Les neuf antennes locales de la chaîne d’information étaient en grève ce jeudi 19 décembre. En jeu : la préservation des emplois et le changement d’orientation éditoriale annoncé par le nouvel actionnaire pour 2025.
Par Étienne Labrunie
Publié le 19 décembre 2024 à 16h09
J.eudi noir dans la région pour BFMTV. A l’appel des syndicats SNJ et CGT du groupe RMC BFM-CMA Média, les antennes de la dix chaîne d’information locale vont être concernées par un mouvement de grève. Voté la veille en assemblée générale à 87%, il fait suite à l’annonce de la fermeture prochaine de BFM Paris au premier semestre 2025, information révélée par le site La Lettre. « Nous voulons avoir l’assurance qu’aucune autre chaîne locale ne fermera ses portes au cours des deux prochaines années et que la masse salariale ne sera pas réduite. » a indiqué l’intersyndicale.
Lancée en 2016 avec l’antenne parisienne, les versions locales de la chaîne d’information, axées sur l’information locale, se sont multipliées ces dernières années (1), concurrençant la rédaction de France 3 en pleine mutation. Le déploiement dans les territoires – y compris à Paris – s’est accompagné d’allocation de moyens et d’embauches. « L’objectif est de préserver l’emploi à BFM Paris, réclament les syndicats qui, au-delà des vingt-sept CDI, s’inquiètent du sort des CDD, des freelances et des non-journalistes. Ils réclament également la reprise des négociations sur les conditions de travail des salariés de la région.
L’agence parisienne, déficitaire de 2 à 3 millions d’euros chaque année depuis son lancement, prévoit encore 1,9 million d’euros de pertes en 2025. Trop, pour la nouvelle direction, qui avance que le contenu ferait double emploi avec celui du fleuron. « Aucune autre fermeture n’est prévue » a tenté de rassurer Nicolas de Tavernost, vice-président de la branche média de CMA CGM.
Moins de débats sur le plateau
Ce mouvement de contestation s’inscrit dans un contexte particulier pour l’ensemble du groupe, passé en juillet sous le contrôle de l’armateur CMA CGM, appartenant au milliardaire Rodolphe Saadé. BFMTV, longtemps leader des chaînes d’information, est régulièrement devancé par CNews depuis juin. Ce qui n’est pas du goût du nouvel actionnaire. L’heure est donc à l’offensive : un changement d’orientation éditoriale est annoncé pour 2025, avec un retour aux fondamentaux de l’information et du reportage, plutôt que de continuer à recourir intensivement aux longues étapes de débat. Le duo composé de Jean-Philippe Baille (directeur général adjoint à l’information de RMC/BFM) et Fabien Namias (directeur général de BFMTV) y travaille. Le 6 janvier sera lancé un grand journal télévisé de deux heures, interprété par Maxime Switek, qui succède à ce créneau au journaliste-présentateur Éric Brunet. D’autres changements sont attendus. La chaîne, qui a enregistré une quarantaine de départs dans le cadre d’une clause de transfert, espère quelques renforts. Première recrue majeure : Guillaume Daret, débauché de France 2, qui prendra les commandes de l’émission du dimanche La politique de BFM. D’autres suivront.
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En janvier, la chaîne devrait aussi se régler sur l’épineuse question de la numérotation. Arcom prévoit de diffuser les quatre chaînes d’information sur la TNT gratuite. BFMTV et CNews seraient suivis par LCI et Franceinfo, qui pourraient conquérir des parts d’audience, bénéficiant d’un réflexe de zapping. Une autre source de pression, et un défi de plus pour Camille Langlade, nouvelle directrice de la rédaction de BFMTV depuis octobre. Ce journaliste d’entreprise, ancien chef du service politique, dirige depuis 2023 le local BFM Régions. Son successeur au service politique, Arnaud de Courcelles (également directeur général de BFM Business), a été nommé le 16 décembre. « L’objectif est de développer notre information de proximité, élément constitutif de la ligne éditoriale du groupe, en contribuant au quotidien à la richesse de toutes nos agences », déclara-t-il alors. Trois jours plus tard, il était confronté à une grève sans précédent. Et très populaire, avec 55 % de grévistes. “C’est historique, nous espérons avoir été entendus par le nouvel actionnaire” confie Thomas Leonetti, délégué syndical SNRT CGT.