En pleine évolution, le code de la famille donne « déjà » lieu à de vifs débats au sein des cercles des défenseurs des droits des femmes. Si certaines propositions sont largement saluées, d’autres manquent de clarté, certaines voix fulminent, entre autres : la Coordination Féminine pour un Changement Global et Profond du Code de la Famille. Cette dernière, regroupant plusieurs associations féministes, plaide pour une révision ambitieuse et inclusive de ce texte juridique clé.
Regroupant plus de 33 associations de femmes et de défense des droits humains à travers le pays, cette coalition a suivi de près toutes les étapes du processus de consultation initié par le gouvernement et la commission chargée de réviser le Code de la famille.
De la nomination de la commission à la présentation de ses propositions au Chef du Gouvernement en mars 2024, en passant par la demande d’avis du Conseil Supérieur des Oulémas et le communiqué du Cabinet Royal en décembre 2024, la Coordination a été active et acteur vigilant. Ce communiqué appelle notamment à la création d’un cadre juridique clair et équitable, évitant les interprétations subjectives et favorisant un effort d’innovation juridique pour résoudre les problèmes sociaux et familiaux.
La Coordination a salué plusieurs avancées incluses dans les propositions présentées par la commission, notamment :
- La suppression de la condition de deux témoins musulmans pour les Marocains résidant à l’étranger ;
- La mise en place de cadres pour le partage des biens communs entre époux ;
- La création d’un mécanisme indépendant de médiation et de conciliation ;
- Reconnaissance du travail domestique dans l’évaluation de la contribution des femmes à la richesse familiale ;
- Accorder à la mère la tutelle légale sur ses enfants et le droit de se remarier sans perdre la garde de ses enfants.
Toutefois, ces progrès restent, selon la Coordination, insuffisants pour opérer une véritable transformation. Les principales revendications, comme la fin de la polygamie, l’abolition des ta’sib » (héritage des agnats mâles) et la reconnaissance des droits des enfants nés hors mariage, n’ont pas été pleinement pris en compte.
Malgré les progrès, la Coordination déplore que la philosophie du Code de la famille reste basée sur le principe de « qiwâma», attribuant à l’homme un rôle de chef de famille en fonction de sa position de principal soutien financier. Une réalité économique et sociale qui ne reflète plus aujourd’hui la diversité des familles marocaines. “Cette logique perpétue une hiérarchie injuste et maintient les privilèges masculins au détriment des droits fondamentaux des femmes.», selon la coordination.
Ainsi, la Coordination des Femmes a identifié plusieurs lacunes dans les propositions actuelles :
- L’absence de réforme du système successoralavec le maintien du « ta’sib », qui prive de nombreuses filles de leurs droits en matière d’héritage équitable ;
- Maintenir la polygamiemême si son autorisation est soumise à des conditions exceptionnelles ;
- Refus d’utiliser l’expertise génétique établir une filiation qui porte atteinte aux droits des enfants nés hors mariage ;
- La persistance du mariage des mineursmalgré des statistiques montrant un âge moyen tardif au mariage ;
- Limiter la contribution des femmes à la richesse familiale travail domestique, ignorant leur participation financière directe ou indirecte.
Pour la Coordination, le projet actuel de révision du Code de la famille doit être une opportunité historique pour garantir aux femmes marocaines une vie digne et égalitaire. Elle appelle tous les défenseurs des droits humains à s’impliquer activement dans le débat public et le processus législatif afin d’élaborer un Code qui réponde aux aspirations des familles marocaines.
« Il est impératif d’élaborer une loi sans discrimination, garantissant la justice et l’égalité pour tous les membres de la famille. », insiste la Coordination. Elle rappelle également que ce projet législatif doit non seulement respecter les engagements internationaux du Maroc, mais aussi répondre aux transformations profondes de la société marocaine et à ses aspirations à un avenir plus juste.