les conseils de ce centenaire, l’un des doyens des Landes et du Pays Basque

les conseils de ce centenaire, l’un des doyens des Landes et du Pays Basque
les conseils de ce centenaire, l’un des doyens des Landes et du Pays Basque

L’oeil rit. La main est ferme. “J’ai encore une certaine adhérence, n’est-ce pas ?” » Pas mal, depuis 105 ans. Le compteur grimpe avec l’arrivée de la nouvelle année le 2 janvier. Louis-Joseph Mercier a fêté son anniversaire samedi au restaurant Lairrial de Tarnos. Cette étape fait de lui l’un des aînés du territoire basco-landais. « À cet âge-là, il y a encore des choses qui se passent moins bien. La vue, par exemple. Et les souvenirs se chevauchent. J’oublie, je rattrape, je me mélange. » Vous n’avez pas besoin de creuser très longtemps.

À portée de main, une longue vie. Ses épreuves. Son bonheur. « J’ai connu Paulette. C’est l’essentiel. Soixante-seize ans de mariage», confie le centenaire, l’œil humide. Covid l’a emportée il y a deux ans. « Elle m’a dit : ‘Mieux vaut moi que toi. Sinon, que ferais-je sans toi ?’» Louis Mercier s’impatiente à l’idée de la retrouver. « Si vous trouvez la bonne, aimez-la profondément, toute votre vie. Comme un fou. »

Le soleil de minuit

De cette idylle entre la couseuse de Vouvray et le chauffeur du camion benne sont nés quatre enfants, puis une ribambelle de descendance. Bon nombre d’entre eux se sont rassemblés samedi à Tarnos. Peut-être le secret de la longévité. Avec un peu de génétique. « Ma tante et marraine est décédée à 101 ans. Ma sœur, l’année dernière, à 104 ans, a illustré Louis Mercier. A 99 ans, je suis monté sur le toit pour changer les tuiles, et il y a deux ans, j’utilisais encore la motobineuse dans mon jardin. » Pas grand-chose comparé aux bouleversements du XXe siècle.

Louis Mercier est né en 1920, dans une famille de bouchers. « Mon père vendait les animaux qu’il choisissait lui-même, dans les champs. À l’époque, nous savions ce que nous achetions. » Ébranlé par le divorce de ses parents, il est élevé par ses grands-parents. « Je ne m’entendais pas très bien avec mon père. Avec lui, il fallait marcher avec un bâton. Cela ne me convenait pas. » Il a grandi à Descartes, aux confins de l’Indre-et-Loire et de la Vienne. Une enfance heureuse à grimper aux arbres et à se gaver de cerises du verger. « Ils avaient des vignes, deux vaches et des canards », se souvient-il près d’un siècle plus tard.

Une vie paisible rattrapée par la Seconde Guerre mondiale. Louis Mercier est dans l’armée en 1940. Le jeune homme sert dans le 10e régiment d’artillerie coloniale. Il a passé cinq ans en Afrique. Dès que les hostilités ont éclaté avec l’Allemagne nazie au printemps, il a mis le cap sur la glaciale Narvik. Ce port arctique norvégien doit être protégé des désirs de la Wehrmacht. Louis Mercier passe des heures sous les bombes. «Mais ce qui m’a le plus frappé, c’est le soleil de minuit. Je regrette de ne pas avoir eu l’occasion de le montrer à Paulette. »


Louis Mercier continue d’être passionné par l’actualité. La guerre en Ukraine touche particulièrement l’ancien soldat de 1940.

Émilie Drouinaud

A son retour en , « les Allemands étaient déjà là ». Il est incarcéré au camp de Coëtquidan, en Bretagne. « Des habitants sont venus nous donner à manger à travers la clôture. » Après un mois de confinement, il s’évade avec un ami. Direction Paris, puis sa Touraine natale, avant de se réfugier dans la ferme de ses grands-parents. « Un Allemand passait souvent prendre un verre. Un jour, il a demandé à ma grand-mère quel âge j’avais. Heureusement, il l’a crue lorsqu’elle lui a annoncé 17 ans. »

Dimanche c’est Dancharia

Le jeune Louis Mercier rencontre Paulette en 1945. Il l’épouse six mois plus tard. Le couple s’installe à Tours. « J’ai arrangé ma vie », sourit le retraité. Il acquiert une maison à la campagne grâce à ses économies. « J’ai tout refait. » Sa revente lui a permis de profiter d’une retraite heureuse à Ondres, dans le sud des Landes. « Chaque dimanche, c’était Dancharia. Nous partions en voyage avec Paulette. J’ai conduit jusqu’à ce que mes jambes n’en puissent plus, à 102 ans. Je n’avais besoin de personne. Il y a maintenant des infirmières et des femmes de ménage. »

En grandissant, Patrice, l’un des fils, est venu vivre avec eux. « Pour ne pas les mettre en maison de retraite. Ce n’est pas facile tous les jours, mais j’ai eu envie de les accompagner jusqu’à la fin de leur vie, explique la septuagénaire. Ce qui tue, c’est l’absence de projets et l’ennui. »

Louis Mercier garde intactes ses passions. L’amour des oiseaux. Et un intérêt pour l’actualité. «Je suis entièrement pour l’Ukraine. » En 2022, le massacre de Boutcha résonne chez l’ancienne recrue de 1940. « Beaucoup ne comprennent pas que ce qui s’y passe est très important pour la France et pour toute l’Europe. Si j’avais quarante ans de moins, je partirais. J’admire ceux qui se battent. » Louis Mercier avoue vouloir « vivre pour voir ce qui va arriver ». «Je l’attends avec impatience. » A 105 ans, on peut encore parler d’avenir.

 
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