A Brive, le chef de L’Inspyration, Jérémy Cannesan, défend une cuisine vertueuse et originale

A Brive, le chef de L’Inspyration, Jérémy Cannesan, défend une cuisine vertueuse et originale
A Brive, le chef de L’Inspyration, Jérémy Cannesan, défend une cuisine vertueuse et originale

Champion de l’ultralocalisme et de la cuisine vertueuse et responsable, Jérémy Cannesan a fait de L’Inspyration à Brive un lieu gastronomique innovant, plébiscité par les guides et plébiscité par les amateurs de bonne chère. Une approche culinaire de conviction, originale et très inspirante.

Une tranche de focaccia aux drêches garnie d’une préparation à base de feuilles de poireaux mélangées et macérées dont le goût rappelle le beurre d’escargot, cuit dans du foin. C’est ainsi que commence chaque expérience culinaire que propose Jérémy Cannesan.

Tous sur la même ligne de départ

« De cette façon, tous les palais sont sur la même ligne de départ pour débuter un repas où les convives ne savent pas ce qu’ils vont manger. Ici, je n’ai rien à cacher, je travaille en toute transparence dans une démarche hyper-localiste », assure avec passion et conviction ce chef de 34 ans.

En effet, ceux qui voudraient des truffes et du foie gras à gogo, des fruits exotiques, des avocats et autres spécialités du bout du monde, seront comblés. Qu’ils passent à autre chose, car ils ne trouveront ici qu’une cuisine de passion, de raison et de création pour adhérer à une éthique sociale, écologique et humaine. Une vraie philosophie.

Itinéraire d’un enfant passionné

À l’heure où les bambins jouent encore aux Legos, rêvant de devenir astronaute, pompier, policier ou soldat dans une posture déjà héroïque, Jérémy n’avait pas cinq ans lorsqu’il a décidé qu’il serait cuisinier. Il n’y aura pas de changement de direction en termes d’orientation et le jeune Normand, né à Dieppe, suivra ses rêves. Après un baccalauréat en technologie hôtelière, Jérémy a rencontré à travers de nombreuses expériences les exigences d’un métier où il est parfois facile de se perdre dans des horaires interminables et des contraintes qui débordent sur sa vie privée.

Une étape décisive dans sa carrière : en 2014, Jérémy quitte Lille où il travaillait alors et s’installe avec sa moitié en Corrèze. A Brive, il rejoint Nicolas Eche, le chef d’En Cuisine, autre chef talentueux. Puis une expérience de traiteur à Objat lui apprend à compter et à consolider ses bases de management. C’est à cette époque que grandit l’envie du jeune homme de développer son propre projet, où il pourra laisser libre cours à sa créativité et à sa fibre locavore, où il pourra développer sa vision d’une cuisine radicale et raisonnable.

Une épreuve surmontée

Très vite, il trouve le cadre idéal, non pas en plein centre de Brive, mais dans une grande bâtisse au bord d’une route escarpée qui gravit les contreforts du quartier de La Pigeonnie, qui domine la ville animée. Les lieux, le concept, le nom, l’équipe, Jérémy a tout prévu pour ouvrir son restaurant. Tout… sauf l’épidémie de covid qui balayera tout sur son passage en mars 2020.

Une crise sanitaire qui aurait bien pu tuer le projet dans l’œuf. Mais Jérémy n’est pas du genre à abandonner sans combattre. Il tient bon, endure les ennuis, s’adapte, vend des poulets à emporter… Et puis, fin janvier 2022, L’Inspyration accueille ses premiers clients.

Du bouche à oreille au Bib

Enfin, les planètes s’aligneront et les clients découvriront cette belle salle élégante et chaleureuse, sans chichi ni esprit sur-vu. La cuisine bousculera les palais, dépaysera les esprits les plus étroits, ravira les amateurs de vins et enchantera les plus curieux qui adhéreront à cette réinvention de la cuisine locale, sans carte mais à travers un repas exécuté en plusieurs services.
« Brive la tradi » ne serait-il pas prêt à accueillir ce chef iconoclaste et sa cuisine d’avant-garde ? Non! Il n’a pas fallu longtemps pour que le bouche à oreille fasse l’article de L’Inspyration, cette adresse branchée qu’il faut découvrir car elle redéfinit les codes de la cuisine conventionnelle, réduit ses déchets, travaille sur ses fermentations, limite les énergies fossiles, contrôle l’eau. consommation.
Une envie qui séduira également le Guide Michelin qui récompensera, quelques mois seulement après l’ouverture, Jérémy avec un Bib gourmand qui met à l’honneur les très belles tables à prix raisonnables.

La quête de la quintessence

Justement, qu’est-ce qu’on mange à L’Inspyration ? Le jour de notre visite, l’entrée est à base d’esturgeon, d’un voile d’asperges blanches, de copeaux de radis rose et de fleurs de ciboulette. Harmonie des textures et des saveurs. Magnifiquement présentée, l’assiette se veut un concentré de fraîcheur et une ode au printemps. Il parle aussi de la créativité d’un chef qui avance sur un chemin végétal très contemporain avec différentes cuissons, utilisant la vapeur, qui libèrent l’eau de la végétation pour rechercher la quintessence du produit.

Cette même quête que Jérémy cherche à réaliser avec son assiette de bœuf de deux manières et avec ce très beau dessert très printanier à base de fraises, crème diplomatique à la verveine et meringue. Une pâtisserie pleine de fraîcheur et de légèreté, sans excès de sucre, de crème ou de beurre qui ponctue un service qui ne laissera pas indifférents les palais les moins curieux.

Un repas qui aura sans doute fait prendre conscience du chemin à la fois radical et raisonnable qu’empruntent Jérémy et son équipe pour relever les défis de la gastronomie de demain où les chefs devront faire preuve de créativité et de curiosité. Jérémy a une longueur d’avance sur eux…

Le vin : Château Kalian

Passionné, Jérémy accorde une place essentielle au choix des vins dans son restaurant. S’il tient à sélectionner lui-même ses vins, il ne s’abstient pas de se faire conseiller pour choisir. Surtout quand ce conseil vient d’Olivier Leydier, caviste compétitif basé à Larche (Les vins d’Olivier).

Alors ledit Olivier a recommandé ce Monbazillac Château Kalian qui a la particularité d’être un vin blanc sec. Ce vin biologique est un assemblage de Sauvignon et de Sémillon délicieux et frais. Nous avons aimé sa robe jaune pâle, toute limpidité et éclat, ce nez vif et fruité, une association de fruits jaunes et exotiques sans excès.

Maîtrise et équilibre que l’on retrouve en bouche avec encore des notes de fraîcheur, de densité et de complexité aromatique qui « s’accordent » parfaitement avec la cuisine printanière. Un très bon rapport qualité/prix.

« Tisanes sans T ».

« Tisanes sans T ». Au cœur de cette démarche locavore, la place du café fait office de puzzle pour Jérémy. S’il hésite encore à bannir le café de sa carte au nom d’une certaine consistance, le chef réfléchit de plus en plus avec insistance à le remplacer par des infusions locales et souhaite pour cela faire confiance au travail de Nathalie Bonnard et de son « T- tisanes gratuites ».

Basée à Beyssenac, en Corrèze qui flirte avec la Dordogne, cette ancienne infirmière réalise ses infusions avec des plantes cultivées naturellement sans produits chimiques ni intrants. D’autres sont récoltés dans la nature corrézienne. Le séchage s’effectue dans un atelier dédié qui permet à ses infusions de conserver l’intensité de leurs couleurs et leurs vertus médicinales. Des produits de qualité qui ont trouvé leur place chez L’Inspyration.

La recette : la chaîne de Jérémy

Plat principal du menu de Jérémy, le filet de bœuf du Limousin est accompagné d’une carotte nouvelle et d’un oignon nouveau qui reflètent la saison, d’une pomme de terre façon darphin, de graines de moutarde fermentées et d’une sauce hollandaise. en accompagnement. Habillage impeccable.

Mais ce n’est pas tout ; Jérémy présente le bœuf de deux manières avec ce petit carton à base de bœuf croustillant à base de steak de chaîne. Parfaite illustration du savoir-faire du chef. En fait, la chaîne est une pièce « accessoire » du filet bien moins noble que cette dernière. Pour autant, pas question pour le cuisinier de le négliger, encore moins de le jeter. Au contraire, Jérémy l’a superbement sublimé à travers cette préparation dont le croustillant répond avec tact à la douceur et à la tendresse du filet. Réussi.

Fabrice Variéras

 
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