Dans ce cas, Kiff Kiff demain. Publié en 2004, ce livre dans lequel elle racontait le quotidien d’un jeune franco-algérien de banlieue, s’est vendu à 400 000 exemplaires. Un véritable phénomène.
“Millénium blues” by Faïza Guène
La fin des illusions
Vingt ans et cinq romans publiés plus tard, Faiza Guène décide de donner à ses lecteurs des nouvelles de Doria, son personnage principal. De l’eau a visiblement coulé sous les ponts et la désormais trentenaire a perdu beaucoup de ses illusions même si elle le savait déjà. “à 15 ans” qu’il était “Il est difficile d’échapper à son destin.”
Dans ce nouveau monologue, plus appuyé par des digressions que par des actions, Doria nous explique qu’au niveau professionnel, c’est un peu la déroute. Elle est désormais au chômage après avoir décidé d’arrêter la coiffure, ivre de devoir s’occuper de “ex-coups d’un soir de Claude François”.
Côté cœur, c’est aussi une période de transition. Doria s’est mariée et a eu un enfant avec un vendeur de Darty, originaire du Jura, fils de fans racistes de Jean-Luc Reichmann, qui passait ses soirées à la tromper ou à faire la fête avec ses collègues de “Pubs irlandais Redneck” sur les Grands Boulevards. Bref, Dora a décidé de le quitter et elle a fait ce qu’il fallait.
Son héroïne évoque, une fois de plus, sa mère et Hamoudi, un homme autrefois amoureux de poésie et qui lui récitait les poèmes de Rimbaud, mais devenu conspirateur. “Imaginez ma surprise le jour où il m’a dit que Stevie Wonder faisait semblant d’être aveugle.”
Drôle et tendre
Ceux qui ont lu le premier livre reconnaîtront la verve de Doria et son regard lucide sur la société française (montée de l’extrême droite, radicalisation de certains jeunes, féminisme, évolution des relations amoureuses, émergence des réseaux sociaux…). Car Faïza Guène a passé les deux dernières décennies sous le scanner. Cela peut être déprimant, mais c’est souvent très drôle et parfois tendre.
Chacun obtient ce qu’il mérite. Un passionné de vélo qui pense avoir tout permis et qui est traité comme un « gentrificateur ». Des hommes qui ne font rien à la maison, certaines femmes qui affichent leur sororité, mais qui sont des hyènes les unes pour les autres, des vieillards, des banlieusards, des chauves, des enseignantes, des influenceuses et même sa mère avec ses lunettes de soleil façon Jeffrey Dahmer. Une véritable bouffée d’air frais.
⇒ Vous avez apprécié hier ? | Roman | Faïza Guéneau | Fayard, 270 pp., 20,90 €, numérique 15 €