Pourquoi l’UDC ne veut pas interdire les pancartes nazies en Suisse

Pourquoi l’UDC ne veut pas interdire les pancartes nazies en Suisse
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Seule l’UDC s’oppose à l’interdiction des pancartes nazies dans l’espace public. Pour éviter tout blocage, le rapporteur francophone du texte qui sera voté mercredi propose de diviser le dossier législatif en deux. Explications.

Les parlementaires savent-ils de quoi ils parlent ? Pas vraiment et ils en sont bien conscients. Le sujet est sérieux : il s’agit d’interdire les pancartes nazies. Mais pas seulement. La motion sur laquelle le Conseil national est appelé à voter mercredi comporte de nombreux filets dérivants : un fourre-tout peu soucieux des marchandises. Déjà adopté par le Conseil des Etats, le texte de la motion entend interdire non seulement les signes du Troisième Reich (la croix gammée, les lettres SS et le crâne associé à l’organisation nazie), mais aussi les « moyens de propagande » visant à dénigrer les membres d’un groupe ethnique ou d’une religion. Vaste programme. Trop vaste ?

D’abord les signes nazis, on verra pour le reste plus tard

«C’est pourquoi nous proposons au Conseil fédéral de traiter d’une part et le plus rapidement possible la demande relative à l’interdiction des symboles nazis et d’autre part de se pencher sur l’interdiction de tous les signes haineux», explique le co-rapporteur de la motion, le L’écologiste vaudois Raphaël Mahaim, membre de la commission des affaires juridiques du Conseil national.

Mercredi, la Chambre basse votera également une initiative parlementaire proposant d’interdire uniquement les pancartes nazies.

«La commission recommande au Conseil national d’adopter la motion et l’initiative parlementaire, tout en invitant le Conseil fédéral à agir en deux étapes»

Raphaël Mahaim, conseiller national Verts/VD

L’implication, s’il y en a une, est claire et peut se résumer par un dicton : une prise vaut mieux que deux. En effet, l’interdiction des symboles nazis dans l’espace public ne devrait pas susciter d’opposition majeure. Le travail législatif n’en sera que plus rapide. En cas de référendum, on imagine mal les populations s’opposer à cette interdiction.

Il en irait autrement, suppose-t-on, s’il fallait élaborer un texte interdisant tout signe ou moyen de propagande pouvant être interprété comme une manifestation de haine raciale, ethnique ou religieuse. Pas sûr que les « minarets » de 2009 ou les « moutons noirs » de 2010, affiches chocs illustrant les campagnes victorieuses de l’UDC, échapperaient au couperet d’une telle loi. A l’époque, ces représentations ne relevaient pas du droit pénal antiraciste.

Aujourd’hui, l’UDC, aux prises avec des accusations d’intrusion de l’extrême droite dans ses rangs, est le seul parti à s’exprimer majoritairement à Berne contre l’interdiction des pancartes nazies. Pour le conseiller national Vaud UDC Yvan Pahud :

« Il y a un risque d’inflation législative. Et puis, il y a une certaine hypocrisie à toujours désigner l’extrême droite comme responsable de la manifestation de la haine antisémite, alors qu’elle est aujourd’hui principalement l’œuvre de milieux musulmans ou d’extrême gauche.»

Yvan Pahud, conseiller national UDC/VD

Cependant, lors du vote du groupe national-conservateur, Yvan Pahud s’est abstenu. Il explique:

«Pour les personnes touchées par la haine antisémite, il est important de faire savoir que les pancartes nazies ne sont pas tolérables en Suisse»

Yvan Pahud, conseiller national UDC/VD

Pour le président de l’UDC Vaud, Kevin Grangier, “il est clair que les signes nazis n’ont pas leur place en Suisse, mais le texte de la motion crée une insécurité juridique sur le futur texte de loi qui pourrait en résulter”.

“Et la faucille et le marteau ?”

« Le problème, c’est qu’on ne sait pas ce qui serait interdit et ce qui serait toléré. Le marteau et la faucille du communisme, par exemple, au nom duquel des dizaines de millions de personnes ont été tuées et qui n’a rien à envier au fascisme ou au nazisme, seraient-ils interdits ?

Kevin Grangier, président de l’UDC Vaud

L’écologiste Raphaël Mahaim n’élude pas la question, à l’heure où ces symboles communistes font leur entrée dans certaines universités suisses. C’est pourquoi, une nouvelle fois, il plaide pour un traitement séparé du dossier par le Conseil fédéral : les signes nazis en priorité. Selon lui, ce ne sont pas, en l’état, les provocations de l’UDC qui seraient visées par cette loi, mais idéologies prônant la destruction et la mort. Outre le nazisme, il pense à Daesh et son drapeau, ainsi qu’au Hamas, pour lequel on sait que les Verts sont favorables à son inscription sur la liste des organisations terroristes.

Mais pourquoi faudrait-il voter une loi spécifique ou un ajout au code pénal pour interdire les symboles nazis ? Ne sont-ils pas déjà interdits ? Réponse de l’avocat Raphaël Mahaim :

« Actuellement, ces symboles, même affichés dans l’espace public, ne relèvent pas toujours de la norme pénale antiraciste de 1994, tant qu’ils ne sont pas associés à un discours de haine. Au fond, une croix gammée collée sur la lunette arrière d’une voiture n’est pas nécessairement mauvaise aux yeux de la loi et c’est précisément ce que nous voulons changer.»

Raphaël Mahaim, conseiller national Verts/VD

Le débat sur l’interdiction des pancartes nazies, potentiellement étendue à d’autres symboles de haine, a été relancé en Suisse après l’attaque meurtrière du Hamas le 7 octobre dans le sud d’Israël.

 
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