Le personnel non vacciné licencié par la Suisse dépose une plainte

Le personnel non vacciné licencié par la Suisse dépose une plainte
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Le personnel non vacciné licencié par la Suisse porte plainte

Publié aujourd’hui à 15h57

La Suisse avait-elle le droit d’obliger son personnel à se faire vacciner contre le Covid et de le licencier s’il refusait ? Cette question n’a pas encore été clarifiée légalement.

Environ 150 membres d’équipage suisses sont concernés par le licenciement pour refus de vaccination. Un nombre indéterminé d’entre eux ont porté plainte contre leur ancien employeur. Parmi eux, deux hôtesses de l’air. Ils affirment devant le tribunal du travail de Bülach que leurs licenciements n’étaient pas légaux.

Retour sur une période hors du commun. Swiss a été la première compagnie aérienne en Europe à introduire la vaccination obligatoire pour ses équipages en décembre 2021. La raison invoquée était la protection du personnel et le maintien d’un service aérien ordonné. Toute personne n’ayant pas reçu une deuxième injection au 15 novembre 2021 ne pourra plus voler. Les personnes concernées se sont vu proposer un contrat de travail suspendu d’un an, et en cas de refus prolongé de se faire vacciner, elles ont été licenciées. Déjà à l’époque, certains avaient fait savoir qu’ils ne l’accepteraient pas.

Jusqu’à 18 mois de salaire

Une procédure de conciliation n’ayant pas abouti à un accord, les deux salariés, en tant que demandeurs, et Swiss, en tant que défendeur, se sont retrouvés devant le tribunal de Bülach à la fin de la semaine dernière. La demande des deux PNC licenciés : six mois de salaire chacun. Dans un cas, cela représente près de 23’000 francs, dans l’autre près de 20’000 francs. Pour les Suisses, il s’agit d’une somme importante, d’autant que les personnels navigants licenciés peuvent exiger, selon leur convention collective de travail, le maintien de leur salaire pendant 18 mois.

L’une des deux hôtesses de l’air, qui a travaillé pendant sept ans pour Swiss, a été licenciée 14 jours avant la levée de l’obligation. Pour pouvoir à nouveau travailler au sein de l’entreprise, elle aurait dû repasser par la procédure de sélection et se recycler. Depuis, elle a postulé à deux reprises, sans succès, auprès de la compagnie aérienne Edelweiss. «J’ai reçu un certificat de travail suisse extrêmement médiocre, ce qui rend ma vie professionnelle plus difficile», confie-t-elle. Sa réputation est entachée et il est fort probable qu’elle ne pourra plus jamais travailler comme membre d’équipage de cabine.

Défi à la proportionnalité

Le point de discorde entre les deux parties est le suivant : la Suisse avait-elle le droit d’imposer la vaccination contre le Covid-19 à son personnel de cabine et de le licencier en cas de violation de cette obligation ? Très clairement non, a fait valoir l’avocat des deux plaignants.

Il n’est certainement pas contesté que la convention collective de travail du personnel de cabine de 2015, en vigueur au moment du licenciement, prévoyait que les Suisses pouvaient ordonner la vaccination obligatoire sous certaines conditions. “Mais à l’époque, le Covid n’existait pas encore, on pensait plutôt au paludisme ou à la fièvre jaune”, poursuit l’avocat.

Une telle vaccination serait différente de celle contre le Covid. « La vaccination contre le Covid ne peut pas empêcher complètement la transmission ou les évolutions graves. Il est donc évident qu’il ne pourra pas atteindre l’objectif souhaité.»

Le point litigieux, la planification des interventions

L’avocat des deux femmes s’est demandé si les membres d’équipage non vaccinés n’avaient pas compliqué la planification de la réponse suisse pendant la pandémie. Ainsi, à l’époque, seule Malte avait rendu la vaccination obligatoire pour les équipages des compagnies aériennes en Europe. Au moment de la résiliation, seuls les vols long-courriers en provenance de Bangkok et de Montréal, sur un total de plus de 110 destinations, ne pouvaient être desservis que par un personnel de cabine vacciné.

De plus, 97 % des membres de l’équipage se seraient soumis au service de garde. «On peut se demander pourquoi la Suisse n’a pas pu gérer un si petit nombre de personnes non vaccinées, d’autant plus que seule une fraction des vols a eu lieu pendant la pandémie.» Par ailleurs, l’avocat a expliqué qu’outre Swiss, seules quelques compagnies aériennes isolées comme United, Qantas, Air Canada et Edelweiss avaient introduit la vaccination obligatoire et que même Lufthansa y avait renoncé. « L’obligation de se faire vacciner était totalement disproportionnée et abusive », a-t-elle argué. Il s’agissait d’un pur jeu de puissance de la part de la Suisse.

L’employeur se réfère au contrat

L’avocat commis d’office par la compagnie aérienne ne partage pas ce point de vue. Selon elle, la Suisse avait, d’une part, le droit d’imposer l’obligation de protéger les passagers et l’équipage. “Le personnel aérien doit pouvoir entrer et sortir d’un pays à tout moment.” Pour les personnes non vaccinées, cela n’aurait plus été le cas fin 2021.

En fonction du contrat signé par les équipages, les Suisses peuvent introduire et imposer la vaccination obligatoire. “En refusant de se faire vacciner, les plaignants ont violé leur contrat, car ils n’étaient pas disponibles pour de nombreuses destinations.” Sans agents de bord vaccinés, le plan d’affectation n’aurait plus pu être maintenu. « Les conditions d’entrée variaient parfois de jour en jour et étaient très complexes. Cela rendait presque impossible la planification avec du personnel non vacciné.

Il n’est pas vrai non plus que seules quelques compagnies aériennes ont introduit la vaccination obligatoire. “Il y en avait au moins une douzaine, dont Cathay Pacific, Etihad et Singapore Airlines.” Si, au moment où l’obligation a été décrétée, seuls 35% des membres du personnel navigant suisse étaient vaccinés, ce chiffre est passé à 97% avec l’instauration de l’obligation. «La Suisse n’est pas une boulangerie, mais une grande entreprise qui fonctionne selon des critères économiques», précise l’avocat.

Elle accusait l’une des deux plaignantes d’avoir fait attendre son employeur pendant des mois et de lui avoir fourni des certificats médicaux de complaisance. Cette personne a elle-même affirmé avoir contracté le Covid à deux reprises durant cette période. De plus, elle aurait été contrainte par les Suisses de prouver qu’elle pouvait être allergique au vaccin.

Le jugement sera notifié par écrit. Une audience similaire avait déjà eu lieu en décembre devant le même tribunal. Les plaignants, un pilote et une hôtesse de l’air, attendent également leur procès.

Daniela Schenker est journaliste chez Tamedia dans la région de Bülach, au nord de Zurich.Plus d’informations

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