le président n’est autre que Marc-Antoine Jamet, le secrétaire général du groupe LVMH. Les élus écologistes ont également écrit à Anne Hidalgo pour savoir combien cette opération promotionnelle avait apporté à la ville.
« Transaction financière intéressante »
« Là, on dit ok pour une malle, mais demain, pourquoi le magasin Nike ne ferait-il pas une chaussure géante alors qu’il veut rénover sa vitrine ? Pourquoi Free ne ferait-il pas une loge géante sur les Champs-Elysées ? Là, ça choquerait, mais quand c’est LVMH, ça va. avait souligné Emile Meunier lors du Conseil de Paris, rappelant que les réglementations locales en matière de publicité « interdit de monter une banderole publicitaire, sauf exceptions », et que « celle-ci doit représenter 50 % de la surface » et pas un bâtiment entier. “Il n’y a pas de Conseil de Paris sans que nous ayons un échange sur LVMH”, croire « que vous avez un ressentiment particulier envers cette marque, je ne sais pas si c’est une déception client », répondit Emmanuel Grégoire, alors premier adjoint chargé de l’urbanisme. Avant de défendre l’interprétation des services d’urbanisme dans le sens de « enseigne immobilière temporaire » destiné à masquer, « pour une durée supérieure à trois mois, des travaux publics ». L’absence, dans le code de l’urbanisme, d’un délai maximum explique-t-elle la divergence d’interprétation ?
Pourtant, sur ce dossier, la ville a reçu le soutien de la maire du 8e arrondissement, Jeanne d’Hauteserre. Lors de ce même conseil municipal, l’élu de droite avait vanté un « opération financière intéressante pour le budget de la ville, puisque la taxation de la publicité extérieure devrait rapporter 1,7 million d’euros ». Mais pour Jérôme Gleizes, l’argument financier n’est pas suffisant, surtout compte tenu des bénéfices commerciaux que LVMH tire de ce géant publicitaire. « Les socialistes jouent un double jeu : il y a la façade et la réalité. » dénonce l’élu écologiste à Libé. Emile Meunier ne dit pas autre chose : “La publicité et la marchandisation de l’espace public restent un gros point de division chez nos amis socialistes, ce sera l’un des sujets de la campagne 2026.”