Il continue de regarder les filles se promener sur la plage, mais surtout il ne change rien à son esprit libre et rock. Le chanteur, guitariste, producteur et auteur Patrick Coutin, 72 ans, continue de tracer son chemin artistique et humain, loin des autoroutes de la banalité. Avant son concert du 3 mai au Secret Place, près de Montpellier, le rockeur s’est confié à Midi Libre. Avec franchise et sang-froid.
Parlons de ce tube, que nous considérons personnellement comme le plus grand hit du rock français de l’histoire, le plus fou, le plus atomique : J’aime regarder les filles !
J’en ai écrit pas mal à l’époque. Mais celui-ci a eu la chance d’être écrit très vite. J’étais journaliste à Rock & Folk, J’avais aussi un groupe. Été 1979, nous passons une journée au Château d’Hérouville, le mythique studio d’enregistrement, pour les maquettes. Le problème, c’est que Jacques Higelin, qui devait occuper le studio, était à ce moment-là captivé par une beauté espagnole et ne pouvait donc pas venir. Nous avons donc eu dix jours pour travailler et retravailler avant d’enregistrer nos huit modèles. Après, Higelin toujours absent, on avait encore du temps mais on ne savait pas quoi faire. J’avais des bribes de trucs, mais un matin, en grattant ma guitare, le texte m’est venu. J’avais des amis qui étaient déjà en vacances dans le Sud, ils m’appelaient pour me dire de revenir, que la blonde de l’autre fois me demandait, ce genre de choses… Alors bon, j’étais Hérouville, un des les plus beaux studios du monde, mais bon, j’aurais aimé être avec mes amis, je ne sais pas, sur la plage, à regarder les filles…
Certains disent qu’une telle chanson ne pourrait pas être écrite aujourd’hui. Ce n’est pas notre avis : elle est sensuelle, mais pas sexiste, et exprime sa frustration !
Mais oui, cela n’a rien à voir avec du harcèlement ! Et puis comme me l’a dit un ami, quand une fille est venue me voir : “Oh, tu sais, il les regarde juste!” (rires) Quand j’ai écrit cette chanson, je devais avoir 27 ans, et j’étais déjà convaincu depuis longtemps, depuis toujours, qu’aimer les femmes ne me donnait aucun droit sur elles, bien sûr. On ne peut plus écrire ça ? Mmh… Disons que ce serait peut-être moins à la radio, c’est possible, tout le monde a tellement peur d’offenser l’un ou l’autre. Mais je pense qu’on peut toujours écrire une chanson comme celle-là, je le pourrais, et il y a de la distance dedans.
Vous poussez la plainte si loin qu’elle prend une dimension pathétique !
Oui, catastrophique même à la fin, le mec pleure accroché aux barreaux ! (rires) Avec ce riff envoûtant. C’est clairement une chanson obsessionnelle ! Je pense que quand on est jeune, on a le droit d’être obsessionnel. On pourrait même dire que si vous n’êtes pas obsédé par vos désirs à 20 ans, quand le serez-vous ?
