Gisèle Pelicot, victime debout, devenue icône de la cause des femmes : Actualités

Gisèle Pelicot, victime debout, devenue icône de la cause des femmes : Actualités
Gisèle Pelicot, victime debout, devenue icône de la cause des femmes : Actualités

Devenue l’incarnation des victimes de violences sexuelles, une icône féministe mondiale, Gisèle Pelicot a affronté ses bourreaux la tête haute durant les quatre mois du procès pour viol de Mazan, une femme toujours debout même si elle se dit “détruite” intérieurement.

Le 2 septembre, à l’ouverture des débats à Avignon, la septuagénaire n’était encore que la victime ordinaire d’un cas hors du commun : une épouse, mère et grand-mère, bombardée d’anxiolytiques depuis une décennie par son mari. , ce « super mec » avec qui elle a partagé 50 ans de sa vie, puis violée par lui et des dizaines d’hommes qu’il a recrutés sur internet.

Mais pas question pour elle de proposer à ses agresseurs des débats anonymes derrière les murs du tribunal correctionnel du Vaucluse. Gisèle Pelicot refuse le huis clos, pourtant demandé par le parquet et auquel ont droit les victimes de viol.

«La honte n’est pas à nous, c’est à eux», expliquera-t-elle à la barre.

Le grand public et les médias du monde entier venus couvrir cette affaire symbolique de la question de la soumission chimique découvrent alors une petite femme aux cheveux roux coupés au carré, le regard caché derrière des lunettes noires.

Quatre mois plus tard, elle est devenue « une héroïne féministe », « le visage du courage », selon le New York Times après le verdict. « La nouvelle icône de la », pour Die Zeit, en Allemagne.

“Gisèle, les femmes merci”, répondent les messages collés sur les murs de la cité des Papes.

Et si de nombreux mouvements féministes dénoncent des peines trop légères, Gisèle Pelicot « respecte » la décision du tribunal. Et affirme même avoir « désormais confiance en notre capacité à nous emparer collectivement d’un avenir dans lequel chacun, femmes et hommes, pourra vivre en harmonie, dans le respect et la compréhension mutuelle ».

– « Un morceau de viande » –

Sélectionnée par la BBC dans son classement des 100 femmes les plus influentes de l’année, aux côtés de l’actrice américaine Sharon Stone ou de la prix Nobel de la paix 2018 Nadia Murad, une jeune yézidie qui lutte pour « mettre fin à l’utilisation des violences sexuelles comme armes de guerre ». », Gisèle Pelicot assistait quasi quotidiennement aux débats.

Parce que la jeune fille timide, la jeune femme qui aurait rêvé d’être coiffeuse mais qui avait finalement étudié pour devenir sténodactylographe, la mère dévouée qui donnait toujours la priorité à son mari, la retraitée qui aimait se promener et chanter à la chorale, décidé de se battre.

Face à Dominique Pelicot, son ex-mari, qui explique vouloir assouvir son “fantasme” de “subjuguer une femme rebelle”, Gisèle Pelicot dénonce “une société machiste et patriarcale”, appelant à “un changement de regard”. au viol ».

« Humiliée » par les insinuations de certains avocats de la défense, selon lesquels elle était peut-être consentante dans un scénario supposé libertin, Gisèle Pelicot, qui a eu 72 ans lors du procès, ne se laisse pas déstabiliser : « Je trouve « c’est insultant, et Je comprends pourquoi les victimes de viol ne portent pas plainte.

Désormais officiellement divorcée de son mari, condamné jeudi à 20 ans de réclusion criminelle, la septuagénaire a repris son nom de jeune fille et s’est installée loin de Mazan, cette commune de 6 000 habitants au pied du Mont Ventoux où elle avait été traitée comme “un morceau”. de viande», «une poupée de chiffon», comme elle l’a déclaré aux enquêteurs puis à l’audience.

Et elle essaie de se reconstruire.

– L’autre Gisèle –

Fille d’un militaire de carrière, née dans le sud-ouest de l’Allemagne, à Villingen, le 7 décembre 1952, et arrivée en France à l’âge de cinq ans, elle avait neuf ans lorsque sa mère décède des suites d’un cancer, à 35 ans. Mais dans ma tête j’avais déjà 15 ans, j’étais déjà une petite femme”, se souvient-elle, racontant une vie avec “peu d’amour”.

En 1971, il rencontre Dominique Pelicot, un joli jeune homme aux cheveux longs, un pull marin et deux CV rouges. « Un mec sympa », son futur mari et violeur.

Après plusieurs années d’intérim, elle rejoint EDF. Une entreprise où elle a effectué toute sa carrière, en région parisienne, pour finir comme cadre dans un service logistique de centrales nucléaires.

A côté, c’est une vie simple : la famille, ses trois enfants, dont sa fille Caroline, qui s’est battue pour amener le sujet de la soumission chimique sur l’espace public, ses sept petits-enfants et un peu de gymnastique. .

Mais le 2 novembre 2020, alors qu’elle apprend tout, après l’arrestation de son mari, surpris en train de filmer sous des jupes de femmes dans un supermarché, « son monde s’effondre » : la police lui révèle avoir découvert des milliers de photos et vidéos d’elle. viols, minutieusement archivés sur l’ordinateur de son mari, dont elle n’a jamais eu connaissance.

“Je suis une femme totalement détruite”, “la façade est solide, mais l’intérieur est un champ de ruines”, témoigne-t-elle à la barre.

Pour Me Béatrice Zavarro, avocate de son ex-mari, ce procès constituera “un épisode essentiel dans l’évolution du sujet du viol”.

Avec « un premier niveau qui est Gisèle Halimi (NDLR : avocate d’un autre procès emblématique, en 1978, qui a contribué à faire reconnaître le viol comme crime), et un deuxième niveau qui sera Gisèle Pelicot ».

« Je pense aux victimes méconnues, dont les histoires restent souvent dans l’ombre. Je veux que vous sachiez que nous partageons le même combat”, a déclaré jeudi Gisèle Pelicot à sa dernière sortie du palais de justice d’Avignon.

 
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