Une peine sévère pour un père incestueux

Une peine sévère pour un père incestueux
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«Il y a certains dossiers plus durs que d’autres, et celui-là est difficile», admet le juge Sébastien Proulx en début d’audience, ouvrant le volumineux dossier.

Ce père de 33 ans, dont le nom ne doit pas être divulgué pour protéger l’identité des victimes – ses propres filles – a commis des actes ignobles. Pendant plusieurs années, il a maltraité ses filles partout dans la province. Les gestes sont très intrusifs : pénétration anale, cunnilingus, fellation, recours à des contraintes sexuelles, manque de protection.

« J’ai pris la peine de lire et de relire. Les faits que vous avez reconnus sont très graves, qui vont à l’encontre des valeurs de notre société, des valeurs de l’être humain”, affirme le magistrat.

Le juge Proulx n’a pas répété tous les faits du dossier. Ils sont difficiles à dire et à entendre. Un survol suffisait aux besoins du tribunal.

Les deux filles de l’accusé ainsi que sa belle-fille avaient 9 et 11 ans lorsqu’elles ont dénoncé les abus sexuels dont elles ont été victimes, grâce à une activité de prévention organisée par leur école primaire. Le tribunal a également souligné jeudi le travail de ces intervenants, qui ont géré ce dossier avec douceur et rigueur.

Le procureur Me Jeremy Lamonde en a également profité pour saluer l’initiative de cette école de Chaudière-Appalaches d’organiser de telles activités. Il ne fait aucun doute qu’ils peuvent sauver des vies.

Le père incestueux est détenu depuis son arrestation en octobre 2021. En détention provisoire, il lui reste 13 ans et cinq mois à passer derrière les barreaux. Il a été condamné à deux peines consécutives de huit ans d’emprisonnement pour agression sexuelle, incitation aux contacts sexuels et inceste sur ses deux filles. Une peine de sept ans est ajoutée pour l’agression sexuelle sur sa belle-fille. Le total s’élève à 23 ans.

En raison du principe de totalité des peines – qui permet d’éviter des excès de nature ou de durée dans l’imposition de peines consécutives – il a été décidé de réduire la peine à 17 ans conjointement par toutes les parties.

Le juge a accepté la suggestion. Il impose cette peine en prenant en considération les circonstances aggravantes et la seule circonstance atténuante : celle d’avoir évité un procès en plaidant coupable. Les jeunes victimes n’ont pas eu à venir témoigner devant le tribunal : un processus difficile et douloureux, dans les circonstances.

Tout le personnel judiciaire, tant de l’accusation que de la défense, semblait soulagé de pouvoir enfin clôturer ce dossier.

Manque de remords

Le juge Proulx a lu des centaines de rapports d’agents de probation au cours de sa carrière, puisqu’il possède 25 années d’expérience comme juge ou procureur. L’exercice permet de dresser un portrait des délinquants afin d’évaluer leur dangerosité et leur risque de récidive. Le bilan du père incestueux est « extrêmement défavorable ».

La liste des circonstances aggravantes est longue, « beaucoup trop » longue, affirme le magistrat en feuilletant les feuilles du rapport.

On parle d’instabilité professionnelle, de sexualité débridée, de comportements à risque, d’envie de sensations fortes comme vision de la sexualité, d’absence de remise en question.

L’homme minimise ses crimes et se dégage de toute responsabilité en se disant malade. L’empathie pour les victimes est absente de son discours. Le risque de récidive pour les infractions sexuelles et violentes est jugé supérieur à la moyenne par les experts.

L’évaluation sexologique a conclu qu’il souffrait d’un trouble pédophilique avec des tendances incestueuses et la présence d’éléments sadiques. Une sexualité inégale et toxique. L’enfance instable de l’accusé peut expliquer une partie du problème, dans la mesure où il a lui-même été maltraité lorsqu’il était enfant.

Les circonstances aggravantes sont évidentes, mais le juge Proulx a surtout souligné que l’accusé maltraitait parfois ses filles dans leur propre chambre, un endroit qui devrait habituellement leur servir de refuge.

« L’endroit le plus important pour un enfant. Sa petite chambre, son petit lit. C’est l’endroit où elle est le plus en sécurité. C’est ici que vous avez commis les actes.

L’accusé a également commis certaines agressions sur l’une des filles en présence d’une autre.

Le magistrat a également fait référence à l’un des événements décrits dans le cadre factuel, où les trois jeunes filles se trouvent aux toilettes en même temps. Le père a forcé les petites filles à lui faire une fellation, les unes après les autres.

Des conséquences innombrables

Le procureur Me Jérémy Lamonde a parcouru les déclarations des trois victimes pour énumérer les conséquences des crimes. Il aurait pu en parler pendant des heures.

Les trois victimes sont désormais de jeunes adolescents.

Ils sont anxieux, fragiles. La belle-fille de l’accusé craint le jour où sa mère aura un nouveau partenaire.

Sa fille aînée doit toujours vivre dans la maison où ont eu lieu la majorité des attaques. Elle est incapable de dormir dans sa chambre.

Ils sont colériques, déprimés, insomniaques et ont des pensées suicidaires. Deux d’entre eux ont dû être hospitalisés après des périodes de mutilation.

Les intervenantes des deux sœurs ont conclu qu’elles avaient des problèmes d’attachement et des problèmes de comportement. Les traumatismes sont complexes, ils nécessiteront un suivi jusqu’à l’âge adulte au moins.

Les trois jeunes filles ne sont pas les seules victimes dans cette affaire. Tous les gens autour d’eux ont été touchés d’une manière ou d’une autre par les événements, avec un sentiment de culpabilité en tête de tous les symptômes.

Lors des audiences de détermination de la peine, personne n’a voulu être entendu. Seul le père de la belle-fille de l’accusé était présent au palais de justice de Montmagny, les yeux larmoyants et la bouche serrée.

« C’est une évidence, mais aucune peine ne pourra réparer le préjudice subi par les jeunes filles. La seule chose que nous pouvons faire, c’est leur offrir le soutien, l’écoute et l’aide psychologique dont ils disposent. La dénonciation est une chose, la guérison en est une autre », conclut Me Lamonde.

Le procureur de la République ne peut requérir qu’une peine très sévère, à la mesure de la gravité des infractions.

L’exposé des conséquences sur les trois victimes n’a pas fait broncher l’accusé, qui est resté debout dans le box des détenus.

Une tranquillité

Le père incestueux sera bientôt emmené dans un pénitencier où les autorités pénitentiaires décideront où il passera les prochaines années de sa vie.

L’accusé ne s’est pas adressé au tribunal. Ses cheveux longs attachés, son air sérieux, il restait droit devant le juge Proulx. Il n’a montré aucune émotion.

Le magistrat s’est adressé à l’accusé vers la fin de l’audience. Il a gardé son discours assez court.

« Votre premier devoir était de les aimer et de les protéger. Vous avez utilisé des distorsions, des comportements inacceptables, pour détruire leur enfance et leur adolescence.

“Je pourrais aller plus loin dans mes propos, mais ce n’est pas le rôle d’un juge de donner des sermons”, a-t-il déclaré.

Il lui a seulement recommandé d’investir dans une thérapie pendant sa détention.

Pour les victimes, les propos du juge Proulx étaient plus doux, plus significatifs. “J’espère de tout mon cœur qu’ils pourront trouver la tranquillité, la paix.”

 
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