Trois centenaires sous le même toit

À Saint-Eustache, une résidence compte non pas un, ni deux, mais trois centenaires.


Publié à 1h32

Mis à jour à 5h00

Peu de personnes à l’aube de la cinquantaine peuvent se vanter d’avoir un grand-parent encore en vie.

«C’est assez spécial!» », s’exclame Guylaine Laliberté, petite-fille de Florence Beaupré. À 105 ans, sa grand-mère est doyenne de la Résidence Chénier, à Saint-Eustache.

Impressionnant, dites-vous ? Il y a plus. Centenaires comme elle, l’établissement compte trois résidents sur moins de 100.

« Les centenaires se déroulent dans les résidences. Trois en même temps dans la même résidence, je n’ai jamais eu la chance de voir ça », souligne son propriétaire Bilal Khoder, propriétaire d’une dizaine de résidences.

Denise Ménard est la dernière à se joindre au club. C’est justement à l’occasion de son anniversaire que l’établissement a ouvert ses portes aux médias, un récent après-midi de juin.

Légèrement voûtée sur sa chaise, elle a posé devant les caméras, son fils avec une tête aussi blanche qu’elle sur son bras. « Je n’aurais jamais cru pouvoir arriver aussi loin ! » », s’exclame-t-elle, ne sachant plus quoi faire des bouquets de fleurs et des cartes de vœux qui s’entassent sur ses frêles genoux.

Bien habillés, les trois stars du jour étaient assis côte à côte dans la petite cafétéria décorée de ballons dorés.

Assise entre ses cadets, Florence Beaupré absorbait l’instant présent, une larme perlant au coin de ses yeux clairs. Sa surdité rendait la communication difficile, ses deux fils prenaient le relais devant des interlocuteurs admiratifs.

Portrait craché de leur mère, ils décrivent une femme active, curieuse de tout, qui préfère être avec les jeunes. « Eh bien, des septuagénaires », relativise Robert Laliberté.

PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

Florence Beaupré, 105 ans, avec ses fils Robert et Guy Laliberté

Née en 1918 à L’Ancienne-Lorette, Florence Beaupré grandit dans une famille ouvrière composée de neuf frères et sœurs. Elle s’installe plus tard à Montréal, où elle se marie en 1942.

«Je ne sais pas à quel point il y avait d’amour entre eux», s’interroge Guylaine Laliberté. Mais c’était l’époque : « La vie de couple n’était pas forcément un choix. »

« Ton grand-père m’a choisi parce que j’étais sourd et que je ne vivrais pas vieux. Il doit se retourner dans sa tombe », lui a même dit un jour sa grand-mère.

Même à un âge avancé, elle maintient la plupart de ses activités. Elle a voyagé pour la première fois en Europe à 86 ans et a fait du camping jusqu’à 102 ans.

« Elle n’a pas pris de médicaments depuis deux ans ! », se demande sa petite-fille.

Alors quel est son secret ? Déménager quotidiennement ? Mangez sain ?

«On vous le donne», commence Robert Laliberté en baissant la voix. « Elle mange son steak presque cru », nous murmure-t-il à l’oreille avec un sourire complice.

“Son monde, c’est nous”

Il y a de plus en plus de centenaires au Québec. Ils étaient 3 200 en 2021, dont 78 % de femmes. Selon les projections, leur nombre pourrait grimper à plus de 44 400 en 2066.

«Je ne pense pas qu’il y ait là un grand secret…», affirme Denise Ménard. «Je le prends un jour à la fois. J’essaie de m’occuper. »

PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

Denise Ménard et son fils Richard Richer

Née en 1924, elle grandit à Verdun dans une famille de six enfants. Elle a vécu l’ère des tickets de rationnement.

« Elle vivait dans un immeuble de trois, quatre appartements. Sa grand-mère préparait de la soupe et elle montait apporter des bols à d’autres familles qui avaient faim», raconte la compagne de son fils Richard Richer.

En 1945, elle épouse celui qui restera le seul homme de sa vie. Le couple s’installe à Longueuil, où ils élèvent leurs deux enfants.

«C’était l’amour de sa vie, son Gérard», raconte son fils. Il est décédé il y a longtemps, à l’âge de 73 ans.

Après toutes ces années, elle possède encore une lettre qu’il lui a écrite sur un morceau d’écorce de bouleau alors qu’il était en poste à Terre-Neuve pendant la Seconde Guerre mondiale.

C’est la réalité de tous les centenaires. Le deuil vient avec le titre. À 100 ans, Denise Ménard est la seule survivante de ses frères et sœurs, en plus d’avoir perdu sa fille.

« Aujourd’hui, son monde, c’est nous. Ses enfants, ses petits-enfants et ses arrière-petits-enfants», confie Richard Richer en lui jetant un regard plein de tendresse.

 
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