A Genève, Contrechamps met en lumière les notes de Catherine Lamb

Pour son dernier concert sur abonnement de la saison, Plans inversés avance sur la pointe des pieds, dans une grande discrétion, armé d’une flotte d’instruments réduits à l’essence. La démarche, spartiate dans ses moyens, nous rapproche néanmoins de formes musicales intrigantes, qui sont au cœur du double rendez-vous musical, le mardi 7 mai et le mercredi 8 mai. 6 Toitsfief de l’ensemble genevois, il s’agira d’une figure de la création contemporaine, l’Américaine Catherine Lamb, et une de ses pièces emblématiques, « Muto Infinitas ». Une œuvre longue – près d’une heure – au caractère fragile, poétique et méditatif, écrite pour contrebasse et flûte basse microtonale, en quart de ton.

Harmoniques naturelles

On y entendra de quoi sont faites les explorations du compositeur, les approches qui, ici comme ailleurs, confinent à la physique et à une quête presque mathématique. Parce que Catherine Lamb sonde depuis longtemps les qualités du son, elle s’intéresse à la perception que nous en avons en jouant dans une zone hybride, où consonance et dissonance, mélodie et harmonie, se croisent et s’entremêlent. Un territoire où timbres et textures instrumentales se confondent au point de dérouter l’auditeur. “Muto Infinitas”, avec sa longue introduction et ses passages suspendus, nous éloigne de la gamme tempérée qui domine presque tout ce que l’Occident a produit depuis huit siècles, et nous rapproche des harmoniques naturelles.

«Cette enquête sonore présente des enjeux importants pour les musiciens», constate au téléphone le directeur de Contrechamps, Serge Vuille. Il faut se débarrasser d’une tradition, désapprendre beaucoup, se débarrasser de certains réflexes et adopter de nouvelles techniques. Catherine Lamb explore les questions liées à l’intonation juste et au microtonal avec l’ensemble qu’elle a fondé. Elle dit souvent qu’elle crée des monochromes blancs, qu’elle rend visibles l’absence et le silence. Autant dire que sa musique, de plus en plus appréciée du public et des interprètes, demande une préparation importante. Nous ne pouvons y jouer à aucun moment ni de quelque manière que ce soit. »

À Genève, « Muto Infinitas » propose une expérience perceptuelle qui dépasse le fait musical tel qu’on l’entend habituellement. Parmi les intentions du compositeur se trouve celle-ci : l’idée qu’une mélodie puisse émerger lentement, parmi les couches de sons, sans que l’auditeur ait conscience du moment où elle commence.

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