25 ans après, la « tuerie de Monfort » reste la plus grosse affaire pénale du Gers

l’essentiel
Quatre Néerlandais ont été sauvagement assassinés à Monfort, dans le Gers, en mai 1999. Arrêté puis condamné à la prison à vie, Kamel Ben Salah reste incarcéré alors qu’il clame toujours son innocence. Histoire d’une affaire hors du commun qui a laissé des traces.

Le bonheur est dans le pré, c’est du moins ce que suggérait Étienne Chatiliez avec son film éponyme sorti en 1995. Un long métrage, avec le Gers pour décor. Département où l’on prend le temps de vivre, où l’on vient se déconnecter et se reposer. C’est un peu ce qu’a fait cette famille hollandaise lorsqu’elle est venue séjourner à Monfort au printemps 1999, dans cette imposante maison de vacances achetée un an plus tôt et située au lieu-dit « La Boupillère ». Mais ils n’avaient pas le temps de vivre.

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Dans la soirée du 20 mai, Artie Van Hulst a été tué par balle. Son épouse Marianne, sa belle-sœur Dorothea et son beau-frère Johan Nieuwenhuis ont été poignardés et égorgés alors qu’ils revenaient d’une soirée au restaurant.

Le 22 mai au soir, leur ami s’inquiète de ne pas avoir de nouvelles d’eux. Devant une maison qui semble vide et sans réponse, il alerte la police.

Enquêteurs et techniciens en identification criminelle sur les lieux du crime après la découverte des quatre corps.
DDM – CR Archives

Là, ils découvrent l’horreur. Au sol, les cadavres baignent dans le sang. Quelques minutes plus tard, les enquêteurs découvrent une quatrième victime. « Le premier soir, nous ne savions pas grand-chose, nous avions seulement appris que quatre corps avaient été retrouvés. Assassinats, suicides ? C’est tout ce qu’on savait», raconte l’ancien journaliste gersois de La Dépêche du Midi, Bernard Ducom.

Mercredi 26 mai, l’autopsie des corps a été réalisée. Artie, un colosse de deux mètres, a été abattu de quatre balles. Jo a reçu douze coups de couteau. Les deux femmes ont eu la gorge tranchée. Thèse du rôdeur pris en plein cambriolage ou règlement de compte ? La scène reste d’une rare violence.

Le procureur de la République de l’époque, Guy Etienne, a tenu une conférence de presse peu après le meurtre.
ARCHIVES DDM-CR

Les enquêteurs étudient plusieurs pistes. Ils se tourneront vers celui d’un tueur en série allemand, Dieter Zurwehme. Ils découvrent que les cartes bancaires de la famille ont été utilisées dans plusieurs villes de la région. Les gendarmes utilisent les images de vidéosurveillance des banques. Sans succès. L’enquête est au point mort.

Un quadruple meurtre qui arrache les parents de plusieurs enfants devenus orphelins et dont la médiatisation a dépassé les frontières.

Des détails qui façonnent la culpabilité

Des mois d’enquêtes, de batailles judiciaires et d’interrogatoires ont eu raison d’un homme : Kamel Ben Salah, arrêté le 25 juin 1999. Il connaissait la famille et travaillait pour elle. Mais surtout, selon ses déclarations, il serait le dernier à les avoir vus vivants. Ses empreintes ont été retrouvées sur un ruban adhésif utilisé pour attacher les victimes. Son sang a également été retrouvé sur le sol de la maison du meurtrier.

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« Il y avait une frénésie médiatique à cette époque. On ne le savait pas, mais Kamel Ben Salah a été immédiatement mis sur écoute. Pour nous, l’enquête n’avançait pas, mais pour le procureur Guy Etienne, on ne peut pas dire qu’il était le coupable, mais il fallait le surveiller”, explique Bernard Ducom.

Kamel Ben Salah escorté au tribunal d’Auch lors de son procès devant la cour d’assises.
DDM – Archives photographiques, BD

modeste ouvrier d’une trentaine d’années, père de famille et dont on parlait peu, il a néanmoins été déclaré coupable à l’issue d’un procès extraordinaire et surmédiatisé au tribunal judiciaire d’Auch. Coupable d’avoir violé, agressé et torturé les Van Hulst et la Nieuwenhuis pour de l’argent. Un petit pécule cependant.

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La réclusion à perpétuité assortie d’une peine de sûreté de 22 ans : telle est la sanction qui l’attendait à l’issue des délibérations, en 2002 à Auch. Peu de succès suite à un procès en appel à Bordeaux qui a vu cette condamnation confirmée. Aux yeux de la justice, il est l’assassin d’Artie Van Hulst, de son épouse Marianne, de sa belle-soeur Dorothea et de son beau-frère Johan Nieuwenhuis. Pour la partie civile, sa culpabilité ne fait aucun doute au vu des charges retenues contre lui.

“Tout pointait vers lui, mais il n’y avait aucune preuve irréfutable.”

25 ans plus tard, Kamel Ben Salah approche la soixantaine, « La Boupillère » accueille des touristes en quête de bonheur dans la suite d’une période de vacances. Depuis deux décennies, et une poignée de demandes de libération conditionnelle, l’ancien ouvrier de Monfort, incarcéré à la maison d’arrêt de Muret (31), ne cesse de clamer son innocence.

Bernard Ducom (à gauche) a couvert l'affaire en 1999 pour La Dépêche du Midi.
Bernard Ducom (à gauche) a couvert l’affaire en 1999 pour La Dépêche du Midi.
DDM – SÉBASTIEN LAPEYRÈRE

Depuis 2021, Kamel Ben Salah a le droit de demander une réduction de peine. Le souvenir d’une période qui ébranla la quiétude d’un département rural toujours réputé pour son art de vivre se retrouve au fond des cartons des archives départementales. Témoignages d’une affaire déclenchée par une découverte effrayante, au cœur d’un week-end de célébration de la Pentecôte dans le Gers.

 
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