Imposition
- mardi 3 décembre 2024 – 09h18
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| Par Jean-Denis Errard
Deux époux mariés sans contrat préalable décident de divorcer. Des difficultés sont apparues lors des opérations de partage, notamment au sujet d’un contrat d’épargne retraite complémentaire, d’un montant de 102 212 €, financé par des fonds communs.
La Cour de cassation vient de connaître d’un dossier dans lequel l’épouse contestait l’arrêt de la cour d’appel qui considérait que l’avoir de retraite, disponible au moment de la cessation d’activité, est un bien personnel du conjoint souscripteur, sans droit à indemnisation du fait de la communauté conjugale, en raison des « droits exclusivement attachés à la personne ».
Cette question n’est pas nouvelle, elle a été soulevée dans une précédente affaire (Cass. civ. 1ère 28 février 2018 n° 17-13.392) où le mari, affilié au régime de capitalisation des fonctionnaires, soutenait que les cotisations versées constituent des dettes de la collectivité puisqu’un contrat « Préfon Retraite » ne peut être résilié que sous forme de rente viagère versée après la cessation de son activité professionnelle. Il s’agissait donc selon lui d’une dette contractée pour l’entretien du ménage. Là aussi, dans cette nouvelle affaire sur laquelle vient de se prononcer la Cour de cassation, il était question de l’épargne retraite « loi Madelin » pour les indépendants et les libéraux, à l’image du Préfon pour les fonctionnaires.
Récompense ou pas ?
La Cour de cassation, dans son arrêt du 2 octobre 2024, n’a pas de mal à rappeler que selon l’article 1437 du code civil « chaque fois qu’une somme est prélevée sur la communauté pour payer des dettes ou des charges personnelles à l’égard de l’un des époux doit être récompensé ».
Il est évident que cette épargne volontaire est inhérente à la nature puisqu’elle ne bénéficiera finalement qu’au souscripteur (Cass. civ. 1ère 30 avril 2014 n° 12-21.484) mais rien ne justifie l’appropriation d’une part des revenus du couple échappant aux règles. de partage lors d’un divorce sous prétexte que cette épargne, comme le prétendait le mari dans l’affaire jugée en 2018, « ouvre le droit à une retraite complémentaire indisponible à la date de la dissolution de la communauté ».
Applicable au PER
L’éventuel épargne retraite complémentaire, notamment le PER individuel, doit en cas de divorce donner lieu à une récompense lorsqu’il a été financé par l’argent commun du couple (sauf justificatif de réemploi des fonds propres). En clair, il faut partager ces économies à 50/50 dans la liquidation des intérêts des couples mariés sous le régime matrimonial légal.
La Cour d’appel semble avoir confondu les règles civiles applicables en cas de divorce du souscripteur et les règles financières relatives aux droits du souscripteur.
Rappelons que dans le cas d’une assurance vie détenue par un conjoint en biens communs, il existe une valeur de rachat du contrat qui est disponible à tout moment. Cette valeur est donc considérée comme faisant partie de la communauté conformément à l’article 1401 du Code Civil. Cette solution applicable aux divorces a été confirmée par la Cour de cassation en 1992, dans son célèbre arrêt Praslicka (Cass. civ. 1ère 31 mars 1992, n° 90-16343 ; Cass. civ. 1ère 19 avril 2005, n°02 – 10985).
Le fait qu’il n’existe pas de droit de rachat lors de l’épargne (ce qui est le cas du PER sauf exceptions, du Madelin ou du Préfon), tout comme le fait que les droits nés de cette épargne sont exclusivement personnels ou encore le fait que l’épargne retraite ne débouchent sur une rente, toutes ces modalités importent peu au vu de la récompense due à la communauté en cas de divorce.
Et les plus ou moins-values ?
La question demeure de savoir si l’indemnité doit être calculée sur la base des paiements effectués pendant le mariage ou si elle doit refléter la valeur de l’épargne-retraite au moment du divorce. Bref, faut-il prendre en compte les fluctuations de valeur, à la baisse ou à la hausse, qui surviennent au cours du contrat ? A priori, ce sont « les droits issus du contrat de retraite complémentaire » – selon l’expression du jugement de 2018 – qui entrent en compte, et donc la valeur au moment du divorce. Le nouvel arrêt mentionne également « les sommes futures sur lesquelles l’assuré a droit ».
Soulignons enfin que l’épargne retraite financée par l’entreprise ne génère évidemment aucun droit à récompense.
(Cass. civile. 1er, 2 octobre 2024, n°22-20.990)
VA
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