Ffinale de la Coupe du monde 1998. Nous sommes le 12 juillet, il est 21h30. Zinédine Zidane s’élève dans le ciel de Saint-Denis et coupe la trajectoire du ballon centré par Emmanuel Petit devant le Brésilien Leonardo. Le gardien Cláudio Taffarel a réagi trop tard ; le portier ne peut que regarder, impuissant, le cuir entrer dans son filet. Le photographe Lionel Hahn a (pour l’éternité) figé ce moment, gravé dans l’histoire du sport français.
« Cette image et celle de la maîtrise acrobatique de Zidane contre l’Italie ont lancé ma carrière », souffle, vingt-six ans plus tard, le Périgourdin. Il expose une centaine de ses plus belles photos de sport dans un cadre aussi insolite que majestueux, l’ancienne Banque de France à Périgueux. Celui qui est professionnel depuis 1994 explique avec affabilité son travail et par extension les plus grands exploits sportifs des dernières décennies.
Souvenirs de Bolt
Les records du monde du sprinter Usain Bolt ou du sauteur à la perche Mondo Duplantis ? Lionel Hahn était là. La sixième victoire historique de Tom Brady au Super Bowl ? Lionel Hahn était là. Les médailles d’or de Léon Marchand ou de Teddy Riner ? Lionel Hahn était là. « C’est un super métier, j’ai rencontré des gens incroyables », savoure modestement celui qui a grandi avec sa mère Jeanine, institutrice à Sorges. « Quand je pense que c’est mon petit qui a fait tout ça avec son appareil photo, ça me fait rire », sourit le retraité.
Elle ajoute : « Est-ce que j’aime le sport ? Pas spécialement, c’est ce que me dit mon ostéopathe. Mais ce n’est pas grave, je n’ai pas besoin de ça pour reconnaître que le travail de Lionel est extraordinaire. » Ce prosélytisme maternel est corroboré par le carnet de commandes de l’intéressé. Le 15 juillet 2024, le Périgordin aux 25 Festivals de Cannes et aux 17 Super Bowls a été sélectionné par l’organisation du relais de la flamme olympique pour immortaliser la judoka Clarisse Agbegnenou au sommet de la Tour Eiffel ; Fin novembre, sa photographie de Rafael Nadal sortant pour la dernière fois du court central de Roland-Garros a été sélectionnée parmi les finalistes du prestigieux prix Richard-Martin, le grand concours photo international organisé par « L’Équipe ».
Sherpa et glisse
Son auteur contextualise : « Il avait plu quasiment tout le match, donc le toit était fermé. Lorsque le dernier point est joué, le soleil se lève et brille sur le terrain. Je le vois saluer le public en levant le bras et je démarre. » Ou l’art de saisir le bon moment, comme ce fameux 12 juillet 1998. « C’était la jungle de se tenir au bord du terrain avant le coup d’envoi. J’avais 25 kilos sur le dos, en mode sherpa, et je me suis mis à courir vers le poteau du coin. J’étais dans le peloton de tête lorsque j’ai pris un câble. Après le vol plané, je me suis dit que j’allais rester là où j’étais. »
Une photo de cette série sera reproduite en double page par « Paris Match ». D’autres images feront la une de « L’Équipe » ou de « Tennis Magazine ». Mais c’est la photo prise en 2018, lors du Super Bowl LIII (football américain), qui a donné à Lionel Hahn son bâton de maréchal : une double page dans « Time Magazine », hebdomadaire américain tiré à 3 millions d’exemplaires.
Californie
Il raconte : « Les New England Patriots venaient de gagner et tout le monde voulait la photo de Tom Brady, qui venait de devenir le joueur le plus titré de l’histoire. J’entends un caméraman communiquer avec sa production, leur disant qu’ils auraient Brady et Julian Edelman (meilleur joueur du match) dans cinq minutes. Je ne l’ai pas lâché, pendant cinq minutes il était devenu mon meilleur ami. C’était une question d’expérience. » Il a été développé pendant plus de vingt ans en Californie. Jusqu’en 2020.
C’est l’épidémie de Covid-19 qui a contraint le retour de Lionel Hahn, sa femme et ses trois enfants, en Périgord. En moins de temps qu’il n’en faut pour enfiler un masque FFP2, le Périgourdin a dû abandonner le tapis rouge des Oscars et la salle de sport du Staples Center pour une vie à la campagne. Los Angeles n’est pas Trélissac. « L’adaptation a été compliquée, notre deuxième est parti dans son cocon », concède le quinquagénaire. Sans filtre.
Jusqu’au 4 janvier
L’exposition-vente de Lionel Hahn, intitulée « L’émotion en mouvement », est ouverte dans les locaux de l’ancienne Banque de France (place du Président-Roosevelt) à Périgueux, tous les jours de 10h à 19h, jusqu’au 4 janvier. une centaine de photographies sont exposées, dont une vingtaine provenant des Jeux Olympiques de Paris 2024. L’entrée est gratuite.