Démystifier l’économie | Qu’est-ce qu’un déficit et comment est-il financé ? – .

Démystifier l’économie | Qu’est-ce qu’un déficit et comment est-il financé ? – .
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Chaque samedi, un de nos journalistes répond à une de vos questions sur l’économie, les finances, les marchés, etc.


Publié à 1h24

Mis à jour à 6h00

Je suis professeur d’histoire en 4e et 5e secondaire. J’ai pour vous une question que j’ai souvent reçue de mes élèves et à laquelle j’ai toujours eu du mal à répondre. Lorsqu’un pays, une province ou une ville est en déficit, nous devons emprunter pour équilibrer le budget. À qui doit-on cet argent et comment fonctionnent le remboursement et l’emprunt ?
— Pascal Turcotte, professeur d’études sociales au Collège Durocher Saint-Lambert

La question de M. Turcotte – et de ses étudiants – c’est un peu comme trois questions en fait : une sur la nature des déficits, l’autre sur leurs conséquences sur la dette publique, puis une dernière sur les emprunts de l’État.

Premièrement, M. Turcotte mentionne « une ville » dans sa question. En effet, au Québec, la loi interdit aux municipalités d’enregistrer des déficits, contrairement aux gouvernements supérieurs.

Mais qu’est-ce qu’un déficit exactement ? En finances publiques, on parle habituellement de « déficit budgétaire » de l’État. Sa définition est assez simple : cela se produit lorsque les dépenses dépassent les revenus. En d’autres termes, le gouvernement a dû payer plus d’argent (pour ses dépenses courantes, ses investissements, le remboursement de sa dette) qu’il n’en a collecté (grâce aux impôts et aux transferts intergouvernementaux).

Cet écart avec le solde budgétaire oblige le gouvernement à emprunter plus que prévu. «Le déficit va automatiquement à la dette», explique Luc Godbout, professeur de finances publiques à l’Université de Sherbrooke.

Qui prête les fonds ?

Difficile de le dire : concrètement, l’État s’endette principalement en émettant des obligations sur les marchés publics, comme des actions de sociétés cotées en bourse. Les titres de créance du Canada, du Québec ou d’autres provinces peuvent aller aux grandes banques du monde entier, mais aussi aux citoyens ordinaires.

Les monnaies utilisées pour emprunter fournissent cependant des indices. Selon le dernier budget, plus des trois quarts de la dette ont été négociés en dollars canadiens. La monnaie américaine et l’euro représentent tous deux 10 %. Cependant, des instruments financiers convertissent tous ces prêts en monnaie canadienne pour neutraliser les fluctuations des taux de change.

Comment remboursons-nous ?

En rémunérant les détenteurs de ces obligations, tout simplement. En 2023-2024, la durée moyenne des nouveaux titres de créance émis par le Québec était de 14 ans.

L’État doit alors se refinancer avec d’autres emprunts. A moins qu’elle ne soit au bord de la faillite, comme la Grèce en 2008. Pour éviter de voir le pays sombrer et convaincre les banques de le financer, les pays de l’Union européenne ont dû s’impliquer et déployer un plan de sécurité.

Est-ce grave docteur?

Bien entendu, la réponse à cette question varie selon la position de chacun sur le spectre idéologique. De manière générale, la droite est allergique aux déficits et la gauche s’y prête mieux, à condition qu’ils servent à lutter contre les inégalités et à financer les services publics et les investissements.

Une chose est sûre, elles ne sont pas sans conséquences.

Un déficit oblige le gouvernement à financer un montant plus important et cela entraîne des intérêts. Cela pourrait nous coûter plus cher si les taux d’intérêt augmentaient ou si les agences de notation perdaient confiance dans notre capacité d’emprunt.

Luc Godbout, professeur de finances publiques à l’Université de Sherbrooke

Ces agences, Moody’s et DBRS de ce monde, évaluent les titres de créance. Ils ont un impact direct sur les taux d’intérêt qu’un gouvernement paie : s’ils jugent que sa dette est moins sûre, il paiera automatiquement des taux plus élevés.

Circonstantiel ou structurel, le déficit ?

En fait, l’impact du déficit dépend avant tout de ses causes, affirme Luc Godbout.

S’il est « cyclique », il survient en raison d’événements précis de la vie économique, sociale ou politique du pays. Elle devrait ensuite disparaître ou diminuer d’elle-même lorsque les choses s’améliorent.

Meilleur exemple récent : le bond colossal du déficit fédéral, à 328 milliards, enregistré en pleine pandémie en 2020-2021.

«Ça aurait été stupide de vouloir équilibrer le budget, car on aurait amplifié le cycle économique», estime Luc Godbout. Au lieu d’aider les Canadiens à traverser la crise, le gouvernement Trudeau aurait provoqué une terrible crise s’il avait voulu éviter à tout prix un déficit.

Une fois la pandémie derrière nous, le déficit est tombé à « seulement » 35 milliards, en 2022-2023.

En revanche, si le déficit est « structurel », on considère que même si l’économie tourne à plein régime, le trou restera dans les comptes publics. Si l’État souhaite rééquilibrer le budget, il doit alors réduire ses dépenses ou augmenter ses recettes.

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PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Le ministre des Finances du Québec, Éric Girard

Le 12 mars, le Québec annonçait un déficit de 11 milliards. Dans son discours, le ministre des Finances, Éric Girard, a reconnu qu’une grande partie de cet écart avec le solde budgétaire est justement dû à un problème « structurel » : il ne peut pas compter sur la croissance économique pour le combler.

Il estime qu’en 2026-2027, ce déficit structurel sera de 4 milliards.

Le gouvernement Legault dit vouloir l’anéantir d’ici 2029-2030… s’il est toujours au pouvoir.

Consultez notre rubrique « Démystifier l’économie »

 
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