Cibler les blanchisseurs d’argent sale au service de plusieurs organisations criminelles à la fois, s’impliquer dans les enquêtes internationales visant des Québécois ou des Canadiens, aider les forces policières locales dans la traque des membres de gangs qui se déplacent de plus en plus à travers le Canada, réduire les importations et la production de fentanyl. des drogues synthétiques, anéantir les groupes du crime organisé en s’attaquant à leurs avoirs ; la Gendarmerie royale du Canada entend poursuivre l’année prochaine ce qu’elle a commencé en 2024. Mais pour lui faciliter la tâche, elle estime que des changements législatifs majeurs sont nécessaires.
«La GRC met tout en œuvre contre le crime organisé», affirme Marie-Ève Lavallée, chef des enquêtes de la Gendarmerie royale du Canada (GRC), région de l’Est (Québec et Maritimes).
La surintendante rappelle qu’en 2024, sa division a contribué à trois enquêtes internationales.
L’enquête Dead Hand a été lancée par le FBI, à la suite de laquelle Roberto Scoppa, frère des défunts chefs de clan mafieux montréalais Andrew et Salvatore Scoppa, a été arrêté.
L’enquête sur le slalom géant a été lancée par le FBI et la police mexicaine contre un ancien snowboarder olympique canadien, Ryan Wedding, recyclé dans l’importation de cocaïne. Ce dernier est toujours recherché par la police et une récompense de 50 000 dollars américains est offerte pour toute information permettant son arrestation.
Enfin, l’enquête Cyborg a été menée les polices européennes et australiennes contre un concepteur d’une plateforme de communications cryptées utilisée par des criminels.
Notre priorité en 2025 sera vraiment d’initier des dossiers avec nos partenaires internationaux afin de pouvoir s’attaquer à ce crime qui a un grand impact au Canada ; les drogues qui sont transférées ici, les fonds, le blanchiment d’argent, les cryptomonnaies, tout cela peut nous affecter.
Superintendent Marie-Ève Lavallée
« Les complots qui se faisaient ici auparavant se font désormais ailleurs, nous devons donc être plus polyvalents et utiliser les atouts de toutes nos unités ainsi que ceux des partenaires internationaux, qui, bien souvent, disposent d’informations que nous n’avons pas. aucun accès», ajoute son adjoint et patron de l’Unité mixte d’enquête sur le crime organisé (UMÉCO), l’inspecteur Dominic Duchesneau.
“C’est ce sur quoi nous allons beaucoup nous concentrer en 2025, car nous savons que cela porte ses fruits des deux côtés de la frontière”, ajoute-t-il.
L’unité fait la force
Le crime organisé en territoire autochtone sera également une priorité pour la GRC en 2025.
Les importations et exportations de fentanyl, qui préoccupent également l’administration Trump aux États-Unis, ainsi que la lutte contre les drogues de synthèse.
En 2024, la GRC a démantelé au moins trois laboratoires clandestins de production de drogues synthétiques au Québec, dont un à Drummondville. Cette enquête est toujours en cours et implique également les forces de police internationales.
La surintendante Marie-Ève Lavallée rappelle également la saisie en 2024 de 3,2 kg de kétamine, la découverte, par des membres de la division des enquêtes aéroportuaires, de 62 kg de cocaïne dissimulés dans un piano à queue et le démantèlement, par le détachement de Québec, d’un réseau d’importateurs et de distributeurs de cocaïne qui serait dirigé par le défunt caïd Raymond Desfossés.
Sont également à la chasse de la police fédérale en 2024 l’arrestation d’un possible importateur d’armes à feu illégales à Montréal et l’arrestation de Québécois au Pérou soupçonnés de trafic de cocaïne.
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Alors que les membres des gangs de rue de Montréal se déplacent de plus en plus vers d’autres provinces canadiennes, la GRC a appuyé le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) en surveillant dans l’Ouest canadien des suspects soupçonnés de meurtres et arrêtés par le SPVM dans le cadre d’une enquête majeure appelée Mécano. le 11 décembre.
« Cette collaboration est très importante entre les corps policiers si nous voulons réussir et protéger les citoyens. On va beaucoup se tourner vers ça en 2025, parce que c’est de cette façon qu’on cause le plus de dégâts», prévient M. Duchesneau.
Attention aux blanchisseurs professionnels
L’année 2024 a également été marquée par une enquête majeure contre un clan mafieux montréalais, celui des Lopez, et dans laquelle une unité redéfinie de la GRC aurait pu – comme le reste nous le dira – faire une entrée fracassante.
Cette unité, l’Anti-Money Laundering Investigation Team (AET) – anciennement Joint Proceeds of Crime Unit – a joué un rôle important dans cette enquête baptisée Chrome. Dès le début, six bâtiments appartenant à la famille Lopez ont été bloqués, mais la pleine contribution de l’EEBA sera connue au moment des arrestations et des inculpations.
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Mais en plus d’assister les unités d’enquête de la GRC, l’équipe, qui compte une quarantaine de membres, se donne un autre mandat en 2025 : s’en prendre, partout au Québec, au Canada et ailleurs, aux « blanchisseurs d’argent professionnels ». » qui offrent leurs services, que ce soit en cryptomonnaie ou dans d’autres devises, à plus d’une organisation criminelle, en échange d’une commission, comme les réseaux basés à Montréal et Toronto démantelés en 2019, au terme d’une enquête baptisée Collector.
Notre priorité est de lutter de la meilleure façon possible contre la criminalité organisée. C’est ainsi que nous pouvons avoir un plus grand impact sur le monde souterrain. Les blanchisseurs professionnels sont nos principales cibles depuis la création de l’équipe.
Sergent d’état-major Christian Gravel, chef de l’équipe d’enquête sur le blanchiment d’argent
Le système judiciaire critiqué
Il n’en demeure pas moins que lutter contre les criminels organisés, qui en apprennent toujours davantage sur les méthodes policières à chaque fois que des preuves sont déposées au tribunal et qui s’adaptent, est de plus en plus difficile, déplorent les forces policières, dont la GRC. .
Dans Chrome, une dizaine d’individus ont été fouillés en mars 2024.
Neuf mois plus tard, une quinzaine de téléphones portables saisis n’ont toujours pas été ouverts et fouillés par les enquêteurs de l’UMÉCO car ils font l’objet de poursuites judiciaires (demandes de type Lavallée).
Celles-ci visent à protéger les informations privilégiées que peuvent contenir les appareils et à établir des protocoles, afin que la GRC puisse ensuite extraire les données qui ne sont pas sensibles et utiliser celles qui sont pertinentes à son enquête.
Une fois les téléphones ouverts, les enquêteurs devront les analyser, en extraire les échanges incriminés, identifier les personnes sous des pseudonymes et déterminer quels individus se cachent derrière chacun des appareils.
Bref, c’est pratiquement une deuxième enquête qui va commencer, ce qui entraînera l’accumulation de nouvelles preuves et retardera encore davantage leur divulgation et les inculpations.
Nous menons une enquête de dix mois, mais nous passons un an et demi en divulgation.
Inspecteur Dominic Duchesneau
Le policier milite pour des changements législatifs, notamment en matière de saisies d’ordinateurs, de cryptomonnaie et de partenariat avec les forces de l’ordre étrangères, pour faciliter le travail des policiers qui pourront ainsi affecter davantage de policiers aux enquêtes. et moins de divulgation, et éviter les « choix déchirants » quant aux criminels à cibler.
« Le système judiciaire n’est pas adapté aux enquêtes complexes de lutte contre le crime organisé. Je ne veux pas embellir la situation et je ne veux pas non plus être alarmiste ; la police est dévouée et la population est en sécurité. Mais pourrions-nous faire plus ? J’ose espérer que oui, si nous avions des outils différents en termes de législation », conclut-il.
Pour contacter Daniel Renaud, composez le 514 285-7000, poste 21. 4918, écrivez à [email protected] ou écrivez à l’adresse postale de La presse.