A Ajaccio, un Tunisien en situation régulière risque l’expulsion après une condamnation pour violences conjugales

A Ajaccio, un Tunisien en situation régulière risque l’expulsion après une condamnation pour violences conjugales
A Ajaccio, un Tunisien en situation régulière risque l’expulsion après une condamnation pour violences conjugales
Adel Kehlaoui a fait l’objet d’un arrêté d’expulsion. Benjamin Raynaud

Adel Kehlaoui va-t-il quitter le territoire national ce vendredi 20 décembre ? “J’ai peur. Je ne veux pas laisser ma femme seule. »», porte-t-il plainte dans un coin du bureau de son avocat, Me Don Georges Pintrel, qui a convoqué la presse.

Ce ressortissant tunisien en situation régulière, titulaire d’une carte de séjour de longue durée, fait l’objet d’un arrêté d’expulsion pris par les services préfectoraux le 8 octobre. Le représentant de l’Etat estime que cet ouvrier de façade de 53 ans, en Corse depuis 2002, représente « une menace grave et actuelle pour l’ordre public ».

Pour étayer sa décision, il cite trois condamnations, dont une en 2006 pour recel, mais surtout deux condamnations pour violences commises sur son épouse. En 2019, Adel Kehlaoui a été condamné à 18 mois de prison avec sursis pour violences ayant « incapacité de travail n’excédant pas 8 jours ». En 2021, les juges l’ont cette fois condamné à 6 mois de prison et l’ont placé sous surveillance électronique.

“Il n’a plus jamais posé la main sur moi.”

“Ce ne sont pas des faits que je peux approuver”insiste son avocat Me Pintrel, qui estime en même - que“il y a des violences conjugales et des violences conjugales”. “C’est arrivé dans un couple qui s’est immédiatement réconcilié”il défend.

“J’ai peur. Je ne veux pas laisser ma femme seule», se plaint Adel Kehlaoui. Benjamin Raynaud

Le couple avance des explications confuses. L’intéressé déclare avoir consommé de l’alcool au moment des faits. Son épouse, qui n’a jamais porté plainte, mentionne “stresser” qui était le sien à son arrivée en en 2019. « Je ne parlais pas bien français. Mon mari est allé travailler et je ne suis pas sortie (elle est désormais aide à domicile, ndlr) »explique-t-elle. Dans un sanglot, elle parle aussi de son fils resté en Tunisie et affirme avoir elle-même “fait un combat« .

Celle qui supplie constamment son mari de rester en Corse avec elle, a d’ailleurs rédigé des attestations à l’attention de la préfecture. « J’aime mon mari (…). Depuis qu’il a comparu devant le tribunal, il a parfaitement compris sa leçon et n’a plus jamais levé la main contre moi. »écrit-elle, dans un français plus assuré que parlé.

Une procédure de regroupement familial en cours

Pour Me Pintrel, la décision de la préfecture ne prend pas en compte les conséquences de cette expulsion sur la famille d’Adel Kehlaoui. À cet égard, l’ordre d’expulsion méconnaît le droit européen. Le couple revendique un kafala (équivalent à une adoption en droit musulman) en cours entre Adel Kehlaoui et le fils de sa femme, ainsi qu’une procédure de regroupement familial qui aurait été validée par les autorités. Selon le couple, une assistante sociale s’est rendue à leur domicile pour vérifier que leur logement répondait aux critères nécessaires pour accueillir cet adolescent de 15 ans.

L’avocat a déposé un recours (non suspensif) devant le tribunal administratif (TA) de Bastia, ainsi qu’un deuxième recours en référé pour lequel son client a été débouté. Il déplore également que la préfecture n’ait pas pris en compte l’avis défavorable rendu en juillet par la commission des expulsions, selon lequel Adel Kehlaoui “ne constitue pas une menace sérieuse pour l’ordre public”.

« La Ligue des droits humains ne peut accepter la violence contre les femmes. Mais on casse quelque chose», a déclaré André Paccou, président de la LDH en Corse. Benjamin Raynaud

« La Ligue des droits de l’homme ne peut accepter la violence contre les femmes. Mais nous cassons quelque chose”estime André Paccou, président de la LDH en Corse. « Tout cela n’est qu’un prétexte pour mettre en œuvre les récentes circulaires et faire des chiffres, sous la pression d’un électorat qui vote à l’extrême droite, et en jouant avec l’opinion publique »il fustige. Placé brièvement en détention administrative, Adel Kehlaoui a été libéré à la demande du juge des libertés et de la détention (JLD). Contactée, la préfecture s’en tient aux faits reprochés à Adel Kehlaoui et rappelle qu’il est « convoqué pour expulsion le 20 décembre ».

 
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