Il est 14 heures ce mardi 2 décembre. Le Secours populaire de la rue de Trégain, dans le quartier Maurepas à Rennes, vient d’ouvrir. «C’est le coup», affirme Patrick Pierre, bénévole de cette association qui vient en aide aux plus démunis de ce quartier. La file d’attente pour récupérer un chargement de courses, des vêtements de bébé ou obtenir de l’aide dans les démarches administratives est toujours pleine.
Dans ce quartier prioritaire de la ville, 65% de la population, notamment dans le secteur des rues de Brno, vit sous le seuil de pauvreté selon le nouveau rapport de l’Observatoire des inégalités publié ce mardi 3 décembre 2024. de Rennes, et même de Bretagne.
“Viande rouge? Une fois par mois, et encore… »
Au Secours populaire, « plus de la moitié des adhérents sont en situation irrégulière, demandeurs d’asile », confie Patrick Pierre. Comme Cécile, 39 ans, bénévole et adhérente, qui bénéficie d’un hébergement d’urgence « quand il y a de la place ». Arrivée de la République démocratique du Congo en France en 2023, elle ne reçoit rien, aucune allocation.
Et puis il y a des profils comme celui de Philippe, 53 ans le 15 novembre, qui vit dans un petit appartement d’une tour du square Hippolyte-Dayot avec son ex-beau-frère. Au RSA pendant une dizaine d’années, il est contraint d’arrêter son activité de plâtrier à cause de deux hernies discales. « Je reçois 615 euros par mois. Mon ex-beau-frère m’héberge et je contribue au loyer et aux frais de nourriture.
Philippe l’avoue : « c’est un peu dur de manger ». Car son beau-frère, retraité, vit lui aussi sous le seuil de pauvreté, puisqu’il touche environ 1.000 euros par mois. Avec ses revenus, Philippe peut, chaque mois, prendre de la nourriture au Secours populaire. Mais pas assez pour tenir un mois entier. « Sinon, je vais au supermarché. J’achète ce qui coûte le moins cher, des pâtes, du rôti de porc… Parfois, un poulet à cinq dollars fait deux ou trois repas. » Le poisson ? “Jamais, c’est trop cher.” Viande rouge? « Une fois par mois, et puis encore. La dernière fois, j’ai mangé un petit rosbif. Ça n’a pas duré longtemps, c’est tellement bon. Une boîte de raviolis, c’est bien, mais au bout d’un moment… D’une certaine manière, on vit avec la faim. »
“Pas de cadeaux pour Noël”
Car pour Philippe et son beau-frère, le petit-déjeuner, c’est le café et c’est tout. A l’heure du déjeuner, « on ne déjeune pas, mon beau-frère prend des gâteaux s’il le faut. On mange bien le soir. » Pas du genre à se plaindre, celui qui était aussi maçon va « essayer quand même de marquer le coup pour Noël, mais on ne se fera pas de cadeaux ».
S’il ne perçoit que 615 euros, il essaie de mettre de côté environ 200 euros chaque mois “en cas de moments difficiles, si le frigo est vide” ou si la machine à laver tombe en panne. « J’ai eu le nôtre il y a six ans pour 20 euros sur Leboncoin. Une pièce était défectueuse, j’ai pu la faire réparer pour 40 euros. Depuis, il fonctionne. » Le manque de ressources conduit à l’ingéniosité.
Les activités de loisirs demeurent. Mais sans argent, c’est difficile d’en avoir. « On passe le - devant la télé, ou je vais me dégourdir les jambes dans le quartier. Ma sœur voulait m’inviter en vacances à la montagne. Mais c’est trop cher et je ne veux pas qu’elle paie pour ça. Je ne suis pas comme ça. Parfois, elle vient me chercher et m’emmène faire un tour, ou m’achète un restaurant. Être entouré, ça fait du bien.
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