Journaliste dans le domaine de la santé et des affaires sociales, Hélène Delmotte a publié en 2019 le livre «Rencontres de personnes rares : leur vie face à la maladie de Charcot-Marie-Tooth» (Les Influences Éditions). Un ouvrage collectif dans lequel elle fait témoigner des personnes touchées par cette maladie génétique rare.
Fonds Handicap & Société : De quoi parle spécifiquement votre livre, Madame Delmotte ?
Hélène Delmotte : Mon livre aborde la vie avec la maladie, l’absence de traitement et l’importance pour les patients de se sentir mieux considérés. Les témoignages recueillis appellent également à l’avènement d’une société plus inclusive. On n’a pas encore suffisamment conscience de ce que représente un handicap invisible, et la maladie de Charcot-Marie-Tooth en fait peut-être partie. L’ouvrage présente plusieurs témoignages de personnes touchées, ainsi que ceux d’une dizaine de personnalités, comme Bernard de La Villardière et Aurélien Rousseau.
Qu’est-ce que la maladie de Charcot-Marie-Tooth exactement ? Quelles en sont les manifestations concrètes ?
La maladie de Charcot-Marie-Tooth (CMT) est la maladie neuromusculaire héréditaire la plus courante. 1 personne sur 2 500, soit environ 30 000 personnes en France, en est concernée, quel que soit son sexe ou son âge.
Il s’agit d’une maladie génétique évolutive qui touche les nerfs périphériques, provoquant principalement une amyotrophie des mollets, des avant-bras et des mains.
Bien que la CMT n’affecte pas l’espérance de vie, le niveau d’invalidité varie considérablement et peut aller d’une légère difficulté à marcher jusqu’à la nécessité d’utiliser une canne ou un fauteuil roulant.
Un témoignage vous a-t-il particulièrement touché ?
Oui, celle du petit Léo qui fait face à des difficultés bien concrètes, en termes de mobilité ou de scolarité. Il y a aussi celui d’une jeune femme, qui a témoigné anonymement car elle n’ose pas parler de sa maladie à son employeur de peur d’être dévalorisée ou perçue négativement. La CMT provoque également une grande fatigue, qui n’est pas toujours comprise par l’entourage. Ce sont des situations très complexes à vivre, car la honte empêche souvent les personnes concernées de parler de leur situation, par peur d’un déclassement économique et social.
Selon vous, la maladie de Charcot-Marie-Tooth est-elle bien prise en charge par le système de santé français ?
Non, car elle reste insuffisamment diagnostiquée. Pour prendre mon exemple, je tombais sans cesse mais personne ne cherchait à savoir pourquoi. Quand j’étais plâtré, je ne pouvais pas utiliser de béquilles mais personne ne m’a posé de questions sur le manque de force de mes bras… Hormis la physiothérapie et les chaussures orthopédiques, il n’existe aucun traitement pour cette maladie.
Ce qui est également intéressant, c’est que nous encourageons désormais les personnes concernées à pratiquer une activité physique, même si cela a longtemps été déconseillé. Il faut à tout prix encourager la recherche pour mieux comprendre la maladie.
Selon vous, quel rôle le secteur ESS peut-il jouer ?
A l’instar de la FHS, qui aide de nombreuses associations à développer de très bons projets, les mutuelles pourraient renforcer leur action pour réduire le reste à la charge des patients, en matière de podologie et de pédicure par exemple. Ils pourraient également élargir leur communication pour sensibiliser au handicap, et faire en sorte qu’il soit perçu comme une force permettant le développement d’autres capacités. Le secteur ESS a un rôle crucial à jouer dans la promotion de ces compétences.
Pourquoi ce livre ?
Je suis directement touchée par la maladie et, en tant que journaliste spécialisée dans les secteurs de la santé et de l’action sociale, j’ai ressenti le besoin d’apporter ma contribution. De nombreuses personnes touchées par cette maladie se retrouvent isolées. Il est parfois difficile de parler de son handicap alors que le partage d’informations et le soutien – je pense à tout ce que l’association CMT-France peut apporter – sont essentiels.