La crise économique oblige les producteurs de cacao ghanéens à se lancer en contrebande

La crise économique oblige les producteurs de cacao ghanéens à se lancer en contrebande
La crise économique oblige les producteurs de cacao ghanéens à se lancer en contrebande

Traverser clandestinement la frontière avec la Côte d’Ivoire pour vendre à meilleur prix sa production de cacao : c’est la seule solution qu’a trouvée Isaac Antwi pour gagner décemment sa vie alors que ses coûts de production augmentent, notamment en raison de la dépréciation de la monnaie ghanéenne.

Malgré la récente flambée des prix mondiaux du cacao et les efforts du gouvernement ghanéen pour stabiliser le secteur, de nombreux agriculteurs du deuxième producteur mondial se tournent vers le commerce illégal pour survivre. « Le cedi perd de la valeur chaque jour, vendre au Ghana ne suffit plus » dit M. Antwi, qui vit à Suhum, dans la région orientale, à 74 kilomètres de la capitale, Accra.

Attirés par la hausse des prix en Côte d’Ivoire et au Togo, les agriculteurs font passer clandestinement leurs récoltes de fèves de cacao au-delà des frontières. On estime que plus de 100 000 tonnes de cacao ont été introduites clandestinement en Côte d’Ivoire depuis l’année dernière.

Cette situation met en danger la filière cacao ghanéenne, qui représente environ 10 % du PIB du pays et fait vivre un million de personnes. Les agriculteurs, déjà affaiblis par des défis tels que l’exploitation minière illégale et les mauvaises conditions météorologiques, se retrouvent dans une situation encore plus précaire.

Des mesures insuffisantes

Le gouvernement ghanéen a tenté de contrer la crise en augmentant le prix d’achat du cacao auprès des agriculteurs et en restructurant la dette du pays. Il a récemment augmenté le prix d’achat du cacao aux agriculteurs à 2 188 dollars la tonne, soit une augmentation de 58 %, mais cela n’a pas suffi à compenser l’augmentation des coûts de production et l’attrait des prix plus élevés. en Côte d’Ivoire et au Togo voisins. Ces mesures n’ont donc pas suffi à freiner la contrebande.

« Si le gouvernement augmentait le prix du cacao pour l’aligner sur celui de nos voisins, la contrebande cesserait », estime un autre agriculteur de Suhum, Serwaa Adjei. Les experts du secteur réclament des réformes majeures, notamment la stabilisation du cedi et l’octroi de subventions aux agriculteurs, pour sortir le pays de cette crise et garantir la survie de l’industrie du cacao.

Le Ghana sort de l’une de ses pires crises économiques depuis des années après avoir obtenu un prêt de 3 milliards de dollars du Fonds monétaire international et restructuré l’essentiel de sa dette. Mais la dépréciation du cedi, la monnaie locale, qui a perdu cette année plus de 20 % de sa valeur par rapport au dollar américain, a gravement affecté la rentabilité de la culture du cacao, malgré les prix internationaux élevés de la fève utilisée pour fabriquer le cacao. chocolat.

Les coûts de production ont grimpé en flèche, les engrais et autres matériaux nécessaires à l’agriculture devenant de plus en plus chers. La mauvaise qualité des réseaux routiers a également gonflé les coûts de transport, réduisant encore davantage les marges des agriculteurs.

Le secteur est très réglementé au Ghana, où les producteurs de cacao sont obligés de vendre leur production au Ghana Cocoa Board (COCOBOD), un organisme public qui fixe les prix pour protéger les producteurs de la volatilité du marché.

Petites fermes

Le secteur du cacao au Ghana, qui représente environ 10 % du PIB du pays, dépend fortement des petits agriculteurs et fait vivre un million d’habitants, sur les 33 millions que compte ce pays d’Afrique de l’Ouest. Or, ces derniers se retrouvent dans une situation de plus en plus précaire.

Dennis Nyameke, un agriculteur de la région de l’Ouest, explique les raisons économiques de la contrebande. « Un sac de cacao se vend au moins 137 dollars (2 070 GHS) au Ghana, mais lorsque nous l’introduisons clandestinement en Côte d’Ivoire, nous pouvons obtenir près de 152 dollars (2 300 GHS). »explique ce père de quatre enfants.

Les experts du secteur estiment que plus de 100 000 tonnes de fèves de cacao ont été introduites clandestinement en Côte d’Ivoire depuis l’année dernière. Le secteur du cacao est confronté à de nombreux défis : l’exploitation illégale de l’or, connue localement sous le nom de Galamsey, est répandue dans les zones rurales du Ghana, affectant l’approvisionnement en eau et empêchant les agriculteurs d’accéder à leurs terres.

Mais les mauvaises conditions météorologiques, ainsi qu’une soi-disant épidémie de « pousse de cacao gonflée », endommagent également les cultures. Selon le COCOBOD, 500 000 hectares de culture de cacao ont été perdus ces dernières années, soit environ 29 % de la superficie totale du pays dédiée au cacao.

Les revenus du cacao ont chuté de 500 millions de dollars au cours du premier trimestre 2024, selon la Banque du Ghana. « Nous menons un combat difficile »admet Fiifi Boafo, responsable des affaires publiques au COCOBOD, qui estime « faire beaucoup pour améliorer la situation des agriculteurs ».

Obed Owusu-Addai, militant d’EcoCare Ghana, un groupe qui défend les droits des communautés, appelle à des réformes majeures, notamment « stabiliser le cedi » Et « accorder des subventions » aux agriculteurs.

 
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