Cette saison, chaque bloc de Pro D2 sera analysé par un technicien ou un ancien joueur particulièrement friand de ce championnat. Cette semaine, c’est Jérôme Thion, ancien deuxième ligne du XV de France avec 54 sélections. L’actuel consultant de Canal+ voit Grenoble dominer les débats pour longtemps mais attend davantage de Brive ou de Provence Rugby…
Grenoble domine toujours les débats (1er avec 51 points) et efface les craintes de l’intersaison…
C’est la belle surprise de l’année, sachant qu’à l’intersaison on s’est effectivement posé quelques questions. Il y avait pas mal de cadres qui partaient, des jeunes du centre de formation qui partaient dans d’autres clubs du Top 14, le capitaine Steve Blanc-Mappaz qui partait à Lyon… Finalement, on ne savait pas trop si le groupe était je vais revenir aux bases de l’année dernière avec une grande identité, avec un grand jeu. Au final, c’est la belle découverte du début de saison. C’est l’équipe qui joue le mieux depuis le début de cette Pro D2 et à regarder, c’est vraiment un régal. Ce qui est bien c’est qu’ils arrivent toujours à se renouveler et à trouver dans la formation des joueurs à la hauteur et qui sont vraiment au top pour jouer. C’est un début de saison parfait pour Grenoble.
Brive est deuxième du championnat mais sur le contenu, n’avez-vous pas le sentiment qu’ils sont capables de faire mieux ?
On aurait espéré que Brive aborde ce championnat un peu différemment. Il y a toujours une part d’adaptation entre Top 14 et Pro D2, on l’a vu avec certaines équipes comme Oyonnax. Il faut se réajuster, trouver le bon carburant dans un championnat qui est différent avec des blocages. Au vu du recrutement, c’est vrai qu’on attendait mieux de Brive même si aujourd’hui ils commencent à prendre la mesure de cette Pro D2. C’est une équipe qui s’améliore constamment et qui a tellement de potentiel qu’on attend toujours un peu plus d’elle.
Vous évoquez cette équipe d’Oyonnax qui a remporté une victoire à Montauban avant la pause. Est-ce synonyme d’une nouvelle dynamique ?
Oyonnax parviendra à se relever sans problème. Sur les deux dernières sorties, on a compris la dimension qu’ils pouvaient avoir, ce qui n’était pas forcément le cas en début de saison. Après avoir discuté avec certains joueurs et certains entraîneurs, beaucoup de choses se sont passées en interne. Il y avait beaucoup de mouvement. Un changement de direction avec un head coach devenu entraîneur de la défense de l’équipe d’Angleterre. Tout cela met un peu de confusion dans cette équipe même si on a au fond un groupe avec un potentiel énorme. Disons qu’on s’attendait à mieux même si, sur le dernier contre, on a vu que l’équipe avait du caractère.
Pensez-vous qu’Oyonnax peut vraiment se remettre sur les rails ?
Je me souviens de Grenoble, qu’on annonçait en difficulté l’année dernière et qui avait terminé deux fois finaliste avec des points de pénalité dont je ne savais plus quoi faire. D’un point de vue non sportif, cela a été un calvaire pour eux mais ils ont réussi à se débrouiller et à terminer dans le top 6. Si Oyonnax remonte les qualifications dans le top 6 cela ne m’étonnerait pas. Ce n’est pas impossible pour eux.
Biarritz et Montauban, qui avaient démarré haut la main, sortent du top 6…
C’est toujours la même difficulté quand on est dans cette Pro D2. Le championnat est long, les blocages sont gérés différemment pour certains. Il y a quelques blessés… Du côté de Montauban, la saison dernière a été catastrophique mais quand on voit le travail qui a été fait par Sébastien Tillous-Borde et son nouveau staff, on voit une vraie différence dans l’approche et dans le jeu proposé. Je pense que c’est juste un peu moins bien, un passage à vide comme il peut y en avoir en cours de saison. Je ne suis pas particulièrement inquiet et je pense même que cette équipe peut se placer dans le top 6.
Comme Biarritz ?
Biarritz est franchement attractive en termes de contenu. Honnêtement, je ne pensais pas les considérer comme pertinents dans ce qu’ils parviennent à proposer. Le travail réalisé par Boris Bouhraoua est remarquable. C’est du management positif, il arrive toujours à trouver les mots justes pour garder un groupe très soudé. Au niveau du contenu, à domicile ça ne change pas, c’est une équipe qui va chercher des points à l’extérieur et qui peut aussi accrocher le top 6 sans problème.
Au contraire, Dax et Soyaux-Angoulême se sont installés aux six premières places du championnat. Est-ce vraiment une surprise ?
En termes de budget, oui. Ce qui est incroyable, c’est que ce sont des équipes qui continuent de progresser constamment, même avec un petit budget. Ce qui fait la différence en Pro D2, c’est de pouvoir glaner des points à l’extérieur, ce que Soyaux-Angoulême a parfaitement réussi à faire en début de saison. Dax, de son côté, est toujours aussi surprenant, c’est toujours aussi fort, ça joue, ça gagne, franchement c’est séduisant et ça donne un peu de fraîcheur à cette Pro D2. Cela fait partie de l’ADN de la Pro D2, d’avoir des équipes qu’on n’attend pas sur le papier et qui peuvent grappiller des places dans le top 6. C’est enrichissant pour ce championnat et ça donne de l’espoir à toutes les équipes qui peuvent monter.
Nevers de son côté semble clairement en fin de cycle ?
Oui c’est dur, c’est très dur à Nevers. Cela me fait mal au cœur de voir Xavier Péméja dans cette situation. Ils ont perdu pas mal de cadres, dont Christian Ambadiang, qui était véritablement l’acteur majeur de la Pro D2 l’an dernier. Il a survolé le championnat et quand on perd un joueur majeur c’est compliqué de le remplacer, c’est même impossible, personne n’a son profil. Aujourd’hui dans l’animation offensive de l’USON, on ne retrouve pas ce type de joueur et c’est déjà un premier problème. La seconde, c’est que Nevers est en difficulté dès le début de saison. Psychologiquement, je pense qu’il y a une vraie difficulté qui s’installe et qu’ils n’arrivent pas à gérer. Même le manager ne trouve pas de solution pour le moment. Il avait également présenté sa démission qui a été refusée par le président du club. Psychologiquement, on voit que tout le monde est impacté. J’espère juste qu’ils trouveront de nouvelles ressources pour bien terminer cette saison.
N’êtes-vous pas déçu par une équipe comme Provence Rugby ?
Déçu car on attend mieux de cette équipe, bien sûr. Sur le papier on s’attend à ce qu’ils se battent pour les premières places et dominent réellement cette Pro D2. Depuis le début de l’exercice, ce n’est pas encore ça. Il y a une part de frustration. C’est une équipe qui marque beaucoup mais qui n’arrive pas à obtenir une régularité dans ses résultats. C’est assez surprenant, compte tenu de la qualité de l’effectif.
Quels sont les enjeux du prochain bloc ?
La stabilité pour ceux qui veulent conserver une place dans le top 6 est essentielle. Il faudra qu’Oyonnax retrouve un véritable élan. Les équipes ventre mou vont devoir s’activer. Mais au fil des prochains blocs, les matchs vont devenir de plus en plus âpres.
Bref
L’équipe la plus impressionnante de ce 3ème bloc ?
Grenoble
L’équipe avec le plus de potentiel ?
Brive.
L’équipe la plus surprenante de ce 3ème bloc ?
Dax.
Un joueur à retenir ?
Romuald Séguy.
Un match inoubliable ?
Grenoble – Brive (34-22)
L’équipe à surveiller au 4ème bloc ?
Oyonnax.