Ce chercheur japonais pourrait bien révolutionner ce que l’on sait sur le sommeil, la fatigue et l’insomnie

Ce chercheur japonais pourrait bien révolutionner ce que l’on sait sur le sommeil, la fatigue et l’insomnie
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Des chercheurs japonais ont tenté de percer les secrets du sommeil et de ses mécanismes.

Atlantico : Le chercheur Masashi Yanagisawa et son équipe ont franchi une nouvelle étape dans la compréhension du fonctionnement du sommeil. L’enzyme appelée kinase 3, au cœur de leurs travaux, peut-elle jouer un rôle central dans la régulation du sommeil et constitue-t-elle l’indice que tout le monde recherchait ?

Marc Rey : En effet, la découverte de cette enzyme pourrait conduire, dans un avenir extrêmement lointain, à une meilleure connaissance des troubles du sommeil. Elle intervient dans la phosphorylation des protéines et va donc provoquer une modification des forces synaptiques. Or, comme le sommeil intervient dans les forces synaptiques et que ces phosphorysations interviennent également dans le fonctionnement des synapses ainsi que dans celui de notre horloge interne, on observe des perturbations diffuses de notre système immunitaire. Celles-ci concernent la croissance, la prise alimentaire et le sommeil.

Le problème étant, en l’occurrence, que cette découverte concerne des enzymes dont le niveau de diffusion au sein de l’organisme est particulièrement important, notamment au niveau du cerveau. Ils sont, comme nous l’avons dit, impliqués dans le rythme de l’éveil et du sommeil, mais pas seulement. Ainsi, s’il reste évidemment utile de trouver des enzymes qui affectent le sommeil, ce n’est pas une découverte susceptible de résoudre tous les problèmes de sommeil auxquels nous sommes confrontés. Nous sommes face à une situation qui pourrait être comparée à une expérience durant laquelle le sujet aurait été privé d’oxygène. Bien sûr, il dort, mais il est dans le coma et lorsqu’il respire à nouveau, il se réveille. Difficile de dire que c’est une composante essentielle du fonctionnement cérébral, au niveau neuroscientifique. Cette enzyme n’a pas la spécificité pour nous être très utile.

Les travaux sur l’enzyme kinase 3 apportent-ils une nouvelle approche du fonctionnement de la fatigue ou de la somnolence qui l’accompagne parfois ?

Oui, potentiellement, mais encore une fois, nous devrons avancer davantage dans la recherche pour en savoir plus. Pour reprendre la métaphore précédente, l’expérience réalisée permet d’identifier qu’un patient manque de sucre et tombe en hypoglycémie après l’avoir privé de sucre. Ce travail est très intéressant car il révèle de nouveaux mécanismes de régulation. Malheureusement, l’action de ceux-ci reste particulièrement générale, tant au niveau du cerveau que sur le système immunitaire, les lymphocytes T ou encore un certain nombre de cellules métaboliques. Ce n’est pas une clé du fonctionnement du sommeil que l’on vient de trouver, c’est bien plutôt une clé du fonctionnement cellulaire qui agit, entre autres, sur le sommeil.

Cela ne nous empêche pas de développer toute une panoplie d’outils pour tenter de mieux dormir, allant de l’oreiller à la neuro-chimie. Compte tenu de l’importance du sommeil, qui est un besoin physiologique et un comportement social, il faut cependant comprendre qu’on ne peut pas simplement imaginer la chose comme un simple récipient de sommeil que l’on remplirait en dormant comme nous le faisons. faire le plein d’une voiture avant de vivre notre vie pendant plusieurs heures d’affilée jusqu’à ce que nous devions faire le plein à nouveau. C’est une vision biaisée de la question qui préside souvent au développement de ces outils.

Parce qu’il est aussi un comportement social, le sommeil répond aussi à tout un tas de paramètres qui ne sont pas forcément biologiques. Ils concernent, en partie, la psychologie. Nous sommes donc moins somnolents que stressés. D’une manière générale, il s’agit d’une situation dans laquelle l’être humain est capable de faire preuve d’une grande endurance : lorsqu’il craint pour sa vie, par exemple, il est capable de se priver de sommeil pendant très longtemps.

Quels sont les moyens d’assurer un sommeil plus abondant et de meilleure qualité au quotidien ?

Nous avons déjà commencé à discuter d’un aspect de la réponse : le sommeil est, en partie, une question de comportement. Cela signifie qu’il est possible de s’entraîner à s’endormir. En cherchant à dormir à des heures régulières par exemple, puisque l’on sait qu’il existe une très forte interaction entre le sommeil et les rythmes biologiques. Des horaires réguliers permettent un meilleur alignement de nos différents rythmes. Dans le cas du décalage horaire par exemple, nous vivons une période de déphasage de ces mêmes rythmes. En moyenne, il faut savoir que le rythme veille-sommeil met huit jours à s’ajuster ou à se réinitialiser.

Évidemment, il est essentiel de connaître ses propres besoins en sommeil. C’est quelque chose de très important, mais aussi de très individuel. Certains dorment peu, n’ont pas besoin de beaucoup de sommeil, tandis que d’autres dorment longtemps. Ce n’est pas quelque chose qui peut être changé ; cela revient à la génétique. Il y a aussi ceux qui sont le soir et dont la forme est complète le soir. Ils ne parviendront pas à s’endormir à 20 heures, même s’ils se forcent la main.

Faut-il penser que les travaux actuellement menés au sujet de la régulation du sommeil pourraient permettre de mieux contrôler la durée et la qualité du sommeil ?

Malheureusement non, puisque le sommeil est multifactoriel. C’est biologique, d’une part, mais pas seulement. Il va sans dire que nous serions tous ravis du développement d’un médicament capable de mieux réguler et contrôler la qualité du sommeil ; ce qui permettrait à chacun de se réveiller en pleine forme. Nous aimerions fonctionner comme des machines qui peuvent être éteintes ou rallumées instantanément. Mais les humains, nous pouvons continuer à chercher, n’ont pas de boutons marche-arrêt. C’est du fantasme.

Cela ne veut pas dire que la recherche n’essaie pas ! Les chercheurs travaillent sur les troubles du sommeil pour tenter d’affiner les réponses envisageables face à un patient. Parfois, il s’agit de remédier à une hygiène de sommeil inadéquate, parfois le problème réside dans la qualité du sommeil elle-même, comme cela peut être le cas chez les patients souffrant d’apnée du sommeil. Il est indispensable, en cas de troubles, de faire un diagnostic par un médecin compétent, d’autant que l’on a beaucoup progressé et sommes bien mieux à même d’identifier les causes à traiter.

Depuis la crise du covid, le nombre de patients souffrant de pathologies rendant le sommeil plus difficile semble avoir explosé. Ce n’est pas le covid stricto sensu qui a conduit à l’insomnie, d’autant que celle-ci a régulièrement touché les proches des patients plutôt que les patients eux-mêmes. Dans la question ? Le confinement, parfois, le caractère anxiogène du journal télévisé diffusé à l’époque. Rester assis sur votre canapé toute la journée contribue à modifier le rythme de sommeil que nous avons mentionné précédemment.

En conclusion, peut-on dire que l’enzyme kinase constitue une découverte pleine d’espoir en termes de régulation du sommeil dans le futur ?

À certains égards, oui, sans aucun doute. Il est toujours utile, comme je le disais plus tôt, d’en savoir plus sur le sommeil. Mais son action reste bien trop diffuse pour que l’on puisse espérer des avancées majeures fondées uniquement sur sa découverte. Les kinases jouent un rôle très important dans tous les rythmes biologiques, pas seulement dans la régulation du sommeil. Nous n’avons pas trouvé la clé spécifique de l’interrupteur de veille, pour ainsi dire. Dire cela serait soutenir une extrapolation, un mensonge.

 
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