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Nous avons rencontré Nasir Ahmad Nusrati fin mars 2023 dans la cour de la faculté de droit de Poitiers. Le 26 novembre 2021, ce chercheur afghan a fui son pays avec sa femme et sa fille de 5 mois, après l’arrivée au pouvoir des talibans. Au terme d’un périple de plus de 5 700 km, lui et sa famille arrivent le 11 décembre dans la préfecture de la Vienne. Car l’Université de Poitiers a accepté son dossier de thèse au sein du Programme d’aide à l’accueil d’urgence des scientifiques en exil (Pause).
Du statut de réfugié reconnu à l’apprentissage du français
Trois ans après son arrivée en France, le doctorant en droit public, âgé de 32 ans, a progressé dans l’apprentissage du français. « J’ai appris la langue pendant un an et demi avec le Centre de Français Langue Etrangère (CFLE). J’ai déjà un niveau avancé et je me prépare à passer un Dalf 2 (diplôme d’perfectionnement en langue française) »dit-il. L’étudiant multilingue, qui parle anglais, persan et pachtoune, s’est également amélioré grâce aux associations poitevines Buddy System réfugiés et Monde Éducation 86 et en suivant des cours en ligne.
Inscrit à l’école doctorale, il a également participé à plus de trois cents heures de formation. « Et j’aimerais continuer à bien comprendre le système juridique français et la méthodologie de recherche. »
Nasir Ahmad Nusrati évoque également la durée des démarches administratives, depuis sa demande d’asile jusqu’à son statut de réfugié, acquis en octobre 2022. « J’ai obtenu les documents nécessaires (acte de naissance, livret de famille, titre de voyage, carte Vitale, titre de séjour) en septembre 2024. Et après avoir changé de statut, j’ai dû demander un récépissé tous les trois mois en préfecture »il se souvient.
Autre difficulté, son épouse, qui débute en français et souhaite travailler dans la santé, n’a pas été sélectionnée pour suivre les cours du CFLE en janvier 2025, “le groupe de formation étant au complet”.
“Pas de solution miracle”
Son expérience alimente nécessairement son sujet de thèse, qui porte sur les solutions durables pour les réfugiés afghans ; une communauté qui représente plus de cinquante mille personnes en France. « Il existe très peu de recherches et d’études consacrées à l’analyse de ce qui se passe après l’obtention du statut de réfugié »indique-t-il.
Dans une première partie, Nasir Ahmad Nusrati entend démontrer que le rapatriement et le droit au retour, même s’il est plus alternatif que définitif, sont « des solutions inadaptées »compte tenu de la situation politique en Afghanistan. « Il n’y a ni droits ni libertés fondamentaux. Les filles ne sont pas autorisées à aller à l’école, ni à l’université, ni à sortir sans un homme. Il n’y a pas non plus de droit à la retraite pour les salariés.»il illustre.
Dans une deuxième partie, le doctorant s’intéresse à la réinstallation et à l’intégration des réfugiés dans la société. « Cela passe par l’apprentissage des langues, l’acculturation, la formation et l’insertion professionnelle »il mentionne. Et de reconnaître qu’il « Il n’y a pas de solution miracle pour tous les réfugiés ».
Le trentenaire, qui a déjà publié plusieurs articles de recherche à l’international, espère terminer puis soutenir sa thèse entre janvier et juin 2026. Et n’envisage son avenir nulle part ailleurs qu’en France, en travaillant “dans le domaine académique”.