inquiétante plongée au coeur d’une malédiction familiale

Joan Baez et Bob Dylan, dans le documentaire « Joan Baez I Am a Noise », de Miri Navasky, Karen O’Connor et Maeve O’Boyle. L’ATELIER DISTRIBUTION

L’AVIS DU « MONDE » – POURQUOI PAS

Quel film étrangement embarrassant que celui de Miri Navasky, une réalisatrice de télévision qui, après des sujets consacrés à un jeune tueur en série, au suicide assisté et à l’identité trans, a cosigné avec Karen O’Connor et Maeve O’Boyle un documentaire consacré à l’immense artiste folklorique Joan Baez, aujourd’hui âgée de 83 ans. Nous sommes un peu lents, au début, à découvrir la clé de voûte. Partagé entre le présent de sa tournée mondiale d’adieu (2019) et l’évocation de sa longue carrière, le documentaire semble chercher son chemin avant de montrer ses cartes : il sera, plutôt qu’un film rendant hommage à son génie vocal ou à l’histoire de sa musique, un portrait intimiste poussé dans ses confins les plus sordides.

En même temps qu’il pousse les portes de sa biographie – son engagement pour les droits civiques, sa relation passionnée et malheureuse avec Bob Dylan – le film s’aventure, avec l’accord de l’intéressé, dans des chemins personnels plus épineux et plus risqués.

Anxiété existentielle

Une histoire moins connue y surgit, qui est celle d’une vie fondée sur une profonde angoisse existentielle, elle-même liée à un événement traumatique fondateur, dont le film organise, de manière concertée et d’autant plus embarrassante, la lente assomption dramatique.

Journaux d’enfance, films familiaux, conversations d’époque enregistrées, séances de psychothérapie familiale et confessions de Joan Baez elle-même tissent une sale histoire. Celle d’une famille dysfonctionnelle d’abord, dans laquelle la prééminence exceptionnelle de Jeanne aurait conduit ses deux sœurs, Pauline et Mimi, à développer à son égard deux attitudes diamétralement opposées, mais non moins antagonistes : fuite pour la première, compétition marque de jalousie pour la deuxième. Même le fils du chanteur, le percussionniste Gabriel Harris, ne se plaint pas rétrospectivement que sa mère consacre plus de temps à ” sauver le monde “ qu’à lui-même.

A lire aussi (2018) : Article réservé à nos abonnés Joan Baez : « Je me souviens d’une époque où nous résistions »

Ajouter à vos sélections

La trace de ce malaise général finit par remonter peu à peu au père de Joan, Albert, physicien réputé d’origine mexicaine, dans une sorte d’apothéose qui laisse songeur. Selon la sœur cadette Mimi, Albert l’aurait embrassée sur la bouche. Il se serait ensuite comporté de manière inappropriée lors d’une sieste avec Joan. Des enregistrements enregistrés montrent que les parents ont farouchement nié ces actes. La mère, dans son journal, mentionne « syndrome des faux souvenirs ».

Il vous reste 22.29% de cet article à lire. Le reste est réservé aux abonnés.

 
For Latest Updates Follow us on Google News
 

PREV Sean Penn répond aux allégations d’abus contre Madonna en 1987 – .
NEXT Johnny Cash, homme de la campagne – Libération