Moins de trois mois plus tard dans la candidature, le gouvernement Barnier vit sans doute déjà ses dernières heures. Deux motions de censure ont été déposées, par la gauche et l’extrême droite, après le recours à l’article 49.3 de la Constitution de transmettre le projet de budget de la Sécurité sociale à l’Assemblée nationale. Les députés vont débat puis vote sur ces motions de censure à partir de 16 heures ce mercredi.
Un gouvernement cantonné aux affaires courantes
Si le gouvernement de Michel Barnier tombe, le Premier ministre sera considéré résigné. Son gouvernement sera alors responsable de gérer uniquement les affaires quotidiennesen attendant que son successeur soit désigné par Emmanuel Macron. Ce scénario ne s’est produit que une fois sous la Ve République, en 1962 avec le gouvernement de Georges Pompidou.
Aucune dissolution possible
En 1962, le général de Gaulle, président de la République, décide de dissoudre l’Assemblée nationale après la chute du gouvernement Pompidou. Des élections législatives ont alors eu lieu, qui ont permis d’obtenir un nouvel équilibre des pouvoirs à l’Assemblée : les gaullistes avaient remporté les élections législatives, permettant à Georges Pompidou d’être confirmé à son poste.
Emmanuel Macron ne pourra pas opter pour cette stratégie car il doit y avoir un délai d’au moins un an entre deux dissolutions. Ou, le chef de l’Etat a dissous l’Assemblée il y a moins de six mois. Il devra donc nommer un nouveau Premier ministre, chargé de former un gouvernement, sans majorité à l’Assemblée puisque celle-ci est actuellement divisée en trois groupes : gauche, centre-droit et extrême droite. Le futur gouvernement sera donc sous la menace permanente d’un renversement.
- Motion de censure : retour en octobre 1962, lorsque le gouvernement Pompidou est renversé (Franceinfo JT 23h, 3 décembre 2024)
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Le retour du puzzle pour désigner un nouveau Premier ministre
Dans ce contexte, plusieurs options offert au président. Renommer Michel Barnier ? Une autre personnalité à la tête de la même équipe fragile entre le centre et la droite ? Ou se tourner vers l’ancien Premier ministre socialiste Bernard Cazeneuve, qu’il a hésité à nommer en septembre ? Nom Jordan Bardella? Le président du Rassemblement national avait lui-même déclaré lors des élections législatives de juin qu’il souhaitait gouverner uniquement à la majorité. Interrogé sur BFMTV Lundi, le député RN Julien Odoul l’a confirmé : gouverner “avec une majorité RN, oui” plus “donc pas maintenant.”
Emmanuel Macron peut également nommer un gouvernement technique ou obtenez un accord de non-censure entre plusieurs formations. Cette dernière option est privilégiée par les socialistes, qui envisagent de négocier un accord de non-censure avec le bloc central de l’Assemblée afin que la gauche puisse gouverner. « Je vous rappelle que nous n’avons pas gagné les élections, il nous faut 290 députés pour gagner les élections, il nous en manque 100, donc par définition, les accords que nous allons conclure ne sont pas des accords qui reprendront 100% de notre vision. de l’économie, de la société ou des services publics. Mais il faut sauver les meubles.», a expliqué le député PS Philippe Brun sur franceinfo. Les socialistes ont demandé lundi soir la désignation »d’un Premier ministre partageant les valeurs de gauche sur les projets prioritaires du Nouveau Front Populaire« .
Inacceptable pour les rebelles, qui poussent à la nomination d’un Premier ministre issu du Nouveau Front populaire. Gouvernement technique, accord de non-censure, “si on commence à proposer des options, des solutions différentes (…) on voit bien qu’on facilite la tâche de M. Macron en ne nommant pas un gouvernement de gauche”a insisté le député de La France insoumise Éric Coquerel, appelant les socialistes à s’unir. La cheffe du groupe LFI à l’Assemblée Mathilde Panot a prévenu que“un accord de non-censure“, ce qui serait “en fait, une forme d’alliance gouvernementale avec les macronistes», était impensable.
Appel à la démission d’Emmanuel Macron
Certains, notamment parmi les Insoumis, vont jusqu’à demander la démission d’Emmanuel Macron. “Pour qu’on puisse revenir au peuple, à son vote, à sa décision, le président doit démissionner”a par exemple lancé Jean-Luc Mélenchon sur ses réseaux sociaux lundi soir.
De son côté, si elle jure de ne pas exiger officiellement le départ d’Emmanuel Macron, Marine Le Pen le précise : «En cas de crise politique grave, le Président de la République a trois possibilités : le remaniement, la dissolution et la démission. En prenant soin de rappeler que les deux premiers ont déjà été purgés.
« Cela devient très compliqué.», a déclaré à l’AFP le politologue Bruno Cautres. “Du point de vue de la légitimité démocratique, il [Emmanuel Macron] n’a plus la moindre marge de manœuvre pour commettre à nouveau des erreurs: s’il nomme un Premier ministre lui aussi censuré, ou s’il se dissout l’été prochain et perd à nouveau les élections, je ne vois pas comment il pourra se maintenir.»