Pour mieux identifier les îlots de chaleur urbains sur son territoire et leur évolution, la ville de Meudon mise sur une technologie radicalement innovante.
Le changement climatique renforce la nécessité de mieux identifier localement dans les grandes villes les zones les plus sujettes à l’effet d’îlot de chaleur urbain (ICU), facteur aggravant lors d’une canicule.
La réanimation, un phénomène climatique
Phénomène climatique, l’îlot de chaleur urbain se caractérise par des écarts de température : ces températures sont plus élevées en zone urbaine que dans les zones rurales environnantes. L’îlot de chaleur urbain est généré par la ville, sa morphologie, ses matériaux, ses conditions naturelles, climatiques et météorologiques, ses activités. En retour, elle influence le climat de la ville (températures, précipitations), les niveaux et la répartition des polluants, le confort des citadins et les éléments naturels des villes. L’îlot de chaleur urbain est un facteur aggravant des canicules et notamment des épisodes caniculaires. Or, avec le changement climatique, les vagues de chaleur et les canicules ont tendance à s’accentuer. Le phénomène d’îlot de chaleur urbain amplifie ces épisodes climatiques, notamment nocturnes, en limitant le refroidissement nocturne de la ville. On peut ainsi observer des écarts de température importants entre Paris et les zones rurales : jusqu’à 10°C lors de la canicule exceptionnelle de 2003.
Un enjeu dans les Hauts-de-Seine
Il s’agit donc d’une donnée urbaine stratégique à prendre en compte dans la conception et la gestion de la ville. Très urbanisée, la région Ile-de-France est particulièrement vulnérable à ce phénomène. Selon les chiffres de l’Institut Paris Région, plus de 3 685 000 Franciliens, soit 31 % de la population régionale, résident dans des îlots considérés comme très vulnérables à la chaleur, dont 845 000 personnes particulièrement sensibles à ce phénomène en raison de leur âge : les enfants de moins de 5 ans et les personnes de plus de 65 ans. Dans les Hauts-de-Seine, la cartographie des îlots de chaleur et des îlots de froid (IFU), établie par le service R&D de Verdi Ingénierie, montre de fortes disparités entre les différentes communes du département. Ainsi, 92 % des habitants de Levallois-Perret, qui compte près de 68 000 habitants pour une densité de près de 28 000 hab/km2, résident en USI. En revanche, à Asnières-sur-Seine, avec 88 500 habitants et une densité de 18 300 habitants au km2, le taux de bâtiments exposés est plus faible, touchant toujours 71 % de la population. Le territoire présente donc de fortes disparités au sein de villes densément peuplées, causées principalement par des taux de végétation très différents. Ces disparités sont encore plus marquées pour les communes à plus faible densité urbaine. Chatenay-Malabry, Chaville, Clamart, Garches, Le Plessis-Robinson, Marnes-La-Coquette, Meudon, Rueil-Malmaison, Saint-Cloud, Sceaux, Sèvres, Vaucresson, Ville d’Avray se distinguent par la présence marquée d’îlots de fraîcheur, parfois très étendue. A l’inverse, des villes comme Levallois-Perret, Vanves, Puteaux, Montrouge, Malakoff, La Garenne-Colombe, Issy-Les-Moulineaux, Courbevoie, Clichy, Boulogne-Billancourt disposent de zones nombreuses et étendues d’îlots de chaleur urbains et trop peu nombreuses. zones insulaires fraîches.
Meudon, une ville engagée dans la transition climatique
La cartographie de ces USI et IFU est un outil essentiel pour piloter une lutte efficace contre le réchauffement climatique en milieu urbain. C’est le défi lancé par la ville de Meudon, qui utilise la technologie de simulation pour identifier les îlots de chaleur urbains (USI) présents sur son territoire. Cette expérience unique est à l’agenda de la ville depuis septembre 2024. Elle s’inscrit dans la politique environnementale d’une commune résolument engagée dans la transition climatique. La ville développe son territoire en réduisant son empreinte carbone. Elle inscrit la lutte contre le réchauffement climatique et la préservation de la biodiversité comme ses priorités. Pour cela, Meudon multiplie les opérations d’assèchement des espaces publics. Depuis 2019, 20 000 m² ont été désimperméabilisés
Promouvoir le développement d’îlots urbains frais
Non seulement cette politique contribue à favoriser l’infiltration des eaux de pluie, mais elle permet également de réduire les îlots de chaleur et donc de gagner jusqu’à 5°C lors des canicules. La place Rabelais et ses fosses végétalisées qui relient les pieds des arbres illustrent cette politique. Cette lutte contre l’artificialisation des terres s’applique également aux cimetières municipaux, espaces traditionnellement très minéraux. La ville a gazonné les allées, verdi les murs et planté des arbres. Parallèlement, des projets ambitieux visant à transformer les espaces minéraux en îlots de verdure sont menés. En cours ou à venir, la végétalisation des places Tony de Graaff et Simone Veil ainsi que de celle devant le Centre d’art et de culture témoigne de l’engagement de la ville. La lutte contre les îlots de chaleur se déroule également dans les écoles. Chaque année, deux cours d’école sont végétalisées pour offrir aux enfants un environnement plus agréable. Avec 8 000 arbres recensés, dont 400 plantés en 2023 et 200 arbres remarquables, la ville possède un patrimoine naturel très riche. C’est le résultat d’une politique volontariste de préservation et d’adaptation de la végétation. Ce patrimoine vert favorise le développement d’îlots de fraîcheur urbains.
Suivre l’évolution des îlots de chaleur urbains
Grâce à son partenariat avec Dassault Systèmes, Meudon utilise la technologie de simulation pour créer le jumeau virtuel de trois espaces publics, où des projets d’aménagement sont en cours pour les transformer en espaces plus verts. Les simulations visent à calculer et évaluer la circulation de l’air et la température dans ces trois sites. Ils prennent en compte différentes conditions météorologiques à différents moments de la journée en intégrant les bâtiments, les arbres, les routes, le sol, le vent, la lumière du soleil et d’autres facteurs dans le jumeau virtuel. Ces simulations permettront d’éclairer, à la lumière de la science, les orientations futures d’aménagement des espaces publics de la ville, tout en fournissant aux élus municipaux des indications quant à l’atténuation de ces phénomènes d’îlots de chaleur. En ville, la chaleur emmagasinée est plus importante. Le modèle d’urbanisation, les revêtements de sol, le manque de végétation ou d’eau dans les espaces publics sont autant de facteurs qui empêchent le refroidissement de l’espace urbain. Les bâtiments élevés et la densité des murs ralentissent la circulation de l’air et le bâtiment emmagasine la chaleur. Les matériaux de construction comme le béton, la brique ou la pierre captent facilement la chaleur le jour, grâce au rayonnement solaire, et la restituent progressivement dans l’atmosphère la nuit, empêchant ainsi l’air de se refroidir, soulignent les experts de Météo-France…
Le département mise sur les îles vertes
Afin de lutter contre les îlots de chaleur, le département réorganise progressivement les cursus des collèges publics. Plus verts et plus accueillants, les cours nouvelle génération contribuent également à améliorer l’environnement de travail des 74 000 étudiants du collège Altosequan. Ce projet ambitieux s’inscrit dans l’Agenda 2030 du département.
40 millions d’euros, c’est le budget investi par le département des Hauts-de-Seine pour son programme de végétalisation des cours des collèges. Lancé en 2022, après concertation avec les collégiens, ce dispositif vise à améliorer le quotidien des élèves, à offrir des espaces de détente aux enseignants et personnels hébergés sur place et à s’adapter aux enjeux environnementaux. En effet, c’est une réponse efficace à la lutte contre les îlots de chaleur urbains et à la réduction des apports d’eau de pluie dans le réseau d’assainissement. Établissement pilote, le collège Jean-Macé de Clichy-la-Garenne a inauguré son île verte fin 2021. D’ici 2027, 38 collèges publics des Hauts-de-Seine seront réaménagés.