Commentaires sur la lettre ouverte de M. Abdoulaye Sall, concernant la création de la Direction des Affaires religieuses et l’intégration des diplômés de l’enseignement arabe

Commentaires sur la lettre ouverte de M. Abdoulaye Sall, concernant la création de la Direction des Affaires religieuses et l’intégration des diplômés de l’enseignement arabe
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Dans une lettre ouverte adressée au Président de la République du Sénégal concernant la création de la Direction des Affaires Religieuses et de l’Intégration des Diplômés de l’Éducation Arabe, M. Abdoulaye Sall, Inspecteur de l’Éducation à la retraite (et « Militant à ses heures perdues »), exprime ses inquiétudes concernant cette décision.

Ces préoccupations s’articulent autour de trois questions.

Premièrement, pour lui, cette décision « semble indiquer une préférence non seulement pour une foi particulière, mais aussi pour une discipline d’enseignement spécifique ».
Ensuite, il craint que « l’équilibre et la cohésion entre les différentes communautés religieuses du Sénégal » puissent en être affectés.

En troisième lieu, il pose le problème de la pertinence de créer « une structure spécifique pour les diplômés en arabe, et non pour ceux des autres langues (français, anglais, russe, allemand, espagnol, langues nationales…) Et il y voit un « forme de favoritisme qui porte atteinte aux principes d’équité et d’égalité des chances pour tous les citoyens, quelle que soit leur formation académique ».

Il s’interroge enfin « sur le placement de cette direction au sein de la Présidence ». Ce qui signifierait pour lui « une ingérence politique dans des domaines qui devraient plutôt relever de technicités éducatives et religieuses gérées de manière plus neutre et indépendante ».

Dans cette lettre, M. Sall fait référence à la Constitution, notamment à ses principes de laïcité, d’égalité et de neutralité.

Avant de commenter ces préoccupations, je dois avant tout saluer l’initiative et la démarche citoyenne adoptées par l’auteur. En effet, dans une république démocratique, les débats doivent être libres et les discussions raisonnées.

Cela dit, je voudrais être en désaccord avec lui sur les questions soulevées.
Pour ma part, je voudrais exprimer à travers les lignes suivantes mon désaccord avec les arguments développés par l’auteur.

Premièrement, penser à une « préférence pour une confession » quand on parle d’« affaires religieuses », c’est comme si le terme « religieux » était synonyme du terme « islamique » ou « chrétien », alors que toutes les confessions religieuses sont concernées.

Quoi de plus pertinent que de mettre en place une structure qui fédère, oriente, coordonne et rationalise l’action gouvernementale liée à la vie religieuse du pays, action menée quotidiennement dans tous les domaines : éducatif, économique, social, politique etc.

Considérer que cette décision pourrait être contraire au principe de laïcité fait, à mon avis, partie de la compréhension particulière et non unanimement partagée que l’auteur a de cette notion.

Ensuite, je me demande comment la nomination d’une personne possédant les compétences requises – quelle que soit sa confession – pourrait affecter « l’équilibre et la cohésion entre les différentes communautés religieuses du Sénégal » si la vision, les missions, les stratégies, les actions, les valeurs de ladite structure est clairement définie.

M. SALL a peut-être oublié que les affaires religieuses relevaient du ministère de l’Intérieur et que plusieurs personnes se sont succédées à la tête de ce département.

Troisièmement, l’intérêt porté à « l’intégration des diplômés arabes » ne doit pas être perçu comme une préférence pour une discipline d’enseignement spécifique » ou une « forme de favoritisme qui porte atteinte aux principes d’équité et de « l’égalité des chances pour tous les citoyens », mais, en outre, , comme une volonté de rétablir l’équité sociale face à l’injustice et à la marginalisation subies par ces diplômés, souvent livrés à eux-mêmes (avant et après l’indépendance du Sénégal).

Par ailleurs, cette cible, considérée par certains comme analphabète, possède des compétences avérées pouvant contribuer au développement économique, social et culturel du Sénégal.

De plus, comparer la langue arabe à d’autres langues comme l’espagnol, le portugais ou l’anglais, c’est véritablement oublier sa place dans l’histoire et la culture de la nation sénégalaise.
Venant d’un inspecteur de l’éducation, cette attitude me surprend profondément. (Est-ce peut-être là la casquette d’activiste que l’on porte !). En réalité, le mot clé actuellement dans le monde éducatif est Équité, depuis la formulation des Objectifs de Développement Durable (ODD) par les Nations Unies.

Enfin, concernant les interrogations de l’auteur sur la domiciliation de cette Direction à la Présidence de la République, j’estime qu’il n’y a pas d’« ingérence politique ». Le choix se justifie par l’importance et la transversalité des faits religieux qui concernent la quasi-totalité des départements ministériels.

Pour conclure, je salue d’une part cette décision du Président de la République et d’autre part les réflexions de l’inspecteur Sall qui incitent à la réflexion et aux échanges sur les grandes questions de la nation sénégalaise, particulièrement dans ce contexte où les changements souhaités et la rupture ne manquera pas de perturber certaines zones de confort et de susciter des inquiétudes.

Dr Same Bousso Abdourahman
Inspecteur de l’éducation (en arabe)
Docteur en Sciences Islamiques
[email protected]
Touba, le 20 avril 2024

 
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