Renato Steffen est venu à Lugano pour remporter des titres. Désigné joueur le plus décisif de la saison en Super League, l’international suisse de 32 ans aura l’occasion dimanche de soulever la Coupe de Suisse (sur RTS2 à partir de 13h30). Pour ce faire, les Bianconeri devront prendre la mesure du Servette, une équipe que « Reni » qualifie de « très désagréable à jouer ». Si les statistiques en termes de duels parlent en faveur du Servette, l’expérience récente en Coupe penche plutôt du côté de Lugano, qui pourra compter sur plus de 12 000 supporters dimanche au Wankdorf.
Mercredi 11h00 à Cornaredo : Mattia Croci-Torti, casquette noire toujours vissée sur la tête, donne de la voix. Ses phrases, la plupart en italien, parfois en allemand ou même en anglais, sont courtes et résonnent dans un stade Cornaredo en construction : “plus vite plus vite; on récupère le ballon ; nous n’abandonnons pas ; on reste concentré jusqu’au bout…« . Ses joueurs se mettent au diapason, l’intensité est totale lors des mini matchs joués sur la moitié du terrain.
« Le coach aime crier quand il y a des caméras. J’espère que, comme moi, il se calmera un peu au fil des années”», plaisante Renato Steffen, souriant, détendu et disponible, lorsque nous nous retrouvons en tribune après l’entraînement. « En même temps, s’il continue à réussir, il peut rester tel qu’il est. Le coach a les idées très claires. Il est une pièce importante du puzzle de notre équipe ».
Depuis qu’il est à la tête de Lugano, celui que l’on surnomme « Crus » mène ses Bianconeri toujours plus haut : 4e de la Super League en 2022, 3e en 2023 et 2e cette saison (1 point d’avance sur Servette), sans oublier 3 consécutives. Finale de Coupe de Suisse avec 1 victoire il y a 2 ans. Son message auprès des joueurs passe 5 sur 5. Il semble loin l’époque où Lugano ne procédait que par contre-attaques avec un jeu stéréotypé. Le propriétaire américain Joe Mansueto a fourni des ressources avec des joueurs de qualité.
Au football, il faut aussi un peu de chance
Parmi eux, Renato Steffen. L’Argovien, qui a quitté Wolfsburg en 2022 faute de temps de jeu, a rejoint Lugano pour remporter des titres mais aussi caresser l’espoir de porter le maillot de l’équipe de Suisse lors de la Coupe du monde 2022. Objectif atteint puisque le joueur offensif était du déplacement au Qatar et a joué 31 minutes lors de la défaite face au Brésil. Pas mal pour celui qui n’avait pas trouvé grâce aux yeux du FC Aarau à 15 ans et qui évoluait en 2e Ligue interrégionale à 16 ans.
« J’ai fait les choses à mon rythme, avec conviction. Dans le football, il faut aussi un peu de chance”explique l’attaquant de poche. « Ensuite il faut montrer ses qualités lors de certains matches… J’ai toujours cru en moi ». Sa persévérance et sa grande volonté l’ont fait passer pro à Thoune en 2012, avant d’atteindre successivement les niveaux du YB, de Bâle et de goûter, de 2018 à 2022, la Bundesliga avec Wolfsburg.
Je peux gérer la pression… J’adore ce rôle
L’Argovien de 32 ans, même s’il avoue s’être apaisé, est connu pour son tempérament – il dit des choses, quitte à offenser –, son engagement, sa vivacité et son pied gauche. À Lugano, certains la qualifient même de « machine de guerre ». Pour sa 2ème saison au Tessin, « Reni » a marqué de son empreinte l’exercice 2023/2024 en inscrivant 6 buts et en fournissant 13 passes décisives en Super League, plus 2 succès et 2 passes décisives en Coupe.
Meilleur passeur du championnat, malgré le fait qu’il ait raté 7 matches lors du 2e tour (notamment à cause d’une blessure à la hanche), Steffen a été désigné joueur le plus décisif de Suisse selon un classement établi le 15 mai par l’Observatoire du football CIES ( Centre international d’étude du sport).
Tu ne peux pas plaire à tout le monde
A l’écouter, Renato Steffen n’a d’autre choix que d’être efficace… « Je dois atteindre un haut niveau chaque week-end si je veux aider Lugano et en même temps espérer faire partie de l’équipe nationale. Les performances doivent suivre avec des buts et des passes décisives »précise l’international suisse aux 39 sélections avant d’ajouter : «Je peux gérer la pression. Je l’ai prouvé cette saison. J’aime ce rôle ».
On le sent très bien, le maillot rouge avec la croix blanche, Steffen l’a dans le cœur : « Quand je parle de la Nati, j’ai la chair de poule… Tout le monde ne peut pas prétendre à 39 sélections. Bien sûr, nous avons des joueurs qui en ont plus de 100, mais ce sont des stars ». Alors quand certains experts remettent en question sa légitimité en équipe de Suisse, le joueur offensif reste serein : « Ces critiques ne me dérangent pas vraiment. On ne peut pas plaire à tout le monde. Mais au final, je pense que je mérite ma place en équipe nationale… Si vous regardez mes statistiques en Super League, je suis l’un des meilleurs… A moi de continuer à le prouver et de tout donner sur le terrain .»
Je vais me déchirer pour l’équipe
Dimanche, dans un stade du Wankdorf plein comme un œuf, le défi des hommes de Croci-Torti sera de ramener la Coupe de Suisse à Lugano pour la 5ème fois de son histoire. Et Steffen remporte ainsi son premier titre avec Lugano et espère en même temps être du voyage avec la Nati lors de l’Euro en Allemagne. “Si Murat Yakin m’appelle, je me déchirerai pour l’équipe”.
L’Argovien l’a déjà prouvé en mars 2023 en inscrivant un triplé contre la Biélorussie ou encore en juin 2022 lorsqu’il a disputé toute la 2ème mi-temps en tant qu’arrière contre le Portugal au Stade de Genève. “Ce n’est pas le poste que vous occupez qui compte, mais la façon dont vous abordez les tâches… Je suis très, très fier de ce que j’ai accompli et je sais aussi que je n’ai pas encore fini”conclut Steffen.
Lugano, Miguel Bao
