comment le Covid pèse-t-il encore sur nos émotions ? – .

comment le Covid pèse-t-il encore sur nos émotions ? – .
comment le Covid pèse-t-il encore sur nos émotions ? – .

Aujourd’hui, le Covid long est une maladie reconnue par l’OMS et, en France, par la Haute autorité de santé (HAS), même si la recherche s’efforce toujours d’en trouver les causes. « Quand on fait une IRM, on ne voit rien. Mais ce n’est pas parce que nous ne pouvons pas le voir que cela n’existe pas. À partir du moment où il y a un symptôme psychiatrique, l’anxiété, il y a un corrélat biologique dans le cerveau. » précise François Chollet, professeur de neurologie au CHU de Toulouse – Université Paul-Sabatier, avant de noter que « de nombreux symptômes, comme des yeux secs ou des problèmes de peau, suggèrent un dysfonctionnement du système nerveux autonome, sympathique ou parasympathique »Ce dernier est la clé de voûte de la régulation des émotions au niveau du cortex préfrontal.

© FRANCE KEYSER/MYOP

Il existe une prévalence importante de troubles dépressifs et anxieux chez les personnes souffrant de Covid long

En 2021, à l’hôpital de la Timone à Marseille, l’équipe du service de médecine nucléaire dirigée par Éric Guedj a évalué la consommation de glucose dans le cerveau par tomographie par émission de positons chez 35 patients atteints d’un Covid long. Les résultats ont montré un hypométabolisme : « Cela se traduit par une diminution de l’activité cérébrale, notamment au niveau du bulbe olfactif et des régions qui lui sont reliées comme les régions limbiques, liées à la mémoire et à la régulation des émotions ; comme le tronc cérébral qui contrôle le fonctionnement autonome du corps, par exemple la respiration ou le sommeil. Et aussi le cervelet, qui joue un rôle dans la motricité et l’équilibre.”explains Éric Guedj.

Des résultats qui « correspondent » à la liste des symptômes répertoriés par les patients : fatigue, toux, essoufflement, inconfort, perte ou modification de l’odorat et du goût, perte de mémoire, dysfonctionnement cognitif… Ils ne souffrent pas tous des mêmes maux – et c’est la particularité de la maladie –, mais tout le monde s’accorde à dire que leur qualité de vie s’en ressent.

En tête de la longue liste, le triptyque : intolérance à l’effort, fatigue et troubles cognitifs. Ces deux derniers sont des symptômes clés de la dépression. « Il existe une prévalence significative de troubles dépressifs et anxieux chez les personnes qui souffrent d’un long Covid. Une méta-analyse estime cette prévalence à 25 % chez les patients atteints de Covid long sans avoir été hospitalisés pour une forme grave », explique Cédric Lemogne, psychiatre spécialisé dans les relations entre facteurs psychologiques et santé physique, à l’Hôtel-Dieu de Paris (AP-HP/Inserm/Université Paris Cité).

Un symptôme associé

Ces chiffres, deux à trois fois supérieurs à ceux observés dans la population générale, ont un temps laissé entendre un effet dépressogène direct du virus qui affecterait le cerveau. Une hypothèse remise en question par Cédric Lemogne : « Il existe des données épidémiologiques qui ne vont pas complètement dans cette direction. Au début de la pandémie, la dépression et l’anxiété ont augmenté très rapidement dans la population, alors que il y avait encore très peu de personnes infectées [l’OMS estime que les troubles dépressifs majeurs ont augmenté dans le monde de 27,6 %, lors de la première année, et de 25,6 % pour les troubles anxieux, NDLR ]. À l’inverse, lorsque les infections explosaient par la suite, les niveaux d’anxiété et de dépression avaient tendance à s’améliorer ou à stagner.

La cause de ces troubles serait donc plutôt à chercher ailleurs, dans l’incertitude sur l’origine, l’évolution et le traitement des symptômes physiques, ainsi que sur le handicap associé et le manque de reconnaissance dont souffrent les patients. Une étude menée par la psychiatre Sarah Tebeka pour Santé publique France a révélé que le nombre de patients présentant les critères diagnostiques du Covid long uniquement pour des « symptômes dépressifs » est anecdotique. La dépression est donc probablement plus un symptôme associé au Covid long qu’un symptôme de ce dernier. Autrement dit, les patients qui présentent des symptômes dépressifs présentent également d’autres symptômes imputables au Covid long, alors que l’inverse n’est pas vrai.

3% des personnes interrogées (sur la perte d’odorat liée au Covid-19) étaient prêtes à envisager une chirurgie cérébrale

En revanche, des antécédents d’anxiété ou de dépression sont un facteur de risque établi de développer des symptômes persistants après une infection au Covid-19, comme le montre Cédric Lemogne dans une étude publiée en juillet 2023 dans la revue Psychiatrie Moléculaireet réalisé dans la cohorte Constances, un projet de recherche épidémiologique composé de 220 000 volontaires.

Soutien psychologique

La prise en charge des patients est aujourd’hui définie par la HAS, et graduée : consultation chez le médecin généraliste, dans un premier temps ; puis, dans un second temps, une consultation pluridisciplinaire dans les centres de référence « Covid long » intégrant la santé mentale. « Nous avons mené plusieurs enquêtes en ligne sur les symptômes et les besoins des personnes touchées par le Covid-19, afin d’évaluer l’impact sur la qualité de vie, explique Moustafa Bensafi, directeur de recherche au centre de recherche en neurosciences de l’université Claude-Bernard Lyon-1. Dans le dernier, publié cette année dans Médecine des communications, dans une cohorte de 639 personnes, 50 % ont signalé un trouble olfactif, gustatif, gastro-intestinal ou grippal, 75 % des personnes considéraient leur perte olfactive comme invalidante et il en était de même pour 90 % des personnes se plaignant de symptômes cognitifs. et 63% des personnes affecté par des symptômes gastro-intestinaux. En termes de besoins, ils ont exprimé le désir d’être accompagnés psychologiquement, même au niveau professionnel. Concernant la perte de l’odorat, 3 % des personnes interrogées sur le sujet seraient prêtes à envisager une chirurgie cérébrale. Mais il n’est peut-être pas nécessaire d’envisager de tels extrêmes. François Chollet tient à rassurer : “Cela peut durer longtemps, mais il est important de dire que les patients finissent par aller mieux.”

© PATRICK ALLARD/RÉA

© TESSON/ANDIA.FR

Le 29 avril 2024, l’Inserm et l’unité de recherche sur les services et politiques de santé (Eceve) ont lancé une vaste étude nationale sur le bien-être mental des 11 à 24 ans.

Nom de code : Mentalo. Ce projet vise à évaluer la dégradation de la santé mentale des jeunes qui ont notamment vécu les années Covid. Elle prendra la forme d’un questionnaire en ligne, accessible via une application aux données confidentielles et sécurisées. Un échantillon de 50 000 jeunes sera « recruté » d’ici fin 2024, et leurs réponses recueillies jusqu’en 2026 avant d’être étudiées.

© GEORGES ROBERT/LA PROVENCE/ PHOTOPQR/ MAXPPP

En mars 2020, des centaines de personnes ont soudainement perdu le sens du goût et de l’odorat et leurs repas ont soudain pris « un goût de carton ». L’anosmie et l’agueusie – la perte de l’odorat et du goût – sont rapidement devenues des symptômes reconnaissables d’une infection au Covid. Or, lorsque cette puissante machine chimio-sensorielle composée du système olfactif, du système trijumeau (qui permet d’analyser si un aliment est salé, sucré, amer, acide, astringent, etc.) et du système gustatif tombe en panne, c’est tout l’équilibre sensible de l’individu concerné. “Ils sont tous les trois indispensables, car ils ont une fonction d’alerte pour nous avertir d’un danger en détectant les odeurs de fumée, de gaz, d’aliments surchauffés ou avariés ; ou en détectant d’éventuels poisons », explique Moustafa Bensafi, directeur de recherche au Centre de Neurosciences de l’Université Claude-Bernard, à Lyon. Sans odeur ni goût, nous devenons vulnérables, mais nous perdons également une fonction hédonique et émotionnelle. L’odorat est là pour nous faire plaisir à travers l’alimentation, le parfum des fleurs, les odeurs des proches… il est source de bien-être, d’activation des souvenirs et des interactions sociales.

“Cette perte peut effectivement induire une anxiété ou un stress très fort, à tel point qu’un tiers des patientsles personnes touchées développeront des symptômes qui ressemblent fortement à la dépression »poursuit le chercheur qui travaille depuis trente ans sur la dysosmie. Parmi les traitements envisagés : le projet Orion, qui optimise les protocoles d’entraînement olfactif via une plateforme numérique.

Moustafa Bensafi dirige également le projet européen Rose, dont l’objectif est de créer un nez artificiel à l’aide de capteurs d’odeurs miniaturisés et de stimulateurs neuronaux… Une prothèse non invasive qui devrait redonner un « nez » à ceux qui l’ont perdu.

 
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