Pourquoi la Suisse n’est pas la meilleure en matière de recyclage des déchets

>>>>

En Suisse, 91% des canettes en aluminium et 83% des bouteilles en PET sont recyclées.

SALVATORE DI NOLFI/© KEYSTONE / SALVATORE DI NOLFI

La Suisse possède l’un des taux de recyclage des déchets urbains les plus élevés d’Europe, du moins pour l’aluminium et le verre. En revanche, la plupart du plastique est brûlé. Une nouvelle initiative vise à inverser cette tendance.

Ce contenu a été publié sur

4 avril 2024 – 13h30

En Suisse, les ménages et les petites entreprises produisent environ six millions de tonnes de déchets par an. Cela représente 671 kilos de déchets urbainsLien externe par habitant (en 2022), l’un des taux les plus élevés au monde. Selon l’Office fédéral de l’environnement (OFEV), un peu plus de la moitié de ces déchets sont collectés séparément et recyclés. C’est l’une des proportions les plus élevées d’Europe.

Le reste des déchets produits en Suisse, et notamment la grande majorité des matières plastiques, finissent dans les incinérateurs.

Voici ce qu’il faut savoir sur le recyclage en Suisse et comment le pays pourrait améliorer sa gestion des déchets.

La taxe sur les sacs favorise le recyclage

La Suisse a été un pays pionnier en matière de recyclage des déchets dans les communes. L’introduction d’une taxe sur les sacs poubelles depuis les années 1990 a encouragé les gens à recycler.

«La collecte sélective est devenue une norme sociale forte», déclare Jasmine Vide, responsable des projets d’économie circulaire à l’association faîtière Swiss Recycle. La quantité de déchets collectés et triés par habitant a doublé en 30 ans, souligne-t-elle.

Aujourd’hui, la Suisse recycle et composte 52% de ses déchets urbains. La Slovénie, l’Allemagne et l’Autriche arrivent en tête de liste en Europe, avec des taux supérieurs à 60 %. Même l’Italie, avec un taux de recyclage de près de 57 %, se situe au-dessus de la moyenne européenne (46 %).

Presque toutes les bouteilles en verre sont recyclées

Le taux de recyclage est encore plus élevé si l’on considère les différents matériaux séparément. 80% du papier et du carton sont recyclés. Ce taux passe à 83 % pour les bouteilles de boissons en plastique PET, 91 % pour les canettes en aluminium et 97 % pour le verre.

La valorisation de ces déchets est financée par une « taxe d’élimination » déjà incluse dans le prix d’achat. Par exemple, cette taxe est de 1,8 centimes pour une bouteille de boisson en PET.

Cela a permis de créer un cycle fermé dans lequel les bouteilles sont collectées, séparées et recyclées en Suisse, explique Jasmine Vide. « Dès le départ, nous avons pu valoriser les bouteilles PET et les canettes en aluminium, ce qui n’a jamais été fait ailleurs. »

En revanche, c’est le système de caution qui est très répandu en Allemagne, aux Pays-Bas et dans les pays scandinaves. Lors de l’achat d’une bouteille d’eau en plastique ou d’une canette de bière, les clients paient un supplément de 10 à 25 centimes, qui leur est ensuite restitué lors du retour du contenant au magasin.

Les déchets produisent de la chaleur et de l’électricité

Qu’en est-il de l’autre moitié des déchets urbains qui finissent à la poubelle ? Plus de 20 % d’entre eux pourraient être recyclés, selon la dernière enquêteLien externe de l’OFEV, qui analyse tous les dix ans le contenu des sacs poubelles. Le potentiel de recyclage est donc élevé.

En Suisse, les déchets urbains jetés dans les bennes ne finissent jamais dans les décharges, interdites depuis 2000. Les déchets alimentaires, matériaux composites, emballages et autres déchets ménagers sont brûlés dans des usines de valorisation énergétique, c’est-à-dire des usines qui valorisent énergie. La chaleur générée par la combustion alimente les réseaux de chaleur ou est utilisée pour produire de l’électricité.

La plupart du plastique est brûlé

Toutefois, ces chiffres ne reflètent qu’une partie du tableau. La réalité est qu’il y a encore beaucoup de progrès à faire en matière de recyclage, notamment pour les plastiques.

La consommation de plastique par habitant en Suisse est l’une des plus élevées au monde, selonLien externe OceanCare, une organisation internationale basée en Suisse qui milite en faveur d’un accord mondial pour réduire la pollution plastique.

La Suisse recycle moins de 10% de 790 000 tonnesLien externe des déchets plastiques qu’elle génère chaque année provenant des ménages, de l’agriculture et de l’industrie. Plus de 85 % du plastique est brûlé dans les incinérateurs de déchets urbains ou dans les cimenteries.

La conséquence est qu’il faudra produire encore plus de plastique pour répondre à la demande croissante. Cela signifie continuer à extraire des combustibles fossiles – les plastiques sont fabriqués à partir de pétrole et de méthane – et donc produire davantage d’émissions. Sans compter que certains déchets plastiques finissent dans l’environnement, polluant les lacs et les rivières.

«La Suisse est le dernier pays d’Europe à lutter contre les déchets plastiques», déclare Fabienne McLellan, directrice d’OceanCare. Selon un rapport de l’association industrielle Plastic Europe, la Suisse recycle 28 % de ses emballages en plastique. C’est bien moins que l’Allemagne, l’Espagne et la Norvège (plus de 40 %) ou l’Italie, l’Autriche et le Royaume-Uni (plus de 30 %).

Pourquoi si peu de recyclage du plastique ?

Recycler le plastique n’est pas chose facile. Il s’agit d’un matériau extrêmement diversifié – on trouve par exemple le polyéthylène utilisé dans les films et les barquettes alimentaires, le polystyrène dans les pots de yaourt et le polypropylène dans les capsules de bouteilles – et les articles de tous les jours sont souvent fabriqués à partir de plastiques différents. La présence d’additifs chimiques ou de colorants complique encore davantage le recyclage.

En Suisse, le plastique n’est pas soumis à une taxe d’élimination comme c’est le cas pour les bouteilles en verre ou en PET (qui est un type de plastique, mais qui répond aux normes internationales de production qui permettent de le recycler). Il n’existe aucune obligation légale de recycler le plastique et il n’existe pas de système national de valorisation.

>>
>
>

Une grande partie du plastique est utilisée pour emballer et consommer des plats à emporter.

CHRISTIAN BEUTLER/© KEYSTONE / CHRISTIAN BEUTLER

L’initiative est laissée aux municipalités et au secteur privé. L’Association suisse des recycleurs de plastiqueLien externe, par exemple, a mis en place des points de collecte dans plusieurs communes. En 2022, elle a collecté environ 9 500 tonnes de barquettes alimentaires, bouteilles de lessive et autres déchets plastiques. Environ la moitié a été recyclée.

Kunstoff.swiss, l’association représentant les intérêts de l’industrie suisse du plastique, estime que le problème n’est pas la collecte, mais la prochaine étape. Selon Patrick Semadeni, vice-président de Kunstoff.swiss, la Suisse ne dispose pas de capacités de séparation et de recyclage suffisantes pour traiter tous les matériaux collectés. Actuellement, des usines en Allemagne, en Autriche et en Italie traitent une grande partie des plastiques collectés en Suisse.

Mais cela pourrait bientôt changer, notamment grâce à une motionLien externe adoptée par les deux chambres du Parlement demandant à la Suisse de recycler davantage de plastique. Le gouvernement a été chargé de prendre les mesures nécessaires, par le biais d’une ordonnance, pour collecter séparément les parties recyclables des déchets plastiques au niveau national.

Un système de collecte sur tout le territoire

L’association RecyPacLien externe, fondée fin 2023, souhaite instaurer une économie circulaire pour les plastiques en créant un système de collecte uniforme dans toute la Suisse. L’objectif est d’impliquer toute la chaîne, depuis le fabricant – appelé à concevoir des emballages plastiques faciles à recycler – jusqu’aux entreprises de recyclage. RecyPac est soutenu par les principaux détaillants suisses et les principaux fabricants de produits alimentaires, dont Nestlé et Unilever.

Cette initiative doit permettre de collecter de grandes quantités de plastiques recyclables, condition sine qua non pour que le recyclage soit techniquement et économiquement rentable. Jasmine Vide est convaincue qu’un système harmonisé au niveau national et la garantie d’avoir suffisamment de plastique permettront à l’industrie d’investir dans des installations de recyclage en Suisse.

L’objectif de RecyPac est de décupler les quantités collectées et d’atteindre un taux de recyclage de 55 % pour les emballages plastiques et de 70 % pour les cartons de boissons (tetrapaks) d’ici 2030. La collecte devrait débuter cette année.

« Dans le futur, nous saurons exactement ce qu’il advient du plastique », estime Jasmine Vide.

Texte relu et vérifié par Sabrina Weiss, traduit par DeepL/op

Plus

>>
>
>

Plus

Tu veux en savoir plus? Abonnez-vous à notre newsletter

Abonnez-vous à notre newsletter de la Cinquième Suisse et recevez chaque jour nos meilleurs articles dans votre boîte de réception.

lire la suite Vous voulez en savoir plus ? Abonnez-vous à notre newsletter

 
For Latest Updates Follow us on Google News
 

PREV enquête ouverte pour tentative d’assassinat
NEXT Suisse Tourisme obtient un nouveau logo après près de 30 ans