FAIT DU JOUR Gérard Banide, la mémoire gardoise de l’Euro 84

Alors que l’Euro a débuté vendredi et que l’équipe de France de football débute demain son Championnat d’Europe des nations contre l’Autriche (à 21 heures), les Bleus fêtent les quarante ans de la victoire de l’Euro 84. Quatre décennies plus tard, Uzètien Gérard Banide, alors entraîneur adjoint à Michel Hidalgo, revient sur ses souvenirs. Rencontre avec un technicien pas comme les autres.

Rien ne pourrait nous arriver ! Je n’ai ressenti aucune pression. Nous avions confiance en nous. Nous étions forts dans tous les domaines. Quarante ans après la victoire légendaire de l’équipe de France de football, un Gardois se souvient de cette époque bénie du sport français. À l’été 1984, les Bleus étaient au sommet de leur art et probablement au sommet du monde. L’équipe de France n’a peut-être jamais été aussi forte. Au cœur de cet instant fondateur du football français, se trouve Gérard Banide (87 ans aujourd’hui), basé à Uzès depuis plus de 30 ans. L’entraîneur adjoint (et également en charge des gardiens) Michel Hidalgo est né un 12 juillet, ce qui pour les amateurs de football fait principalement référence à la première Coupe du monde remportée par la France en 1998.

“L’inauguration de la Beaujoire et le 5-0 contre la Belgique, c’est un très beau souvenir”

Mais revenons à ce fameux Championnat d’Europe des Nations de 1984 : « La première image qui me vient à l’esprit, c’est l’inauguration du stade de la Beaujoire (à Nantes, NDLR) avec une victoire 5-0 contre la Belgique. C’est un très beau souvenir, le stade était magnifique. se souvient Gérard Banide. Cette compétition est toute une aventure puisqu’elle intervient deux ans après la Coupe du monde espagnole où les Bleus se sont révélés au monde. En tant que pays organisateur, la France doit justifier de son statut de favori, d’autant que lors des éliminatoires, l’Italie, les Pays-Bas, l’URSS, la Pologne et l’Angleterre sont tombés sur la touche. Après un stage à Font-Romeu (Pyrénées-Orientales), les Français ont débuté la compétition par une victoire étriquée contre le Danemark (1-0) : « C’était peut-être le plus difficile à comprendre car c’est le premier », souligne Gérard Banide.

Une magnifique horizontale de Gérard Banide alors gardien de l’OAC • Archives privées Gérard Banide

« Sauvé par une action magique de Tigana et Platini »

Ensuite, les Bleus ont mis la Belgique à rude épreuve (5-0) et Michel Platini a sauvé la France en inscrivant un triplé contre la Yougoslavie (3-2). Les choses sérieuses commencent en demi-finale avec le Portugal à Marseille. Deux ans après le traumatisme de Séville (élimination aux tirs au but contre l’Allemagne de l’Ouest), les Bleus ont été menés (1-2) à cinq minutes de la fin de la prolongation avant que Domergue et Platini n’offrent la victoire à la France. ” Nous avons encaissé un but de Jordao contre le cours du jeu et cela aurait pu mal se passer, mais nous avons été sauvés par une action magique de Tigana et Platini. se souvient l’Uzétien. C’est finalement l’apothéose avec la finale contre l’Espagne et la bévue de Luis Arconada sur le premier but français (57e). Mais Gérard Banide, l’ancien gardien, veut défendre le gardien basque.

Gérard Banide avec Michel Platini lors de l’entraînement de l’équipe de France • Photo de : Norman Jardin

“Critiquer Arconada, c’est comme être dur avec un serveur qui renverse un verre”

Les ballons qui touchent le sol et sont proches du corps sont les plus difficiles à attraper. C’était une faute de main mais Arconada était un excellent gardien. Le critiquer pour cette action, c’est comme être dur avec un serveur qui renverse un verre. « . Les Français complètent le chef-d’œuvre avec un deuxième but en fin de match. C’est l’œuvre de Bruno Bellone : “Il a fait preuve de finesse et d’une grande classe, une réussite parfaite”, analyse le technicien. Viennent ensuite les réjouissances, la liesse et la fête mais sans Gérard Banide : « Je ne suis pas très démonstratif. Le football se résume à ce qu’on fait sur le terrain et à l’entraînement, le reste ne m’intéresse pas. » Mais l’ancien sélectionneur veut porter le coup à une légende.

Gérard Banide fait un footing avec Joél Bats au Mexique • Archives privées Gérard Banide

« Platini ? » Même avec la belotte et la pétanque, il était très fort »

Le véritable entraîneur était-il Michel Hidalgo ou Michel Platini ? ” C’est Michel Hidalgo qui faisait l’équipe. Par exemple, à Nantes contre la Belgique, il a décidé de remettre Luis Fernandez en latéral droit pour avoir un milieu supplémentaire et ça a marché. Il avait suffisamment d’idées pour décider par lui-même. En revanche, que Michel Platini lui donne un avis était possible et souhaitable. « . Michel Platini était le meilleur joueur du monde en 1984, mais comment le définir quatre décennies plus tard ? ” C’était la technique simplifiée à l’extrême. Il a eu une vision étonnante. Il n’a pas eu besoin de faire trois contrôles pour donner un ballon. C’était un grand joueur et un gagnant à chaque match. Même à la belotte et aux boules, il était très fort. C’est le plus grand joueur que j’ai jamais côtoyé..

Gérard Banide avec le staff de l’équipe de France lors de la Coupe du Monde 1986 • Archives privées Gérard Banide

Le champion de France de handball signe avec l’OAC

Mais la carrière de Gérard Banide ne se limite pas à cet été 1984. Il y a eu un avant et un après. Même si son accent chantant en fait un sudiste, c’est à Paris qu’il est né et c’est d’abord dans le handball qu’il excellait : « J’ai été champion de France de handball avec le SMUC (Stade Marseille Universitaire Club, NDLR) à sept ans, mais il m’est arrivé de jouer au handball à onze ans sur un terrain de football. » Le passage au football a eu lieu alors qu’il y jouait pendant son service militaire : « Le Sétois Marcel Tomazover est venu me proposer un essai pour Alès contre Draguignan et j’ai été accepté. » L’aventure cévenole n’a duré qu’une vingtaine de matches en quatre saisons : «Je n’étais pas un grand joueur. »

Champion de France avec l’ASM en 1980, l’Uzétien a été félicité par le Prince Rainier III de Monaco. • Archives privées Gérard Banide

Un stage à l’Ecole Normale de Nîmes

C’est néanmoins à Alès que Gérard rencontre Jacqueline qui partage depuis lors sa vie avec lui. “Quand j’ai voulu l’épouser, ma belle-mère m’a dit : “Le footballeur n’est pas un métier”, alors je partageais mon temps entre faculté de droit et brocantes, avec mon grand-père qui était antiquaire, j’ai décidé de me lancer dans l’enseignement après un stage à l’Ecole Normale de Nîmes. J’ai ensuite pris mes diplômes pour devenir coach et j’étais dans la même salle que Robert Herbin « .

Pibarot, Firoud, Barlaguet et les autres…

Une nouvelle carrière commence pour Gérard qui étudie à La Grand’Combe avant de rejoindre l’Institut National de Football (INF Vichy) créé en 1972. Il y travaille aux côtés de Pierre Pibarot pour qui il entretient un grand respect : « Il m’a aidé et m’a appris le football. C’était un maître tactique. A cette époque, les entraîneurs avaient des styles de jeu et ils donnaient une identité à leur équipe. Kader Firoud n’était pas intéressé au milieu de terrain, Albert Batteux voulait garder le ballon. Avec Robert Domergue, chaque joueur disposait d’une zone, et José Arribas prônait un jeu sans ballon. Pierre Barlaguet était aussi un ami. Nous avions des idées communes avec Michel Hidalgo. Un jeu basé sur le contrôle du ballon, l’attaque et la défense de zone plutôt que sur le marquage individuel. »

L’Uzétien fabrique des personnages en bois • Photo de : Norman Jardin

Alain Giresse : “Beaucoup de rigueur et d’attention pour ses joueurs”

Parler du jeu et des techniciens, c’est ce qu’aime l’Uzétien. Il faut dire que sa carrière d’entraîneur a été brillante avec un titre de champion de France en 1982 et une Coupe de France en 1980 avec l’AS Monaco et une finale perdue avec l’Olympique de Marseille en 1987. » C’est une personne très consciencieuse, très professionnelle avec beaucoup de rigueur et d’attention envers ses joueurs. Il a une approche très simple, très naturelle et directe. On devient tout de suite accro à ce genre d’entraîneur », abonde Alain Giresse, éminent membre du carré magique. Le football, c’est aussi des amitiés sincères comme celle entre l’ancien entraîneur et ses joueurs. Avec Joël Bats par exemple, qui vient le voir régulièrement à Uzès.

L’ancien footballeur se consacre avec succès à la peinture. • Photo de : Norman Jardin

Joël Bats : « Il nous a apporté confiance et sérénité. C’est un homme extraordinaire »

Il nous a apporté confiance et sérénité. C’est un homme extraordinaire », insiste l’ancien gardien de l’équipe de France. Gérard Banide aime le football mais pas que : « Nous nous levons régulièrement très tôt le matin pour aller aux puces ou aux vide-greniers. », explique Jacqueline, sa femme. Agile de ses mains lorsqu’il était gardien de but, le Gardois d’adoption a conservé sa dextérité manuelle. Dans ses temps libres, il se consacre à la peinture artistique, mais aussi à l’écriture, au dessin et à la réalisation de figures en bois. Pas à exposer, juste pour le plaisir ou pour offrir à des amis.

Cet amateur de chefs-d’œuvre n’oublie pas l’Euro remporté par le gang Hidalgo, ce groupe qui était aussi le sien. Quarante ans plus tard, les héros de 1984, avec Gérard Banide, sont les seuls à pouvoir légitimement se targuer d’être : « Pour toujours le premier ».

 
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